Le PDG d'Orange déplore « un vrai problème avec le prix du dégroupage »

Alors que de nombreux élus locaux se plaignent de coupures sur le réseau cuivre d'Orange dédié au téléphone et à l’ADSL, et chargent copieusement l'opérateur, Stéphane Richard juge ces critiques « excessives ». Le PDG du groupe estime qu’il faut augmenter le prix du dégroupage, payé par les opérateurs alternatifs pour accéder à cette infrastructure, pour investir davantage de moyens dans son entretien.
Pierre Manière
Stéphane Richard, le PDG d'Orange.
Stéphane Richard, le PDG d'Orange. (Crédits : Reuters)

Stéphane Richard a présenté ce mercredi ses vœux à la presse lors d'une conférence sur le site du futur siège d'Orange à Issy-les Moulineaux. Le PDG du leader français des télécoms a suivi avec attention les piques de nombreux maires, qui tirent à boulet rouge depuis plusieurs semaines sur la qualité de service du réseau cuivre. Aux dires des élus locaux et de plusieurs parlementaires, celui-ci s'est largement dégradé. Des problèmes et dysfonctionnements privent ainsi, déplorent-ils, leurs administrés de téléphone et d'ADSL pendant parfois de longues semaines. La grogne est telle que 215 élus ruraux se sont fendus, mi-décembre, d'une tribune au vitriol dans le JDD, accusant l'opérateur historique de délaisser ce réseau dont il a la charge. Il y a deux semaines, le gouvernement s'est emparé du sujet : Cédric O, le ministre en charge des télécoms, a confié à la députée LREM Célia de Lavergne une « mission flash » pour préciser ces dysfonctionnements et faire des propositions à l'exécutif.

Cette volée de bois vert a irrité Stéphane Richard. D'après lui, ces remontrances sont « excessives ». Et s'il ne nie pas qu'il existe « des coupures qui ne sont pas réparées suffisamment vite », il les qualifie de « marginales ». Surtout, « elles ne doivent pas masquer que sur un plan national, le réseau cuivre fait l'objet d'une attention et d'une allocation de moyens et de ressources considérable de la part d'Orange ». Pour convaincre, le PDG s'est armé d'une batteries de chiffres. En 2019, l'opérateur historique a effectué 15 millions d'opérations de maintenance pour réparer divers incidents, a souligné le dirigeant. Il rappelle qu'en 2018, un programme sur la qualité de service de la boucle locale cuivre a été initié. Il faut dire qu'à l'époque, l'Arcep, le gendarme des télécoms, avait remonté les bretelles de l'opérateur, jugeant que son réseau s'était trop dégradé. Reste que 2020, Orange a recruté 220 techniciens supplémentaires pour l'entretenir. En 2021, il compte encore se renforcer avec 120 collaborateurs supplémentaires. Stéphane Richard a rappelé que le groupe consacre 500 millions d'euros par an à l'entretien de ce réseau. « Personne ne peut nous reprocher de ne pas accorder l'attention que cette infrastructure mérite », a-t-il jugé.

« L'équation économique est impossible »

Remonté, Stéphane Richard a également ajouté que « l'équation économique » concernant l'entretien du réseau cuivre était tout bonnement « impossible ». Pourquoi ? Parce qu'« Orange supporte seul la charge de l'entretien de ce réseau, alors qu'au même moment, on lui demande de mettre le paquet sur la fibre », argue-t-il. En parallèle, il est vrai que les revenus d'Orange sur le réseau cuivre baissent à mesure que les consommateurs troquent leur vieil ADSL pour la fibre. « Le bouclage économique de tout ça tient dans un paramètre qui repose pour l'essentiel sur le prix du dégroupage », a insisté Stéphane Richard. Régulé par l'Arcep, il s'agit du prix payé, à la ligne, par les opérateurs alternatifs SFR, Bouygues Telecom et Free pour vendre leurs abonnements ADSL.

Or, « nous avons un vrai problème avec le prix du dégroupage », s'est agacé Stéphane Richard. D'après lui, il est bien trop faible pour permettre à Orange d'investir davantage dans l'entretien du réseau. Celui-ci se situe aujourd'hui à 9,70 euros, et Stéphane Richard voudrait l'augmenter de pas moins de 3 euros ! « C'est un message que j'envoie à la nouvelle présidente de l'Arcep [la députée Laure de La Raudière, Ndlr] », a poursuivi le patron. D'après lui, il manquerait « quelques centaines de millions d'euros » par an à Orange pour préserver une bonne qualité de service sur le réseau dans les années à venir. Stéphane Richard appelle donc à trouver « une réponse collective » avec l'Etat, le régulateur et les autres opérateurs, à ce problème.

Vieille pomme de discorde

Le prix du dégroupage constitue une vieille pomme de discorde entre Orange, l'Arcep et les opérateurs alternatifs. SFR, Bouygues Telecom et Free veulent logiquement voir ce tarif baisser. D'abord pour diminuer le montant du chèque qu'ils signent tous les mois à Orange, mais aussi, arguent-ils, pour inciter l'opérateur historique à fermer plus rapidement le réseau cuivre au bénéfice de la fibre. Le régulateur, de son côté, a récemment choisi d'augmenter très modérément le prix du dégroupage pour la période 2021-2023. Mais il a brandi une carotte à l'intention de l'opérateur historique. « Si Orange venait avec un plan extrêmement concret et ambitieux de migration accélérée de ses abonnés du cuivre vers la fibre, alors, dans ce cas, il serait juste d'ouvrir la question d'une hausse plus significative de la paire de cuivre, nous expliquait Sébastien Soriano, le précédent président de l'Arcep, au mois de septembre. C'est désormais à Laure de La Raudière de reprendre le flambeau de cet épineux dossier. Nul doute qu'il sera prioritaire : lors de son audition au Sénat, la semaine dernière, elle a jugé la situation « très préoccupante ».

Pierre Manière

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Commentaires 2
à écrit le 27/01/2021 à 18:24
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Stéphane Richard estime que sa rémunération de 1,61 millions (fixe + variable) pour l'exercice 2019 insuffisante et qu'il faut faire payer à la concurrence son train de vie on ne peut plus confortable tout en négligeant l'entretien du cuivre pour jus...

à écrit le 27/01/2021 à 18:18
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ben c'est pas tres compatible avec le fait que les politiciens veulent offrir des acces en tout gratuit tout illimite a des operateurs qui vendront ca 2 euros pour tous la france c'est le pays du tout gratuit rembourse par la secu et quand ca coinc...

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