[Article publié le 8/05 à 8h21, mis à jour avec les résultats à 9h58]
Endetté et brûlant du cash, Alstom lance pleinement son plan de désendettement. Le constructeur ferroviaire va procéder à une augmentation de capital de près d'un milliard d'euros. Attendue, cette opération a été confirmée à l'occasion de la publication des résultats annuels ce mercredi 8 mai. Elle va contribuer à l'objectif que s'est fixé le groupe de réduire sa dette de 2 milliards d'euros d'ici mars 2025. Outre cette augmentation de capital, Alstom annonce également dans une émission obligataire hybride d'environ 750 millions.
Les investisseurs suivent
Cette augmentation de capital se fera avec un maintien des droits préférentiels de souscription pour les actionnaires. Selon Alstom, elle « sera exécutée au plus tard à la fin du mois de septembre 2024 sous réserve des conditions de marché et de l'approbation de l'Autorité des marchés financiers ». Les investisseurs institutionnels Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) et Bpifrance, ont déclaré, selon Alstom, « leur intention de souscrire à l'augmentation de capital au prorata de leur détention ». Ils détiennent respectivement 17,4 % et 7,5 % du capital du groupe ferroviaire.
L'émission obligataire devrait être réalisée, elle aussi, d'ici septembre 2024. D'après Alstom, 50 % des retombées devraient être comptabilisés en capitaux propres avec l'approbation de l'agence de notation Moody's.
Le dernier volet de ce plan, déjà annoncé et engagé, est la cession d'actifs à hauteur de 700 millions d'euros. Cela comprend la vente de sa participation de 20% dans le constructeur ferroviaire russe Transmashholding (TMH) pour 75 millions d'euros, conclue en janvier 2024, et surtout la vente de son activité de signalisation en Amérique du Nord à Knorr-Bremse. Cette seconde transaction, qui doit être finalisée cet été, doit rapporter environ 630 millions d'euros.
Réduire la dette de deux tiers
Avec ces trois opérations, Alstom va donc pouvoir générer environ 2,4 milliards d'euros de cash, dont 2 milliards d'euros pourront être comptabilisés dans le plan de désendettement. Cela devrait permettre au groupe de réduire sa dette nette de deux tiers, elle qui atteint quasiment 3 milliards d'euros à l'issue de l'exercice 2023-2024, qui s'est achevé au 31 mars.
« Avec le soutien de nos actionnaires de référence, nous allons rapidement exécuter le plan de désendettement de 2 milliards d'euros, permettant la stabilisation de notre notation crédit en catégorie « Investissement ». En avril, nous avons annoncé la vente de l'activité de signalisation conventionnelle d'Alstom en Amérique du Nord à un prix favorable, mettant ainsi en évidence la qualité et l'attractivité des actifs du Groupe », s'est félicité Henri Poupart-Lafarge, président du conseil d'administration et directeur général d'Alstom dans un communiqué.
Un bilan financier mitigé
Sur le plan des résultats, Alstom affiche un bilan contrasté encore marqué par d'importantes difficultés financières. Le montant des commandes reçues a reculé par rapport au bon exercice précédent mais s'établit tout de même à 19 milliards d'euros. « Les commandes et les ventes ont été un peu meilleures qu'attendues avec une forte fin d'année », a déclaré Henri Poupart Lafarge, suivi par son directeur financier Bernard Delpit, qui s'est réjoui d'un bon quatrième trimestre avec plusieurs commandes de petite taille.
Le ratio avec le chiffre d'affaires - en hausse à 17,6 milliards d'euros - reste supérieur à 1. D'où une hausse du carnet de commandes, qui atteint désormais 92 milliards d'euros. Malgré ses difficultés, Alstom a largement de quoi voir venir.
D'autant que les perspectives restent bonnes avec une forte demande à travers le monde selon le patron du groupe, avec l'identification de projets pour les trois prochaines années à hauteur 190 milliards d'euros, dont plus de la moitié en Europe. Ce « pipeline » a néanmoins été revu quelque peu à la baisse avec l'annulation d'un grand projet en Inde. Henri Poupart-Lafarge se veut également plus sélectif dans les candidatures, afin de ne pas disperser ses forces.
Alstom paye encore l'achat de Bombardier
Le résultat opérationnel ajusté atteint près d'un milliard d'euros, soit 17 % de plus que lors de l'exercice précédent. La marge opérationnelle progresse pour atteindre 5,7 %, « en ligne avec nos prévisions » s'est réjoui Henri Poupart-Lafarge.
Les choses se gâtent ensuite. Payant toujours l'intégration de Bombardier - son concurrent canadien racheté en 2021 et pas encore entièrement digéré - mais aussi des coûts de restructuration, Alstom affiche une perte nette de 309 millions d'euros. C'est plus du double de l'an passé.
Indéniablement, Alstom a continué à brûler du cash avec un flux de trésorerie disponible largement négatif. Pourtant, avec -557 millions d'euros, il est dans la fourchette haute des prévisions faites en novembre dernier comme le fait remarquer le patron du groupe. Il faut dire qu'au premier semestre, Alstom avait brûlé 1,12 milliard notamment à cause de la variation du besoin en fonds de roulement provoquée par la montée en cadence de la production, mais aussi de retards dans les livraisons dont certains issus des activités de Bombardier. Une situation qui avait provoqué un effondrement du cours de bourse et obligé la direction à réagir.
La deuxième partie de l'exercice a donc été plus favorable, avec l'effet positif de l'accélération des livraisons de contrats majeurs des encaissements, d'acomptes et une baisse des provisions. Henri Poupart-Lafarge y voit aussi les retombées des améliorations opérationnelles qui permettent désormais une meilleure génération de cash et de profits.
Perspectives positives
La situation doit s'améliorer sur l'exercice 2024-2025, tout particulièrement avec la mise en œuvre du plan de désendettement et la fin de l'intégration de Bombardier. Alstom vise ainsi une croissance organique de son chiffre d'affaires d'environ 5 % et la poursuite du renforcement de sa marge opérationnelle ajustée, qui doit atteindre 6,5 % - avec un objectif d'arriver entre 8 et 10 % à moyen terme.
Surtout, le groupe doit à nouveau générer du cash, avec un flux de trésorerie disponible prévu entre 300 et 500 millions d'euros (encore négatif au premier semestre, positif au second). Et il prévoit de cumuler au moins 1,5 milliard d'euros d'ici l'exercice 2026-2027.
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