Putsch ou pschitt

Vincent Bolloré saura-t-il transformer son assaut sur Aegis en une victoire à la Havas ou ses espoirs vont-ils s'évaporer lors de l'assemblée?

Bis repetita placent? Le ton est monté d'un cran entre les dirigeants d'Aegis, la maison-mère du numéro un européen de l'achat d'espace Carat, et son premier actionnaire, Vincent Bolloré. Les derniers rebondissements de cette histoire apparemment sans fin depuis le mois d'août dernier ont comme un goût de "déjà-vu": ils ne sont pas sans rappeler la rocambolesque prise de pouvoir de Bolloré chez Havas, le 6 juin dernier. Après plusieurs semaines de discussions, le conseil d'Aegis a fermé la porte aux demandes pressantes de cet actionnaire qui réclame deux sièges d'administrateurs: le conseil du groupe britannique ne veut pas des deux candidats proposés par Bolloré, ni d'aucun autre représentant de l'homme d'affaires français, par principe, en raison de sa position de président et premier actionnaire de Havas, qui le place en flagrant conflit d'intérêts.

La guerre des nerfs a vécu, voici venue l'ère de la guerre de positions qui annonce la bataille finale. Bolloré peut-il transformer son assaut en une victoire à la Havas? Dans cette affaire, une alliance inopinée de dernière minute avec le fonds Sebastian Holdings - aujourd'hui en pleine offensive sur Vivendi - lui avait offert un triomphe: les quatre représentants que lui refusait le conseil de Havas. Il ne pourra peut-être pas rééditer ce coup de Trafalgar outre-Manche... D'autant que l'effet de surprise avait joué une large part dans la réussite de l'opération.

A Londres, le conseil d'Aegis a jugé particulièrement "shocking" les manières de l'homme d'affaires français qui détonnent avec les usages britanniques, privilégiant le dialogue et les gentlemen's agreements. Les administrateurs d'Aegis ont ainsi déjà prévu de brandir l'Union Jack contre l'envahisseur français afin de rallier les principaux fonds actionnaires qu'ils vont rencontrer dans les jours qui viennent, avant l'assemblée repoussée au 14 juin. C'est un Waterloo qu'ils comptent infliger à ce fossoyeur de la bonne gouvernance à l'anglaise.

Bolloré peut-il réussir un nouveau putsch, un an après celui de Havas? L'ambiance des assemblées générales à la City est bien plus feutrée que celle des grands-messes tumultueuses à la française. Le vote n'y est souvent qu'une formalité, tant chacun des grands actionnaires institutionnels a adressé ses intentions de vote et ses pouvoirs à l'avance. Les espoirs de Bolloré vont-ils s'y évaporer?

Avant la date fatidique, le conseil d'Aegis fourbit ses armes et compte ses hommes: il aurait déjà convaincu son deuxième actionnaire, Fidelity, qui possède plus de 9% du capital, et le troisième, Aegon (un peu moins de 5%), de voter contre l'élection des deux représentants de Bolloré. Mais ce dernier ne s'est pas laissé démonter par ce "non" cinglant et a continué de ramasser des actions Aegis sur le marché. Avec ses 29%, il est assuré de l'emporter si moins de 60% des actionnaires sont représentés à l'assemblée. Il se garde de dépasser le seuil des 30% qui l'obligerait à lancer une OPA. Le conseil d'Aegis serait en effet prêt à capituler si Bolloré respecte les règles et lance une offre en bonne et due forme, moyennant plus de 1,5 milliard d'euros. Une issue qui aurait le goût d'une victoire à la Pyrrhus pour les deux camps...

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