C'est une nouvelle révélation dans le scandale Wirecard, du nom de la Fintech allemande accusée d'une fraude de près de 2 milliards d'euros, et qui n'en finit pas de dévoiler ses zones obscures. Cette fois-ci, c'est l'un des réseaux mafieux les plus dangereux d'Europe qui est mentionné dans ce dossier déjà bien fourni, comme le révèle lundi le Financial Times. Non seulement le prestataire de services de paiement est soupçonné d'avoir menti sur son bilan financier, mais il a également participé au blanchiment de l'argent reçu par un casino en ligne, basé à Malte, et lui-même relié au réseau Ndrangheta, un réseau mafieux opérant depuis le sud de l'Italie en Calabre, selon des documents légaux italiens que s'est procuré le journal britannique. Le quotidien émet néanmoins l'hypothèse que la Fintech n'ait pas eu connaissance des ces agissements. Pour le moment, Wirecard a refusé de commenter ces nouvelles révélations.
Dans les faits, jusqu'en 2017, Wirecard a fait transiter des millions d'euros de paiements via sa plateforme pour le compte de CenturionBet, une société maltaise spécialisée dans le gaming qui a ensuite été accusée par les autorités de blanchiment d'argent. Une activité sur laquelle Wirecard AG a d'ailleurs bâti sa notoriété, au début des années 2000.
Le système monté avec le casino en ligne permettait de transférer des fonds depuis l'île méditerranéenne, membre de l'Union européenne depuis 2004, vers l'Italie. Le bénéficiaire, "Ndrangheta", n'est autre que l'une des organisations criminelles les plus dangereuses d'Europe, impliquée dans des affaires de trafic de cocaïne en lien avec les cartels d'Amérique du sud, de détournement de centres d'aides et de soins pour les réfugiés de la Méditerranée arrivant d'Afrique, de ventes d'armes en contrebandes ou encore de meurtres, rapporte le Financial Times.
Tandis que le fondateur et deux ex-directeurs de Wirecard sont toujours incarcérés à Munich en Allemagne, ces dernières révélations viennent questionner encore un peu plus l'efficacité des contrôles des États sur les jeunes sociétés innovantes du secteur financier. Citée par le quotidien économique, la société de gaming CenturionBet a néanmoins cessé d'opérer en 2017, au moment où les autorités maltaises décidèrent de suspendre sa licence. Incorporée à Malte, île réputée pour son environnement fiscal particulièrement favorable aux entreprises (avec un taux effectif d'imposition compris entre 0% et 10% ndlr), CenturiontBet, le cheval de Troie du e-casino maltais, était une filiale d'une société écran basée au Panama, raconte le FT. Un raid anti-mafia mené par les autorités maltaises avait d'ailleurs permis l'arrestation de 68 personnes.
Un réseau international qui se dévoile un peu plus
L'affaire Wirecard est donc loin d'être circonscrite à l'Allemagne. Déjà, l'Autrichien Jan Marsalek, l'ex-directeur des opérations du prestataire de paiements en ligne, est en cavale, après la découverte le mois dernier de comptes fictifs de la Fintech ouverts aux Philippines. Il aurait même été lié aux services de renseignement autrichiens (BVT) et aurait informé le parti autrichien d'extrême droite de ce pays, le FPÖ, selon le quotidien autrichien Die Presse.
L'éclairage sur la face cachée de la start-up, adulée autrefois par les dirigeants politiques allemands, a révélé également que la société, qui vantait les qualités et la fiabilité de son modèle "en B2B2C", avait conscience de générer des pertes depuis 2015, a indiqué la justice outre-Rhin. Cela n'a pas empêché la Fintech de recevoir quatre plus ans plus tard un investissement de 1 milliard de dollars de la banque japonaise Softbank, sous la forme d'un partenariat.
Créée en 1999 près de Munich, Wirecard AG est cotée sur l'indice Xetra à Francfort.
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