Carburants alternatifs dans l'aviation : A quand le coup d'accélérateur ?

Le secteur de l'aviation planche depuis plusieurs années sur les carburants alternatifs, mais une réglementation incitative se fait attendre et la production a du mal à monter en puissance. Pourtant, Constance Thio, vice-président Sustainability & Compliance d'Air France-KLM, Nicolas Jeuland, responsable prospective environnementale et carburants bas carbone chez Safran, Paul Stein, CTO de Rolls Royce, Claire Rais-Assa, cheffe du bureau du climat, de la qualité de l'air et des sujets émergents de la DGAC, et Chris Raymond, Chief Sustainability Officer de Boeing, réunis autour du thème des carburants alternatifs àl'occasion de la septième édition du Paris Air Forum, organisée par La Tribune, ne baissent pas les bras. Et le point de bascule pourrait intervenir dès 2025.

A base d'huiles usagées, de déchets agricoles, d'algues, de plastique ou d'ordures ménagères, une nouvelle génération de carburants alternatifs émerge, accompagnée d'autres innovations, comme l'hydrogène vert et les e.fuels,fabriqués en utilisant de l'électricité issue de sources décarbonées ou de carbone capté dans l'atmosphère. L'heure n'est plus en effet aux biocarburants de première génération, dont les inconvénients, telle la concurrence entre les cultures nécessaires à leur production et celles destinées à l'alimentation, s'étaient vite révélés. L'heure est « aux carburants durables, quelle que soit leur source », souligne Nicolas Jeuland, responsable prospective environnementale et carburants bas carbone chez Safran.

L'impératif de durabilité va d'ailleurs au-delà des seuls carburants alternatifs, puisque d'autres éléments - moteurs moins gourmands en carburant, nouveaux modes de propulsion, design et matériaux pour les fuselages - y contribuent... Dans ces conditions, les réductions d'émissions attendues « vont jusqu'à 80%, voire 100% », précise Chris Raymond, Chief Sustainability Officer pour Boeing. Mais encore faut-il, pour déclarer l'aviation réellement durable, que l'utilisation de ces carburants alternatifs, notamment, se généralise. Elle n'est que de 0,01% actuellement... Comment faire ? D'abord, « ces carburants devront être certifiés. Certains le sont déjà. Ce sera le cas pour d'autres dans deux à trois ans », déclare Paul Stein, CTO de Rolls Royce. En effet, ne réagissant pas exactement comme les carburants fossiles, les nouveaux produits doivent, en étant incorporés jusqu'à 50% dans les mélanges, être sûrs pour les moteurs. Pour tous les panélistes, le choix de la sécurité s'imposera toujours. Mais cela ne suffit pas.

Enclencher un cercle vertueux

La demande doit également être au rendez-vous pour que s'enclenche le cercle vertueux permettant à l'offre de changer d'échelle. Car les investissements sont lourds et les acteurs de la filière de production veulent s'assurer qu'ils auront bien un retour sur investissement. « Nos clients sont très informés sur les carburants alternatifs, souligne Constance Thio, VP Sustainability & Compliance, Air France-KLM, et ils exigent que nous les utilisions. Nous pourrons nous engager sur des quantités achetées ». Ces carburants alternatifs seront-ils plus chers ? Sans doute. Au moins sur le court terme. Ne serait-ce que parce que certaines sources - déchets en tous genres, par exemple - ne se prêtent pas à des opérations intensives, comme le forage pétrolier. Sachant que le carburant représente un tiers des coûts totaux de l'aviation, ce surcoût se répercutera-t-il sur les prix passagers ? Certainement, mais après tout, le prix du pétrole, bas actuellement, a connu des poussées de fièvre dans le passé... « Les prix des carburants alternatifs devraient de toute façon baisser d'ici une dizaine d'années », prédit Paul Stein. En raison de la montée en puissance de la production, mais aussi grâce à des mécanismes de soutien, indispensables pour le développement de la filière.

Feuille de route française

« Nous sommes à une étape cruciale, affirme ainsi le représentant de Boeing, il faut que la réglementation fasse sa part ». Autrement dit, elle doit exiger l'incorporation de carburants alternatifs dans les mélanges. Le point de bascule (2% d'usage) pourrait intervenir dès 2025, selon lui - si, par ailleurs, la production atteint 7 milliards de litres par an.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 27/11/2020 à 8:38
Signaler
Parce que en UE on préfère imaginer des chimères, notre classe dirigeante voit déjà des avions életriques partout dans le ciel dès demain grâce à sa connexion totale avec la réalité de notre monde. Ne pas oublier que l'européiste est un mythoman...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.