"L'agressivité des Américains est très forte sur le marché des hélicoptères militaires" (Bruno Even)

Dans une très longue interview accordée à La Tribune, le PDG d'Airbus Helicopters Bruno Even évoque l'ensemble des problématiques de sa société et du marché des hélicoptères : signatures des contrats Tigre Mark 3 et HIL (Hélicoptère Interarmées Léger) prévues en fin d'année, campagnes stratégiques (Allemagne et Grande-Bretagne), agressivité commerciale des Etats-Unis, reprise du marché des hélicoptères légers, disponibilité des flottes militaires avec un objectif de 50%, rentabilité (vers un Ebit à 10%), rationalisation de l'empreinte industrielle et, enfin, renouvellement de la gamme, notamment des hélicoptères militaires (Tigre et NH90).
Airbus Helicopters a pour objectif de signer en fin d'année le contrat du programme militaire HIL (Hélicoptère Interarmées Léger), la version militaire du H160. Nous sommes alignés sur la configuration, le périmètre technique et le schéma du support de l'appareil avec les forces armées. Les conditions sont négociées. Nous avons créé les conditions d'une convergence et toutes les conditions sont prêtes pour la signature du contrat (Bruno Even, PDG d'Airbus Helicopters).
Airbus Helicopters a pour "objectif" de signer en fin d'année le contrat du programme militaire HIL (Hélicoptère Interarmées Léger), la version militaire du H160. "Nous sommes alignés sur la configuration, le périmètre technique et le schéma du support de l'appareil avec les forces armées. Les conditions sont négociées. Nous avons créé les conditions d'une convergence et toutes les conditions sont prêtes pour la signature du contrat" (Bruno Even, PDG d'Airbus Helicopters). (Crédits : Airbus Helicopters)

La Tribune : Le salon aéronautique de Dubaï a été très intense. Avez-vous eu la confirmation des signes de reprise au Moyen Orient, et au-delà, dans le monde sur le marché des hélicoptères ?
Bruno Even:  Nous constatons que la région Moyen Orient offre à nouveau tant sur le marché civil que militaire, en particulier en Arabie Saoudite, des perspectives de croissances liées à des projets importants pour développer le tourisme, l'EMS et le transport VIP. Cette région est  indéniablement une des zones de croissance pour le marché des hélicoptères. Côté militaire, le Moyen Orient reste une zone historique pour Airbus Helicopters, qui compte des clients fidèles avec lesquels nous avons des relations de confiance. C'est une zone où nous avons fourni beaucoup de Super Puma et de Dauphin. Nous devons donc assurer le support de leurs flottes. Et lorsque les opportunités se présentent, nous devons être présents au moment des renouvellements de flottes dans un marché, qui reste au global difficile.

Que représente ce marché pour Airbus Helicopters ?
Le Moyen Orient devrait pouvoir représenter 10% de nos ventes au niveau mondial en termes de valeur entre les opportunités militaires, qui ne sont jamais régulières, et le marché civil. En ordre de grandeurs, cela représente des ventes d'environ 500 millions d'euros par an avec des hauts et des bas en fonction des campagnes.  

On arrive à la fin de l'année ou presque. Quelle est votre analyse du marché mondial qui semble se relancer en 2021 ?
Certes, il frémit à nouveau mais n'oublions pas que l'année de référence (2020) a été une année de baisse brutale (- 50% de prises de commandes en 2020 par rapport à 2019). L'an dernier a vraiment été un point bas sur lequel j'espère bien que le marché va rebondir. Qu'observe-t-on aujourd'hui sachant que les crises précédentes ont montré que le segment des hélicoptères légers est souvent le premier indicateur de reprise ? Nous observons sur 2021 une vraie reprise sur les hélicoptères légers (monomoteurs et bimoteurs). Toute la gamme (Écureuil, H135, H145) s'est bien tenue. Ce segment devrait revenir au niveau de 2019 dès cette année. Au global, nous progressons de 30% en termes de nombre d'hélicoptères vendus sur les neuf premiers mois de l'année par rapport à 2020. Le marché civil repart sur des bases où il devrait rapidement revenir au niveau de 2019, qui était déjà un point bas. Les deux régions, qui tirent le marché civil, restent encore l'Amérique du Nord et l'Europe : entre 70% et 75% du marché mondial sont générés par ces zones traditionnelles.

Si le marché des hélicoptères légers repart en forte hausse, celui des super médiums et lourds est-il toujours en difficulté ?
Le marché des hélicoptères super medium et lourd reste plus difficile, notamment en raison du marché de l'offshore, qui reste paradoxalement déprimé avec un prix du baril de pétrole, qui tutoie pourtant déjà les 80 dollars. Résultat, on est toujours dans une période de gel des investissements des compagnies pétrolières. Progressivement elles vont reprendre leurs investissements dans l'exploration mais il faut toujours compter sur un effet de décalage. Deuxième frein, les loueurs ont encore beaucoup de S92 dans leur portefeuille. Plus d'une centaine. Ils n'ont pas intérêt à voir arriver de nouveaux hélicoptères sur le marché et poussent au maximum l'utilisation des hélicoptères actuels, dont les S92.

Mais ce raisonnement a ces limites...
...Effectivement. Une des leçons du Covid a démontré que la réduction des émissions de CO2 était une vraie attente de la société et du marché, y compris des compagnies pétrolières. Un hélicoptère lourd est un appareil, qui coûte plus cher à exploiter et surtout, qui consomme plus à l'image du S92. Je reste convaincu qu'il existe un vrai besoin de renouvellement de la génération d'hélicoptères précédente par des hélicoptères de type H175 et H160, qui ont une consommation en CO2 et des coûts d'exploitation plus faibles. J'espère que le marché va basculer à l'horizon de trois ans.

Cela veut-il dire que le marché offshore va se relancer dans deux à trois ans ?
Oui, cette reprise va être progressive en raison des forces contraires : des appareils qui sont déjà amortis font obstacle à l'arrivée de nouveaux appareils de nouvelle génération. Il y a un enjeu d'investissement sur le moyen terme.

En 2021, y a-t-il encore des incertitudes sur le renouvellement des flottes en général ?
Elles demeurent principalement dans l'offshore. Sur le reste du marché civil, nous voyons les premiers signes de reprise. Elle va être très progressive et prendre du temps. Sur le marché militaire, le renouvellement des flottes est conditionné aux équations budgétaires. Et nous remarquons l'impact du Covid-19 dans cette équation : un certain nombre d'États peuvent être amenés à décaler leurs décisions de renouvellement de flotte face aux pressions que la crise fait peser sur les budgets. L'année 2021 montre une reprise dans le civil mais pas dans sur le marché militaire au niveau mondial. Et d'ailleurs, je constate que sur les neuf premiers mois de l'année, le marché militaire en nombre d'hélicoptères n'a pas repris par rapport à 2020. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'opportunités.

Et paradoxalement Airbus Helicopters est en passe de faire sa meilleure année de toute son histoire en termes de prises de commandes avec deux méga-commandes en Europe et en France (Tigre Mark 3 et HIL)...
... mais effectivement une ou deux campagnes militaires peuvent changer la donne d'un bilan annuel. Mais sur les neuf premiers mois de l'année, Airbus Helicopters traverse une année difficile sur le marché militaire et ce constat est en ligne avec le marché mondial. Le renouvellement des flottes militaires françaises (contrats HIL - Hélicoptère Interarmées Léger - et Tigre Mark 3) sont essentiels non seulement en termes de volume de prises de commandes mais aussi en termes de perspectives (maintien de compétences et des chaînes industrielles), de développement, et, enfin, en termes de perspectives industrielles à moyen terme. Ils sont stratégiques pour Airbus Helicopters. Nous sommes sur des horizons de développement à 5/6 ans et de carnet de commandes à 10/15 ans. Il est clair que ces deux contrats majeurs, s'ils se confirment, vont nous donner une visibilité très importante. Dans une période de crise, une société comme la nôtre a besoin de visibilité.

Cette activité sera-t-elle suffisante pour passer le cap difficile à partir de 2022 ?
Le défi auquel nous allons être confrontés est la gestion de la charge industrielle à partir de 2022 et jusqu'en 2024 en raison d'un niveau de prises de commandes, qui était bas ces dernières années du fait du marché. Comment Airbus Helicopters va-t-il traverser cette période de baisse de l'activité industrielle ? C'est tout l'enjeu des commandes que nous souhaitons sécuriser en 2021 aussi bien en France dans le cadre du plan de relance que dans les pays Airbus en Espagne et en Allemagne, pour finalement passer cette période (2022-2024) en maintenant les emplois et les compétences. C'est tout le défi pour lequel aujourd'hui nous parvenons à le traverser sans trop d'écueil.

Au-delà de ces deux grands contrats, quelles sont les perspectives de renouvellement de flottes militaires ?
Je ne commenterai pas, au-delà de ces deux commandes Tigre et HIL, des perspectives à l'export. Mais nous avons constaté dans les pays Airbus (France, Allemagne et Espagne) que le mouvement de renouvellement des flottes a commencé depuis deux ans avec les contrats NH90 en Allemagne et en Espagne. Nous avons des opportunités dans un horizon de trois à quatre ans. A l'export, il y a des opportunités tout comme nous en avons déjà eu dans le passé avec des contrats gagnés à Singapour, au Koweït, en Hongrie ou encore au Qatar. Nous devons gagner régulièrement des campagnes export de ce type-là.

En Allemagne, vous êtes sur une compétition stratégique pour Airbus Helicopters pour un méga-contrat de 40 hélicoptères lourds destinés à équiper la Bundespolizei. Il semble que le calendrier ait glissé. Confirmez-vous ?
Je ne commente pas les campagnes en cours. Je ne sortirai pas de cette règle-là. Le processus est en cours. Il s'agit du renouvellement de 40 Super Puma, qui ont répondu aux besoins de la Bundespolizei. C'est stratégique parce que la Bundespolizei est un client clé pour nous et parce que cette commande s'élève à 40 hélicoptères lourds. Et puis, dans le contexte de crise Covid, vous pouvez imaginer la visibilité et l'impact que pourrait avoir sur notre activité une commande de cette envergure. Nous devons tout faire pour garder cette relation privilégiée mais c'est une compétition. On fera tout pour que ce soit Airbus Helicopters qui gagne. J'estime que nous avons de bons arguments à faire valoir pour que ça soit nous au final. Mais prudence...

Cette commande pourrait-elle être fragilisée par la nouvelle donne politique en Allemagne avec la nouvelle coalition ? En même temps, on a bien vu que lors des inondations en Allemagne, ce qui volait, ce qui était utile, c'étaient les hélicoptères.
Non, je ne vois pas de raison que ce projet d'acquisition soit remis en cause par la nouvelle coalition. Ces hélicoptères répondent à un vrai besoin et vous le soulignez par rapport aux inondations de cet été. On voit l'enjeu et le rôle que jouent les hélicoptères de la Bundespolizei sur les missions de maintien de l'ordre et de secours en situation de catastrophe naturelle. Le besoin est réel et la priorité est clairement là. Nous espérons une décision dans les mois qui viennent.

En Grande-Bretagne, vous êtes également sur une campagne très importante d'autant plus qu'elle concerne le remplacement des Puma. Quel est votre plan de bataille ?
Effectivement, la campagne, qui va s'ouvrir dans les semaines qui viennent en Grande-Bretagne, est stratégique pour Airbus Helicopters car elle concerne le renouvellement des Puma. Nous souhaitons garder des liens privilégiés - industriels et stratégiques - avec le ministère de la Défense britannique (MoD) : la Grande-Bretagne est un pays stratégique pour Airbus en raison de notre forte implantation industrielle. Nous avons une réponse compétitive à la fois sur le plan opérationnel et en termes de budget avec la version militarisée du H175. Non seulement cet appareil est extraordinaire sous l'angle de ses capacités opérationnelles, mais il répondra parfaitement aux besoins de transport militaire, qui est l'enjeu du MoD. En outre, nous souhaitons également répondre à l'attente du gouvernement britannique de localiser la charge industrielle en Grande-Bretagne. Nous proposons de produire le H175M à Broughton au Pays de Galles. Et l'objectif est non seulement d'adresser le marché aux Britanniques à travers cette chaîne de production, mais également tout le marché export auquel nous croyons beaucoup. Nous voulons créer de la valeur pour le client.

Quelle est la quantité d'appareils renouvelés ?
On évoque au total une quarantaine d'hélicoptères. Ce qui va au-delà du remplacement des Puma.

Vous lancez un nouveau produit avec le H175M...
... Nous ne créons pas un nouveau programme. Nous déclinons notre stratégie dans le domaine militaire de développer des variantes dédiées comme le Tigre ou NH90 ou de développer des versions militarisées de nos plateformes civiles. C'est vrai pour le H160, le H145, le Caracal. Ce sera le cas pour le H175, c'est cohérent avec notre stratégie produit. En tenant compte des exigences du marché militaire britannique mais également d'autres clients militaires de demain, et en tenant compte des contraintes export, nous voulons effectivement une variante plus spécifique avec une supply chain, qui soit européenne.

La campagne britannique est-elle la première campagne de lancement du H175M ?
C'est la première campagne majeure. Nous avons déjà des versions gouvernementales et parapubliques Search & Rescue qui offrent déjà des capacités importantes. Nous voulons étendre les capacités de cet appareil.

Dans la compétition mondiale, comment analysez-vous l'agressivité commerciale des Américains, qui sont très présents en Europe et qui ont gagné un petit contrat en Roumanie ?
Jla sens très forte sur le marché gouvernemental et militaire, mais également parapublic avec un enjeu d'influence. On l'a vu en Roumanie avec le contrat obtenu par le ministère de l'Intérieur. Ce n'est pas nouveau non plus. Les contrats défense et gouvernementaux sont également un instrument d'influence des Etats-Unis. Il y a également des enjeux industriels. Dans un contexte de fin des grands contrats d'acquisition Black Hawk et Apache aux Etats-Unis, l'exportation sur les marchés militaires est un enjeu de stabilité et de résilience pour l'industrie américaine. A Airbus Helicopters de naviguer dans ce paysage, d'être compétitif, de proposer les bons produits et de travailler également en bonne coopération entre la France, l'Espagne et l'Allemagne sur des pays à l'export. Dans certains pays, on sait très bien que la dimension politique est essentielle pour gagner des contrats. Nous avons besoin du soutien de nos pays. Nous avons montré dans le passé que nous savions également sécuriser des campagnes export.

Avez-vous eu des annulations de commandes en 2021 ?
Non. Nous avons constaté en termes d'activité court terme que nos clients ont continué de voler. Au plus bas de la crise en 2020, notre activité a baissé de l'ordre de 20% en termes d'heures de vol. Et on voit là aussi la reprise même si l'activité reste encore en dessous de 2019, de l'ordre de 5% à 10%. Nous avons eu très peu d'annulations de commandes, moins que les années précédentes. Cela veut dire que par rapport aux commandes qu'ils ont passées, nos clients ont vraiment besoin de leurs hélicoptères, honorent leurs engagements et prennent livraison.

Quel est l'impact sur le chiffre d'affaires ?
Nous sommes dans un contexte où effectivement l'activité d'Airbus Helicopters résiste sur le court terme. Notre chiffre d'affaires est resté globalement stable en 2020, voire en légère hausse. Cette année devrait être sur la même dynamique. Le chiffre d'affaires d'Airbus Helicopters sera tiré en 2021 par le support et les services ainsi que les livraisons obtenues avant la crise. Notre chiffre d'affaires tiré par les activités de court terme en 2021 et 2022, continue donc de croître de manière sensible.

Sur les neuf premiers mois de l'année, vous augmentez de 30% l'Ebit. Avez-vous profité de la crise pour resserrer les boulons ?
Cela a toujours été ma vision : les crises proposent des opportunités sur le marché mondial et nous devons les saisir pour peu qu'on s'organise. Airbus Helicopters n'a fait que renforcer la dynamique prise ces trois ou quatre dernières années en travaillant sur sa compétitivité, sur son schéma industriel, sur ses coûts de production, mais également sur ses coûts fixes pour être capable d'être plus compétitifs et, donc, de saisir les opportunités à l'export. Avec succès puisque Airbus Helicopters avait entre 60% et 70% de parts de marché mondiales dans le domaine civil en 2020. J'espère bien qu'en 2021, nous allons être capables de confirmer cette dynamique. Le nerf de la guerre sur un marché difficile reste la compétitivité. Airbus Helicopters l'a bien compris et tout le monde joue le jeu. En période de crise, il faut aussi être capable de continuer à investir. En 2020, nous avons maintenu notre effort de R&D, nous ne l'avons pas diminué. Nous restons sur cette dynamique d'investissements sur notre gamme de produits civils et militaires avec la modernisation du Tigre au standard Mark 3, et le lancement du programme HIL. Ils vont être des opportunités de continuer à investir sur notre gamme militaire.

Etes-vous satisfait de là où vous avez amené Airbus Helicopters en termes de rentabilité et de compétitivité ?
Je considère que le niveau de rentabilité qu'avait l'entreprise ne lui permettait pas d'être résiliente dans des périodes difficiles. Le niveau de rentabilité vers lequel on s'oriente et la dynamique qu'on démontre en 2021, va aujourd'hui dans le bon sens. Il donne de la résilience à Airbus Helicopters. Mes convictions : travailler les coûts et la compétitivité tout en poursuivant les investissements. Et rentabilité égale robustesse. Je suis satisfait de la dynamique et de la tendance. Mais je considère que nous ne sommes pas encore là où nous devons être. Quand je regarde où sont nos compétiteurs, je considère qu'une société comme Airbus Helicopters doit être capable de viser les 10% d'Ebit. C'est l'objectif.

Le fameux Graal...
... 
Non ce n'est pas un Graal. C'est simplement un niveau qui doit offrir à la société le positionnement marché et lui donner de la robustesse et de la résilience. Je considère que nous sommes dans la bonne direction. Est-ce que nous sommes à l'objectif ? Non, mais nous allons dans la bonne direction.

Quand comptez-vous atteindre les 10% d'Ebit ? En 2022, en 2023 ?
Je pense qu'on est sur la bonne dynamique et la bonne direction. Il n'y a pas de raison de penser que sur le moyen terme, on ne l'atteindra pas.

Sur le Tigre Mark 3, la décision allemande de ne pas rejoindre la France et l'Espagne reste une déception. On a l'impression que la modernisation de l'appareil va être finalement dégradée par rapport à l'objectif initial. Quelle est votre vision ?
Il existe un vrai besoin d'augmentation des capacités opérationnelles et d'allongement de la durée de vie du Tigre. On sait qu'en Allemagne, il y a un certain nombre d'interrogations et clairement la proximité des élections fédérales, qui se tenaient en septembre, n'ont pas créé les conditions pour qu'elle puisse se joindre au Tigre Mark 3. L'équation pour la France et l'Espagne mais aussi pour Airbus Helicopters est aujourd'hui de trouver les conditions en termes de programme, de budgets et de calendrier, qui permettent, dans un format à deux pays, de répondre aux enjeux de ce programme de modernisation. Aujourd'hui, nous devons être en mesure de répondre à cette équation dans un périmètre à deux pays, tout en gardant la porte ouverte à l'Allemagne. Il faut qu'on garde l'objectif de rallier l'Allemagne au programme sur la première partie de l'année 2022. Le Tigre n'a pas d'équivalent, il n'y a pas d'autres appareils qui soient capables de répondre au combat dans la haute intensité. Je suis confiant sur le fait que l'Allemagne doit être capable de nous rejoindre mais nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre au-delà de mi-2022. Une fois que le nouveau gouvernement sera en place, il pourra conduire une analyse stratégique sur le programme et confirmer sa position sur le Tigre Mark 3. Le plus tôt sera le mieux.

N'y a-t-il pas de crainte que l'Espagne, qui doit financer en même temps plusieurs programmes onéreux (Eurodrone, SCAF, voire F-35 pour remplacer ses Harrier par le F-35), ne fasse faux bond ?
Aujourd'hui, tous les signaux montrent que l'Espagne est engagée et qu'elle souhaite créer les conditions de lancement du programme et signer le contrat d'ici la fin de l'année. Pour moi, c'est le scénario référent. Je suis confiant sur le fait que l'Espagne va confirmer avant la fin de l'année son engagement sur le programme. En Espagne, la décision d'acquisition du H135 a été prise par le conseil des ministres. Il ne reste qu'à formaliser le contrat.

L'Australie va arrêter le programme Tigre. Une réflexion a-t-elle déjà été entamée sur l'avenir de ces appareils? Est-ce qu'ils pourront encore servir ?
Ce n'est pas ma priorité à court terme. L'Australie a pris la décision de remplacer le Tigre par des hélicoptères Apache. Ils vont engager le renouvellement de la flotte à l'horizon 2025 mais cela prend un certain temps de remplacer les Tigre. Ma priorité est d'assurer la disponibilité des Tigre pour le client australien. Ils continuent de voler, ils continuent de démontrer tous les jours qu'ils satisfont les forces armées australiennes. Après, qui sait ?

Auront-ils encore de la capacité quand les Apache arriveront ?
Ce qui est clair, c'est que les hélicoptères australiens seront à un standard particulier, qui répond à certaines missions. Ces appareils ont une valeur opérationnelle. Donc, la question que vous posiez pourrait venir dans un deuxième temps, en fonction de la décision que prendront les Australiens. Ce sera leur décision de dire ce qu'ils veulent faire de leurs Tigre lorsqu'ils seront au bout du processus vers la fin de cette décennie. Et nous les accompagnerons.

Avez-vous toujours comme objectif de signer le contrat HIL en fin d'année également ?
C'est également l'objectif. C'est un de nos enjeux majeurs de l'année 2021 pour le ministère des Armées, les forces armées, la DGA, Airbus Helicopters et les partenaires industriels comme Thales et Safran. Nous sommes alignés sur la configuration, le périmètre technique et le schéma du support de l'appareil avec les forces armées. Les conditions sont négociées. Nous avons créé les conditions d'une convergence et toutes les conditions sont prêtes pour la signature du contrat. Ce sera un événement majeur à la fois pour les forces, par rapport à l'enjeu opérationnel, et pour Airbus Helicopters évidemment.

Quel sera le nombre d'exemplaires commandés dans la première tranche ?
Le besoin de renouvellement de différentes flottes d'hélicoptères des trois forces armées s'élève à plus de 160 hélicoptères. La première commande ferme inclura le développement et l'acquisition d'une première tranche de quelques dizaines d'appareils auxquels il faut ajouter l'acquisition par la gendarmerie de 10 hélicoptères dans le cadre du plan de relance de la France.

Sur la disponibilité des hélicoptères militaires en France mais aussi en Allemagne, estimez-vous être sur la bonne voie ou cela reste-t-il toujours compliqué ?
C'est une priorité. La tendance est vraiment positive concernant les enjeux de disponibilité des flottes d'hélicoptères en France, en particulier de celles, qui ont fait l'objet dans le cadre de la réforme du MCO, de contrats verticaux. C'est le cas des flottes Cougar et Caracal mais aussi du Tigre. On est passé en l'espace de trois ou quatre ans à des disponibilités sur les flottes Cougar et Caracal, qui était de l'ordre de 25% à 30%, à 45% environ. Sur le Tigre, la disponibilité est passée de 25% il y a quatre ans, à plus de 40% sur les derniers mois. Il y a une vraie dynamique. Cela reste fragile et difficile. Il faut continuer à travailler. Mais je considère que les contrats verticaux mis en place, le travail en étroite coopération entre la DMAé (Direction de la Maintenance Aéronautique, ndlr), les forces et toute l'industrie, sont la bonne réponse. A nous de continuer à transforme essai.

Il faudra transformer l'essai aussi sur le NH90 ?
Je ne cacherai pas que nous avons toujours des flottes sur lesquelles nous avons des enjeux lourds, en particulier les flottes qui font l'objet de retrofit. Par définition, ce sont des flottes qui font l'objet d'un prélèvement mécanique d'un certain nombre d'hélicoptères pour être mis au dernier standard. Ces flottes souffrent d'un vrai handicap sur certaines périodes. Et effectivement c'est le cas du NH90 Marine sur lequel nous avons de vrais enjeux de disponibilité. Nous avons un plan d'action autour de la charge de maintenance et des durées de visites et nous travaillons étroitement avec la Marine. Globalement, la disponibilité reste un travail au quotidien. Nous ne sommes pas encore à la cible que nous nous sommes fixés, mais il y a une vraie compréhension des enjeux partagés par tous les acteurs.

Quel est l'objectif de disponibilité ?
Je considère que nous devons être capables de fixer 50% de disponibilité sur les flottes. Il n'y a pas de raison de ne pas y arriver. Nous avons franchi un cap ces dernières années en travaillant de manière collaborative entre les forces, la DMAé, la DGA et l'industrie. Nous sommes tous dans la même équipe avec l'objectif de marquer le même but. Et ça, c'est la vraie dynamique de la réforme du MCO ces dernières années. On voit la tendance positive. On n'y est pas encore. Continuons sur cette dynamique.

Une question plus industrielle. Etes-vous satisfait de l'empreinte industrielle d'Airbus Helicopters alors que vous êtes implanté en Allemagne, en France et en Espagne mais aussi au Brésil, en Roumanie ? Est-ce que cette empreinte est rationnelle ?
Notre schéma industriel doit nous permettre d'assurer la compétitivité de la production des pièces et de l'assemblage des hélicoptères. Airbus Helicopters a majoritairement une base industrielle en Europe, en grande partie dans nos « Home countries » (France, Allemagne, Espagne). Nous avons rationalisé notre schéma industriel à travers la spécialisation des sites en faisant en sorte de ne pas produire à deux endroits différents les mêmes technologies et les mêmes pièces. Nous avons engagé ce processus il y a trois ans et nous arrivons quasiment au bout de cette rationalisation. Nous sommes à plus de 80% d'exécution. Le cœur industriel d'Airbus Helicopters est réparti entre Donauworth, Paris-Le Bourget, Marignane et Albacete. Ce schéma est rationalisé, compétitif et efficace.

Et l'internationalisation ?
Nous avons un enjeu de compétitivité. Nous avons donc un enjeu à pouvoir s'adosser à des pays que l'on appelle « best cost ». C'est le cas de la filiale que nous avons ouverte il y a quelques années au Mexique pour fabriquer des équipements composites, en particulier par rapport à notre activité des portes destinées à l'aviation commerciale. Ce site nous permet de sécuriser notre activité industrielle en Europe grâce à la compétitivité d'un certain nombre de composants fabriqués au Mexique. C'est ce qu'on va également faire en ouvrant une joint-venture en Hongrie.

Qu'allez-vous faire en Hongrie ?
Nous allons fabriquer des pièces mécaniques à la fois pour renforcer la compétitivité de notre schéma industriel « home countries » et pour sécuriser l'activité industrielle en France, en Allemagne, en Espagne. Cette usine va être capable de produire à partir de l'année prochaine les premières pièces. C'est le deuxième étage de la fusée. Enfin, troisième étage : comme nous adressons un marché mondial, un certain nombre de clients gouvernementaux, militaires peuvent exprimer des exigences de localisation d'un certain nombre d'activités dans leur pays. Nous devons être capables de répondre à ces demandes pour sécuriser nos positions commerciales. C'est ce qu'on a fait en Australie, au Brésil et aux Etats-Unis. Airbus Helicopters a cette capacité à offrir des partenariats et de l'activité industrielle dans ces pays (support, MRO, chaîne d'assemblage, fabrication de pièces). Nous allons continuer à le faire pour rester compétitif sur le plan commercial. Notre schéma industriel international fait sens et est clairement un schéma qui accompagne notre stratégie commerciale.

Après la perte de l'appel d'offres des hélicoptères d'entrainement de la Navy, quelle est l'ambition d'Airbus Helicopters aux Etats-Unis ?
Premièrement, nous sommes dans l'exécution du contrat Lakota. Puis je n'exclus pas que le H145 5 pales, qui vient de rentrer en service chez les National Guard, puisse apporter une capacité complémentaire en termes de charge utile, de puissance et de performances à l'US Army. Cet appareil de nouvelle génération répond à de nouvelles missions. Donc, je n'exclus pas qu'il y ait de nouvelles commandes aux Etats-Unis dans le futur. Il peut aussi bénéficier de perspectives de ventes FMS (Foreign military sales). Et puis, n'oublions pas que  le marché civil américain est le plus gros marché du monde. Outre le Lakota, nous fabriquons l'Écureuil aux Etats-Unis où nous avons une chaîne d'assemblage. Ce qui est un vrai atout stratégique. Nous allons poursuivre nos activités aux Etats-Unis : chaîne d'assemblage, customisation, réponse aux besoins spécifiques du marché américain.

En Inde, les campagnes sur lesquelles vous êtes en compétition ont-elles enfin avancé ?
Les décisions prennent du temps à se prendre en Inde mais il faut être capable de bâtir la confiance avec les clients indiens dans la durée. Il faut être capable de rester patient. En revanche, il y a des vrais enjeux de volumes et de partenariats. Je reste convaincu que le marché indien, en premier lieu le marché gouvernemental et militaire, est bien un marché stratégique pour Airbus Helicopters. Il faut également être capable de répondre à l'enjeu de la stratégie du « Make in India ». D'où effectivement nos partenariats avec Mahindra en particulier dans le cadre de la campagne du NUH (100 exemplaires pour la Marine) où nous proposons le Panther. Je n'attends pas de décision en 2021. Cette campagne peut durer encore quelques années.

Et le Caracal pour les Coast Guard ?
Le Caracal répond parfaitement au besoin des Indian Coast Guard. Nous estimons que nous sommes bien placés pour être sélectionné. A la différence du NUH, il y a un processus en cours avec des campagnes d'essais en vol prévues en 2022, sur lesquelles nous répondrons présents.

Parlons du futur. Quelle est votre vision pour le renouvellement du Tigre, du NH90 et de l'Ecureuil ?
L'Écureuil est un programme phare d'Airbus Helicopters. Il prend 70% de parts de marché. Il est bien positionné en termes de performances, de produits et de compétitivité. Nous sommes dans une logique d'upgrade, comme nous l'avons démontré avec la version à H125 Power qu'on a certifiée en 2020, pour maintenir la compétitivité de ce produit. C'est un appareil stratégique pour Airbus Helicopters parce qu'il représente l'entrée de gamme, la compétitivité et les volumes. Mais la question de son renouvellement ne se pose pas aujourd'hui.  C'est le marché qui décidera. Quand le marché sera décidé, je ne pourrais pas me permettre de rater ce moment. La préparation de briques technologiques pour un potentiel successeur de l'Écureuil fait partie de mes priorités.

Quelles sont les échéances pour le successeur du Tigre, le prochain hélicoptère de combat, qui est un équipement important pour la souveraineté de la France et de l'Europe ?
En termes de décision politique, il y a deux horizons. Il y a une décision qui est à prendre maintenant et une autre à prendre lorsque la question du besoin opérationnel d'unlancement de programme se posera. Quel est le contexte ? En Europe, en particulier en France, en Allemagne et en Espagne, il y a deux plateformes fantastiques qui sont le Tigre et le NH90, qui répondent aux enjeux opérationnels des forces armées. Mais nous devons pour étendre la durée de vie de ces deux programmes jusqu'à l'horizon 2050, réaliser cette opération majeure appelée le Mid-Life Upgrade. Pour le Tigre, nous sommes actuellement en train de lancer cette opération avec le Tigre Mark 3, qui pourra être opéré jusqu'à l'horizon 2045. Sur le NH90, la question va se poser de la même manière mais en décalé effectivement. A un horizon qui est plutôt autour de 2030/2035.

Comment préparez-vous le futur hélicoptère de combat européen alors que les Etats-Unis commencent à y travailler sérieusement ?
Il faut commencer aujourd'hui  à préparer ce qui pourrait être soit le remplacement, soit le complément des hélicoptères militaires type NH90, Tigre à un horizon 2045. Toutefois, il n'est pas question d'une décision-programme aujourd'hui sur le plan politique. Elle pourrait intervenir à un horizon de 10 à 15 ans. L'enjeu est d'être prêt technologiquement : nous avons identifié quelles sont les briques technologiques dont nous avons besoin pour ce futur hélicoptère militaire dans le domaine de l'autonomie, de la connectivité et de la grande vitesse. Il faut également pouvoir imaginer des concepts d'architecture et des plateformes différents. Tout ce travail se prépare. Nous en sommes à ce stade.

Mais les Européens veulent-ils un programme européen ?
C'est toute la question. Est-ce que les pays européens voudront une solution européenne lorsque la question se posera en 2035/2040 ? Est-ce qu'on veut avoir une alternative à une solution américaine ? Je pense que la réponse doit être positive dans le cadre de l'autonomie stratégique européenne et dans le cadre de la compétitivité de l'industrie européenne de défense et de la filière hélicoptère. L'Europe doit avoir une alternative européenne. Quels sont les enjeux ? Il faut aujourd'hui créer les conditions pour développer les briques technologiques. C'est tout l'enjeu du programme ENGRT (European Next Generation Rotorcraft Technologies) sélectionné parmi les priorités du Fonds européen de défense. La première réponse à cette question cruciale est positive : les pays européens ont répondu oui en disant qu'ils voulaient une solution européenne dans le domaine d'un futur programme militaire « Vertical lift ». La réponse des pays sous l'angle politique est très claire. Mais ce n'est pas suffisant...

... Pourquoi ?
Il faut que l'Europe soit également très présente dans les discussions au sein de l'OTAN dans le cadre du programme NGRC (Next-Generation Rotorcraft Capability) : un groupe de travail a été créé pour définir quels seront les besoins opérationnels dans ce domaine à l'horizon 2040. Aujourd'hui les pays européens ne sont pas assez présents. Résultat, le besoin va être exprimé par certains partenaires américains sur la base de celui qu'ils ont identifié. Est-ce que la grande vitesse est leur priorité à l'horizon 2045/2050 ? Je ne sais pas. Est-ce que cet appareil sera facilement maintenable, compétitif et fiable ? Beaucoup de questions se posent sans avoir de réponses aujourd'hui. Les pays européens doivent donc se coordonner pour exprimer des besoins opérationnels correspondant aux vrais besoins de leurs forces et non pas qu'ils soient calqués à un besoin par les Américains. Cette équation se joue donc à deux niveaux : au Fonds européen de défense au niveau industriel (préparation des briques technologiques) et à l'OTAN à travers le groupe de travail NGRC où les pays européens doivent revendiquer quels sont leurs besoins opérationnels.

Pourquoi ne le font-ils pas ?
Nous sommes au début de ce travail. Je pense qu'on n'est pas forcément aussi présent qu'on devrait l'être par rapport aux Américains en particulier, qui ont démarré plus tôt puisqu'ils ont lancé le programme FVL (Future Vertical Lift) il y a quelques années. Ils ont déjà effectué  ce travail sur leurs besoins opérationnels. Ils travaillent déjà sur les architectures. Mais je ne suis pas convaincu que leurs besoins opérationnels soient nécessairement celui qui doit être celui des pays européens. On le voit à travers le F-35. Évitons cet écueil et ce piège pour l'hélicoptère militaire de demain.

Les politiques européens sont-ils mobilisés sur cette problématique ?
Cette problématique est bien identifiée, notamment en France. Je pense que cet enjeu commence à être également bien identifié en Allemagne et en Espagne. Il faut par ailleurs que l'ensemble des acteurs, en particulier les pays partenaires du NH90, s'associent à cet enjeu. C'est un travail au quotidien et il n'est pas trop tard pour réagir. On est au tout début de l'histoire. C'est maintenant qu'il faut se mobiliser.

Pour finir sur l'Urban Air Mobility. Est-ce un vrai marché auquel il faut croire ?  
Le marché de la mobilité aérienne urbaine, que ce soit sous l'angle de la logistique ou du transport de passagers, est un vrai besoin de nos sociétés et une vraie opportunité pour notre industrie. On ne parle pas nécessairement de transport de masse mais de transport d'un certain profil de passagers entre les aéroports et le centre-ville par exemple. Mais ce besoin est réel. On le voit bien au Moyen Orient ou en Asie, notamment en Chine, dans les grandes métropoles. Il existe de vrais besoins de transport. Aujourd'hui, nous proposons une réponse à travers l'hélicoptère. Mais cet appareil a de vraies limites en raison d'un changement de paradigme de la société, qui souhaite le développement de transport urbain neutre en émissions carbone. Ce qui n'est pas le cas de l'hélicoptère même si on améliore la consommation et on diminue le bruit. Mais on reste sur des facteurs limitants. Pourquoi Airbus se positionne-t-il sur ce marché ? D'abord, Airbus a toujours été un des pionniers de l'aviation et ce marché répond à un enjeu de pionniers. Je considère que nous avons toutes les conditions pour y répondre : notre expérience dans les hélicoptères, dans la certification, dans la sécurité aérienne, notre background technique et notre esprit pionnier d'innovations. Nous devons être capables de faire partie des premiers qui apportent et qui créent les conditions d'ouverture du marché. Et puis, nous ne pouvons pas laisser passer cette perspective de marché, qui va se développer. Encore une fois, c'est un vrai marché avec un développement de business pour Airbus.

Quelles sont les conditions pour lancer un tel appareil ?
Il faut que ces appareils soient tout électriques et à bas bruit pour démarrer dans un environnement urbain. D'où l'enjeu d'architectures nouvelles. Le tout électrique apportera également un facteur d'échelle supplémentaire par rapport au bruit. Les architectures multi-rotors apporteront également cette dimension safety supplémentaire et cruciale pour les vols au-dessus des villes et des espaces publics. Aujourd'hui, les conditions ne sont pas encore totalement réunies parce que l'industrie n'a toujours pas fait la démonstration qu'elle possédait une réponse technologique fiable. Les réponses sont attendues en termes de performances, de conditions de bruit, de consommation, de certifiabilité et de sécurité. Nous devons être capables de répondre à toutes ces dimensions.

Airbus a semble-t-il toutes les capacités pour développer ce nouveau produit. Quelles sont les difficultés ?
Nous sommes capables de développer toutes les briques technologiques dans le cadre du développement de ce nouveau produit. D'autant que ces briques présenteront des éléments de synergie avec nos autres marchés, à commencer par l'hélicoptère mais pas seulement. Le développement des technologies liées à l'électrification et la connectivité sont des briques, qui apporteront à l'ensemble de la gamme produits Airbus. Donc quoi qu'il arrive, nous n'investissons pas à perte dans ces domaines. Où en est-on aujourd'hui ? City Airbus est très clairement un démonstrateur sur lequel nous voulions balayer un certain nombre de concepts : multi-rotors, tout électrique, vol autonome. Nous avons beaucoup appris à travers les campagnes d'essais qu'on a effectuées depuis 2018 avec Vahana d'abord, puis avec CityAirbus en 2019/2020. Nous avons estimé qu'il était temps de rentrer dans une nouvelle phase avec CityAirbus NextGen. Nous estimons que cet appareil - architecture et aérodynamisme - est proche de celui qui pourra entrer sur le marché. City Airbus NextGen est un prototype, ce n'est plus un démonstrateur. Nous avons envoyé un message fort au marché avec CityAirbus NextGen : nous sommes sur un appareil capable d'entrer sur un nouveau marché.

Qu'est-ce qu'il reste encore à faire ?
Nous devons encore démontrer des briques technologiques en termes de système de propulsion électrique, de flight control, d'accompagnement du vol et de formules aérodynamiques. Nous voulons également démontrer que cet appareil est certifiable. C'est pour moi, un élément clé. N'oublions pas que c'est un marché sur lequel aujourd'hui le référentiel de certification n'existe pas. Nous travaillons  avec les autorités de certification, l'EASA en particulier, pour créer les conditions de certification. Nous voulons que CityAirbus NextGen réponde à cet enjeu de certification avec pour objectif d'être capable de rentrer en service progressivement à partir de 2025. A cet horizon, nous devons être capables de démarrer des opérations à petite échelle pour apprendre et être capables de lancer dans un deuxième temps un programme à plus grande échelle.

On ne verra donc pas les athlètes des JO de Paris arrivés en CityAirbus NextGen autonome de l'aéroport Charles-de-Gaulle ?
J'aimerais bien mais il faut rester réaliste. On parle de sécurité. Au départ des opérations, CityAirbus NextGen sera piloté. Moi, j'aime bien rêver. C'est notre rôle de faire rêver mais sur des bases réalistes. On parle de sécurité. Prétendre qu'en 2024, on saura transporter en taxi volant des athlètes ne me paraît pas réaliste.

Faut-il considérer ce nouveau produit comme le futur successeur de l'hélicoptère ?
C'est un marché qui, pour moi, est parfaitement complémentaire du marché de l'hélicoptère. L'hélicoptère est un appareil extraordinaire, qui est utilisé tout temps, toute mission avec une versatilité incroyable. Pour l' « Urban Air Mobility », on évoque une centaine de nœuds nautiques pour la distance pour un transport de quatre à cinq passagers. On est typiquement sur des missions qui répondent à un environnement urbain. Cet appareil ne répond pas à l'ensemble des missions des hélicoptères. Il est donc très complémentaire. Nous estimons que cette opportunité s'inscrit parfaitement dans notre stratégie.

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Commentaires 9
à écrit le 10/01/2022 à 12:54
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Bizarre quand c'était l'aérospatiale qui fabriquait les hélicoptères c'était les meilleurs au monde...

à écrit le 30/11/2021 à 21:08
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Ce n'est qu'une façon normale de faire du business .Nous nous avons une façon bisounours de faire du business avec plein de règles et de principes avec beaucoup de bureaucratie ,face à des requins élevés à la gagne sans loi , assoiffés de frics ,on n...

à écrit le 30/11/2021 à 18:08
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Airbus a un vrais problème de fiabilité.... Inacceptable pour des hélicoptères militaire.

à écrit le 30/11/2021 à 10:30
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Comment Airbus a-t-il pu fabriquer de telles bouses que Tigre et le NH90, avec des taux de disponibilité à dissuader toutes les armées du monde, sauf la française qui n'a pas le choix des armes. Cela va lui coûter très très cher alors qu'au contrai...

le 30/11/2021 à 12:02
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Ce ne sont pas des bouzes mais ils sont trop fragiles et trop sensibles à la maintenance. L'explication est simple leut conception n'a pas pris en compte ce facteur mais est basée sur des normes civiles, ou la maintenance représente beaucoup beaucoup...

à écrit le 30/11/2021 à 9:47
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Plutôt que de pointer l’agressivité des US je préfère souligner la faiblesse de l'UE, qu'il est doux de se faire coloniser. Franchement, la Chine et la Russie se marrent..

à écrit le 30/11/2021 à 9:04
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Biden fait la même politique globale que Trump , de l'américanisme primaire : il n'arrive pas a vendre le 787 de Boeing donc font AUKUS avec le RU et l'Australie. Macron va en Arabie Saoudite et aux Emirats Arabes Unis pour le Rafale : oui il faut ab...

le 30/11/2021 à 9:40
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" L'Europe doit être indépendante politiquement, économiquement et électroniquement ( processeur)." Ca fait comme le gars qui se fait lointainement distancer et qui crie "hé ho attendez- moi !" Alors que personne n'attend hein, c'est une course, déjà...

à écrit le 30/11/2021 à 8:44
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Ce n'est pas nouveau, l'agressivité commerciale des Etats Unis existe depuis la création des Etats Unis parce que c'est leur façon d'être, c'est leur histoire.

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