On savait la PME Photonis, qui est en passe d'être vendue par le fonds Ardian à un groupe américain Teledyne, stratégique pour les forces armées françaises. On savait moins qu'elle est également importante pour l'industrie de la santé. Photonis fournit "des composants essentiels" aux industriels et aux laboratoires, qui proposent des tests et des analyses pour le Covid-19, selon un communiqué de la PME, dont le siège social est implanté à Bordeaux. La technologie des MCP (galette de microcanaux) de Photonis permet une très forte augmentation de l'efficacité des détecteurs. Une vente à l'étranger aurait un effet désastreux après les nombreux discours sur la souveraineté d'Emmanuel Macron, notamment dans le cadre de la reconquête de la souveraineté sanitaire et industrielle de la France. Une décision sur l'avenir de Photonis doit être prise avant la fin de la semaine prochaine.
"Le mécanisme de planification et d'organisation et l'initiative de relocalisation sont les premiers axes de cette stratégie française de reconquête de notre pleine souveraineté sanitaire et industrielle", avait expliqué le 16 juin le président de la République sur le site de Sanofi Pasteur à Marcy-l'Étoile.
Le 14 juillet, Emmanuel Macron avait d'ailleurs confirmé que la France, via un plan de relance massif sur des secteurs d'avenir, devra "bâtir" une "souveraineté industrielle et donc faire relocaliser certaines industries". Ce qui tombe bien puisque Photonis est encore une société ayant des actionnaires français.
Une cession sous condition
Par ailleurs, les parlementaires de tous bords ne désarment pas pour un maintien d'un actionnariat français de Photonis. Ainsi le sénateur Alain Cazabonne (Union Centriste) a interpellé le 22 juillet le ministre de l'Économie Bruno Le Maire pour qu'il exige un tour de table français, voire européen. C'est le ministre délégué, chargé des comptes publics, Olivier Dussopt, qui lui a répondu en lui indiquant que "nous avons une décision à prendre ; elle est en cours d'instruction de manière extrêmement méticuleuse". "Nous avons un objectif, a-t-il assuré : la défense des intérêts de la France et de sa défense nationale, en donnant à Photonis un actionnariat stable, serein et qui lui permette de développer ses investissements et son activité".
Toutefois, Olivier Dussopt a laissé la porte entrouverte à une cession Photonis à Teledyne sous condition. "Si nous devions autoriser l'opération, nous le ferions en faisant jouer toutes les prérogatives de l'État : les prérogatives de droit, qui peuvent imposer au repreneur le maintien d'activités sensibles sur le territoire national, mais aussi des prérogatives susceptibles de nous amener à imposer au repreneur des modifications substantielles dans la gouvernance qu'il entrevoit, notamment en matière d'accès à l'information d'éventuels actionnaires étrangers, ou encore de maintien sur le territoire d'activités sensibles".
"Nous devons absolument éviter deux risques : le premier serait la cession à un investisseur étranger capable d'un transfert technologique rapide ou du transfert d'informations sensibles ne pouvant être portées à la connaissance de non-nationaux ; le second serait d'entériner une acquisition par un actionnaire qui ne serait pas assez solide pour permettre à Photonis de rester à la frontière technologique et de garder sa compétitivité", a-t-il expliqué.
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