Si, si le groupe émirien EDIC s'offre la PME centenaire française Manurhin

La chambre commerciale du tribunal de grande instance de Mulhouse a confié la reprise du fabricant de machines de munitions Manurhin, au groupe de défense des Emirats Arabes Unis EDIC.
Michel Cabirol
Le tribunal de Mulhouse s'est prononcé avec pragmatisme en faveur du projet financier le plus solide pour Manurhin, a estimé le président du directoire de Manurhin Rémy Thannberger,
"Le tribunal de Mulhouse s'est prononcé avec pragmatisme en faveur du projet financier le plus solide pour Manurhin", a estimé le président du directoire de Manurhin Rémy Thannberger, (Crédits : Manurhin)

Manurhin, ne m'appelez plus jamais France. C'était écrit. Et depuis trop longtemps. Le fabricant de machines de munitions "Made in France" passe donc sous pavillon émirien avec les félicitations du ministre de l'Economie. Pourtant partisan d'une Europe de la défense forte, Bruno Le Maire n'a cette fois-ci en rien facilité le rapprochement avec le belge New Lachaussee en vue de créer un leader mondial européen. Pas plus qu'il n'a aidé les deux PME tricolores - le groupe familial Odyssée Technologies et la PME grenobloise ECM Technologies -, intéressées par les performances commerciales de Manurhin, qui exporte 100% de sa production.

La chambre commerciale du tribunal de grande instance de Mulhouse (Haut-Rhin) a décidé d'un "plan de cession au profit de la société EDIC avec une prise d'effet à (mercredi)", a indiqué le greffe.

Entre les discours sur l'industrialisation de la France et la réalité, il y a visiblement un décalage, notamment pour les PME. Ainsi, un certain nombre de banques n'ont pas voulu suivre ECM Technologies dans cet investissement en raison de la production de Manurhin (armement). Et dire qu'il y a peu de temps encore la puissance publique détenait 43% de Manurhin : Giat-Industries (21,5% du capital) et Bpifrance (21,5%). Un gâchis qui profite à EDIC (Emirates Defense Industries Company) et à une vieille connaissance de la France, Luc Vigneron, qui a flairé la bonne affaire. Et ce d'autant qu'il est en charge de développer une industrie de la défense aux Emirats Arabes Unis (EAU). Un joli coup pour l'ancien patron de Thales et un comble pour la France. Car elle "a laissé partir à l'étranger cette entreprise", a regretté le président du directoire de Manurhin Rémy Thannberger.

Comment EDIC a mis la main sur Manurhin

"Le tribunal de Mulhouse, qui connaît l'unique cause de nos difficultés, s'est prononcé avec pragmatisme en faveur du projet financier le plus solide pour Manurhin", a estimé dans un communiqué le président du directoire de Manurhin Rémy Thannberger, beau joueur. Luc Vigneron était d'ailleurs récemment venu se faire une idée pendant 48 heures du potentiel de Manurhin. Il a alors acquis la conviction que cette PME devait être reprise par EDIC.

Ainsi, l'offre de reprise du groupe émirien, soutenu par le très puissant fonds Mubadala, prévoit de conserver 104 salariés sur les 145 que comptait l'entreprise au moment de la mise en redressement judiciaire. En outre, EDIC va apporter 10 millions d'euros en capital et va rajouter 25 millions en compte courant, ce qui va soulager la trésorerie de Manurhin en souffrance. Soutenu par les autorités des EAU, partenaire stratégique de la France au Moyen Orient, EDIC produit déjà des munitions, des armes légères et des blindés. Avec Manurhin, il va détenir la totalité de la filière.

"Edic reprend l'intégralité de notre carnet de commandes et le fait que plus des deux tiers des effectifs soient conservés à Mulhouse montre que nous avons su préserver le savoir-faire de l'entreprise, et surtout le transmettre à une nouvelle génération de collaborateurs prometteurs", a expliqué Rémy Thannberger. Toutefois, il a regretté que "la France ne croit plus en son industrie".

Les banques aux abonnés absents

La direction de Manurhin explique les difficultés du fabricant par l'impossibilité à financer ses commandes à l'export en ayant accès au crédit bancaire. La PME ne pouvait plus  "depuis des mois, obtenir des banques françaises privées ou publiques, le moindre euro de crédit, et ce en dépit d'un historique bénéficiaire en 2013, 2014 et 2015", avait-elle expliqué en juin 2017 dans un communiqué. En conséquence, le chiffre d'affaires a chuté à 12,1 millions d'euros en 2017, soit moins de la moitié de 2016, alors que son carnet de commandes s'établit à 100 millions d'euros. La perte nette 2017 avait atteint 16,7 millions d'euros. Ce qui devait arriver, est arrivé avec la mise en redressement judiciaire et la reprise de la PME mulhousienne par un groupe étranger.

Pourtant l'ancien ministre de la Défense de François Hollande, Jean-Yves Le Drian, actuellement au Quai d'Orsay, avait eu la volonté de créer une filière de munitions de petit calibre "Made in France" à laquelle devait participer Manurhin. Ce projet, qui aurait pu être les prémices d'une solution pour Manurhin, a finalement été abandonné en rase campagne par la nouvelle équipe au pouvoir. Un vrai gâchis à la française.

Michel Cabirol

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Commentaires 18
à écrit le 07/08/2018 à 22:14
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Les émirats unis Ons compris que la vrais capacite dè defence vient par le fait de fabriquer s'est armes et munition.... Maintenant cette entreprise passe sous pavillon étranger... Rien de bien surprenant , notre pays par mesure d'économie équipe nos...

à écrit le 03/08/2018 à 23:35
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la France n'est plus dirigée, elle est administrée par des technocrates qui ne comprennent rien à l'industrie, aux années d'efforts qu'il faut pour sortir un produit, ils bradent au lieu de sauver, font table rase il ne restera plus rien.

à écrit le 03/08/2018 à 10:22
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Les politiques aiment bien détruire le tissus industriel français. Nos énarques sont fortiches, ils ont ruiné l'ex CGE(Alcatel) , Général des eaux(vivendi), Alstom, Thomson( technicolor) l'acier avec Arcelor etc.... Maintenant Manurhin. Finalement o...

le 03/08/2018 à 14:14
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Au lieu de raconter n'importe quoi., dites nous combien d'actions avez vous acquis. Dites nous comment vous participez à la réappropriation de l'industrie Française. Certainement en investissant dans l'immobilier ou à la caisse d'épargne. Les boites ...

à écrit le 03/08/2018 à 9:14
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Entierement d'accord. J'attends les prochaines élections. ..pour ne plus avoir des godillots...mais des personnes qui aiment les Français et la France

à écrit le 03/08/2018 à 0:06
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Lamentable. Encore un coup dans le dos des Français par ce gouvernement aux ordres du chef de benalla. On ne gardera rien du capital de la France? A force de brader nos bijoux de famille. Lamentable

à écrit le 02/08/2018 à 22:10
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C'est de l'ideologie néoliberale.... Le marché décide de tout... Doctrine Macronienne à l'oeuvre... Après avoir sacrifié Alstom, Manurhin, c'est peu de chose !

le 03/08/2018 à 8:49
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"C'est de l'ideologie néoliberale.... Le marché décide de tout..." Non, vous ne comprenez rien mais n'hésitez pas à venir nous le dire. SI c'était le marché qui décidait de tout ce serait du libéralisme, la finance associée au pouvoir étatiqu...

à écrit le 02/08/2018 à 19:59
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Les banques ne sont pas là pour perdre de l argent et ont encore la liberté de choisir leur investissements. Je doute que l industrie (y compris militaire) soit l avenir de la France. Nous n avons ni les écoles, ni les moyens, ni l appétit de former ...

le 03/08/2018 à 10:50
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Commentaire dur, mais réaliste. Les anciens empires ne sont plus rien, ainsi va le monde.

à écrit le 02/08/2018 à 17:41
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Rien de nouveau en France, On n'aime pas les entrepreneurs ni les actionnaires, On leur préfère des élus incompétents et démagos.

le 02/08/2018 à 17:51
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Tout est dit.

à écrit le 02/08/2018 à 17:15
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"Ainsi, l'offre de reprise du groupe émirien, soutenu par le très puissant fonds Mubadala, prévoit de conserver 104 salariés sur les 145". Et hop, 41 salariés sur le carreau pour remplir les poches de ce Luc Vigneron.Encore un baby-boomer CSP+ (6...

à écrit le 02/08/2018 à 16:04
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35 millions..... remettre au pot pour accompagner une boîte dans sa croissance, parceque c est de cela qu il s' agit......la France de Macron n' aime ni l industrie ni les usines.....il y a les belles paroles et la réalité....et la réalité est catast...

à écrit le 02/08/2018 à 11:48
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Il semblerait que tout a été fait pour couler la boite, en empêchant une production qui semblait rentable. Pourquoi les banque n'ont elles pas prêté d'argent à Manurhin? L'article en dit trop peu sur la rentabilité des commandes qui n'ont pas pu être...

à écrit le 02/08/2018 à 9:52
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Je n ai pas compris, Manurhin déménage de France ou elle a seulement un nouvel actionnaire ?? (sic) M.Caribol la CdM est fini, vous pouvez ranger votre drapeau.

à écrit le 02/08/2018 à 9:06
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Quelle honte... Quand est-ce que ça s'arrête svp ? C'est quand les élections !?

le 04/08/2018 à 21:38
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Au lieu d'être blasé, vous feriez mieux de mettre vos économies dans l'industrie par le biais des achats d'actions.Cela permettrait aux Français d'être propriétaire de leurs entreprises et donc d'être maître de leur devenir. Votre commentaire sinon ...

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