« Fast fashion » : les pays de l'UE veulent interdire la destruction de vêtements invendus

Une position adoptée ce lundi par le Conseil de l'Union européenne fixe de nouvelles exigences dans la conception des produits pour limiter leur impact sur l'environnement, les rendre plus fiables, réutilisables et réparables. A travers ce texte, l'UE désire faciliter le recyclage des vêtements neufs invendus.
Le texte présenté par la Commission européenne en mars 2022 fixe de nouvelles exigences dans la conception des produits (Photo d'illustration).

Limiter les effets délétères, notamment, de la « fast fashion », ce segment de l'industrie de la mode fondé sur le renouvellement rapide des collections, afin d'encourager à la consommation. Les Etats membres de l'UE souhaitent interdire la destruction des vêtements neufs invendus, dans le cadre d'une nouvelle réglementation.

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Dans les faits, une position a été adoptée ce lundi 22 mai par le Conseil de l'UE, instance représentant les 27 pays membres, au sujet d'un projet de règlement sur l'écoconception qui concerne tous les produits consommés dans l'UE, y compris les appareils électroniques.

Le texte présenté par la Commission européenne en mars 2022 fixe de nouvelles exigences dans la conception des produits. Objectif affiché, limiter l'impact de ces derniers sur l'environnement, les rendre plus fiables, réutilisables et réparables, mais aussi plus faciles à recycler et plus efficaces en matière de ressources consommées.

Les petites et micro-entreprises exonérées

Le Conseil a affirmé dans un communiqué « renforcer l'ambition de cette législation », en y ajoutant l'interdiction de détruire des textiles, chaussures et vêtements invendus. Il s'agit de « réduire l'impact environnemental de vêtements et accessoires qui sont produits mais jamais utilisés », a-t-il précisé.

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Les petites et micro-entreprises en seraient toutefois exonérées. En outre, les entreprises moyennes bénéficieraient d'une exemption durant une période de transition de quatre ans leur laissant le temps de s'adapter. Les pays membres de l'UE souhaitent exclure les automobiles du champ d'application du futur règlement sur l'écoconception, estimant que des législations spécifiques s'appliquent déjà au secteur.

L'alimentation et les produits médicaux ne sont pas concernés, car réglementés par ailleurs. Le texte doit encore être négocié avec le Parlement européen qui doit adopter sa propre position dans les prochaines semaines. La proposition de la Commission introduit par ailleurs pour les vêtements, comme pour une vaste gamme de produits de consommation, un « passeport numérique » sous la forme d'un QR code.

La fast fashion sous le feu des critiques

Celui-ci permettra aux consommateurs de connaître l'incidence de leurs achats sur l'environnement. Il apportera aussi des informations sur la traçabilité et les matériaux utilisés qui faciliteront la réparation et le recyclage. L'UE souhaite agir sur la conception des produits, estimant qu'elle détermine jusqu'à 80% de leur impact environnemental.

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Le marché de la fast fashion est confronté à des difficultés croissantes ces derniers mois. La chaîne britannique de vente en ligne de vêtements Boohoo a dévoilé des revenus en baisse à la mi-mai et une perte annuelle (87 millions d'euros) qui s'est lourdement creusée, des chiffres malgré tout meilleurs qu'attendu. Son chiffre d'affaires a reculé de 11% sur un an, à 1,8 milliard de livres (2,07 milliards d'euros).

La rentabilité a été impactée par la baisse des ventes, l'inflation des coûts de fret et de logistique, de main-d'œuvre et de l'énergie, mais aussi par des « investissements stratégiques en cours (...) dont le groupe bénéficiera à moyen terme », avait expliqué Boohoo dans un communiqué.

« Boohoo travaille sur le marché hautement concurrentiel » sur le terrain de la « fast-fashion », avait analysé Victoria Scholar, analyste de Interactive Investor. « Les budgets des ménages serrés dans un contexte d'inflation signifient que les clients ont moins de revenu disponible à dépenser pour des articles de mode non essentiels », selon elle.

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Les marques de fast fashion souffrent également d'une image dégradée. Accusé de travail forcé, de plagiat, d'incitation à la surconsommation, le colosse chinois du prêt-à-porter à prix cassés SheIn, jusqu'ici peu disert, a défendu début mai dans un entretien accordé à l'AFP son modèle commercial, devenu la cible d'ONG et des autorités publiques.

SheIn tente de redorer son blason

Fondé en 2008 en Chine et basé à Singapour, Shein a rapidement conquis le marché mondial. En 2021, ses ventes ont bondi de 60%, propulsant son chiffre d'affaires à 16 milliards de dollars, selon Bloomberg, talonnant ainsi le suédois H&M. Et Shein, qui emploie actuellement 11.000 personnes à travers le monde, ne compte pas s'arrêter là.

Le développement de la société s'appuie sur des équipes locales étoffées mais aussi la construction d'un entrepôt de 40.000 m2 en Pologne. Autre axe important de développement : la création d'une place de marché Shein. Or, produire toujours plus, c'est justement ce que leur reprochent associations et autorités publiques qui dénoncent ou tentent de contenir l'expansion du géant chinois.

« Nous sommes des fabricants à la demande », avait rétorqué Peter Pernot-Day, « capables de (la) mesurer très finement », ce qui permet de réduire de manière « drastique » les invendus et donc la production de déchets. Plateforme de seconde main aux Etats-Unis, laboratoire de recherche de nouvelles matières, intégration de matière recyclée, Shein fait des efforts. Mais interrogé sur le manque d'informations disponibles en ligne pour les consommateurs sur ces vêtements faits à partir de matière recyclée, Peter Pernot-Day avoue que « la question est pertinente » et qu'il la fera « remonter aux équipes ».

Comment être sûr, alors, que Shein se plie aux réglementations en matière de traçabilité ? Le responsable explique que Shein « est très connecté, technologiquement parlant » avec ses fournisseurs. Shein indique avoir transmis la liste des substances interdites à ces derniers (la marque a déjà été épinglée par la Répression des fraudes française à ce sujet), avoir réalisé jusqu'à 300.000 tests chimiques en 2023 et utiliser les services d'Oritain, une société d'analyse de produits avec laquelle travaille également le gouvernement américain.

(Avec AFP)

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