Alors que la prise de conscience des ravages de l'obésité s'intensifie, les grands du « food business » n'échappent plus aux pressions en faveur d'une nutrition équilibrée. Le plus gros coup de semonce a été donné le mois dernier par de puissants actionnaires institutionnels de Nestlé, le numéro un mondial du secteur (95 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2023).
Plusieurs fonds d'investissement ont en effet mis à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale du groupe, le 18 avril, une résolution demandant la diminution de la proportion des produits mauvais pour la santé dans les ventes. Avec ses glaces, confiseries et autres barres chocolatées, le fabricant de Crunch, KitKat ou Smarties avait reconnu dès 2021 détenir trop de catégories aux antipodes des recommandations nutritionnelles établies par les organisations de santé publique.
La chasse au gras
Mais pour ces investisseurs, soumis de façon croissante à des consignes strictes en matière de responsabilité sociale et environnementale, la composition actuelle du portefeuille de la multinationale de Vevey (Suisse) représente un risque « réputationnel » et réglementaire important. D'où cette exigence inédite d'expurger plus rapidement du catalogue les produits les plus gras et/ou sucrés. Nestlé avait indiqué de son propre chef, l'an dernier, vouloir une hausse de 50 % des ventes de produits plus « nutritifs » d'ici à 2030. Mais cette déclaration est jugée à la fois imprécise et insuffisante par les signataires, qui souhaiteraient que le groupe opère un virage bien plus drastique, dans des délais plus courts.
ShareAction, une ONG spécialisée dans les combats pour l'environnement et la santé, coordonne plusieurs initiatives similaires dans l'agroalimentaire, y compris chez Kraft Heinz et Unilever. Pour les fonds qu'elle conseille, les conséquences d'une mauvaise alimentation - hausse des dépenses de santé et chute de la productivité - affectent l'ensemble des secteurs économiques. Si Nestlé regimbe pour l'instant face à cette injonction, certains concurrents se montrent plus réceptifs. Comme le français Danone, l'un des premiers à avoir modifié son portefeuille pour privilégier les produits sains.
Unilever, lui, vient d'annoncer la scission de sa division de crèmes glacées (Magnum, Ben & Jerry's, Carte d'Or ou Cornetto). Une décision en partie justifiée par une baisse des ventes en 2023 et la rationalisation de ses activités, entre hygiène et alimentaire. Mais pour plusieurs experts, l'aspect nutritionnel a sans doute pesé.
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