Un groupe de pression américain, l'UANI, appelle General Motors et son nouvel allié français PSA à mettre fin aux activités de Peugeot en Iran, pays suspecté de vouloir se doter de l'arme atomique. Le lobby United Against Nuclear Iran estime que l'arrivée du groupe de Detroit au capital du français (7%) devait faire l'objet d'une enquête, pour déterminer si ce dernier enfreint les sanctions américaines sur l'Iran. En effet, Peugeot est... le numéro un automobile historique sur le marché local.
Gel de l'activité
Mais PSA n'a pas attendu son alliance avec GM, paraphée fin février, pour geler ses livraisons de composants à son licencié local Iran Khodro! "Devant le durcissement des sanctions vis-à-vis de l'Iran, PSA a décidé en février de geler son activité", explique un porte-parole du groupe. Ces sanctions entraînent en effet une interdiction des transactions avec des banques iraniennes. Du coup, PSA ne peut plus financer ses fournitures de pièces ni bénéficier de garanties de paiement. En conséquence, le programme de livraisons a été suspendu pour les mois de mars puis d'avril, entraînant... le chômage technique de 350 personnes au centre d'expéditions de PSA à Vesoul (Vosges). Et le "gel devrait se poursuivre", précise PSA. L'alliance nouée avec GM "n'a joué aucun rôle sur cette décision. Le sujet avait été évoqué par GM lors de nos discussions, mais nous les avions immédiatement rassurés sur ce point", poursuit le constructeur tricolore.
Après la Paykann, la 405
L'Iran a toujours été un pays compliqué pour PSA. Et pour cause. La vieille Peugeot 504 du président Ahmadinejad a beau avoir été vendue aux enchères 1,8 millions d'euros l'an dernier, PSA préfère rester discret sur ses activités locales, aléas politiques obligent. Pourtant, le pays représente traditionnellement le deuxième débouché (en nombre de voitures) pour le constructeur, derrière la France. La marque Peugeot avait écoulé 467.000 en 2010 et 457.000 en 2011 - mais elle visait initalement la barre des 500.000 l'an dernier. Peugeot s'octroie grosso modo 30% du marché local.
Héritage de Chrysler UK
La firme au lion a en fait hérité des anciens accords passés entre la branche britannique de Chrysler et le groupe local iran Khodro, du temps du Shah. C'est en reprenant les activités de Chrysler Europe en 1978 que la firme française a trouvé dans la corbeille les fournitures de pièces pour le modèle Hillmann Hunter des années 60, un véhicule créé par le groupe britannique Rootes devenu entretemps Chrysler UK. La Hunter a été fabriquée sous licence par Iran Kodro sous le nom de Paykann depuis les années soixante-dix jusqu'à très récemment.
Cette voiture, omniprésente dans le pays, a même été considérée pendant des décennnies comme la voiture nationale iranienne. Peugeot y a progressivement ajouté sa 405 (de 1985), qui a petit à petit remplacé la Paykann dans le rôle de berline bonne à tout faire en Iran, puis sa 206, notamment dans une version spécifique à quatre portes et coffre séparé. La 405, restylée, est disponible dans de multiples versions.
Pas d'implication capitalistique
Le constructeur français n'est pas impliqué capitalistiquement, ni industriellement, dans ses activités iraniennes. Il se contente de livrer des composants pour une fabrication sous licence, près de Téhéran. La 405 est intégrée localement à presque 100% et la 206 à 60-80% selon les versions, d'après Peugeot. Cela explique, malgré des volumes très importants, que le chiffre d'affaires généré soit assez faible (autour de 1,5 à 2% du chiffre d'affaires hors taxes de PSA). Peugeot dispose d'une petite équipée dédiée, d'une quinzaine de personnes environ, pour s'occuper des multiples et complexes démarches administratives.
Pas question de quitter l'Iran
PSA n'a pas toutefois l'intention de quitter l'Iran a priori. Car, fort d'une si longue présence, il est un acteur incontournable, fortement ancré dans le paysage... au-delà des vicissitudes politiques. Et, si la firme française se retirait, sous le coup des exigences de certains moralistes hypocrites, elle risquerait d'être vite évincée et remplacée par des firmes japonaises, coréennes ou chinoises, moins scrupuleuses.
Renault très présent
La France a très tôt participé à l'éclosion d'une industrie automobile iranienne avec la fabrication locale dès les années 70 des Citroën Dyane et Renault 5. Renault est d'ailleurs fortement implanté en Iran aujourd'hui. La firme au losange fournit ainsi des composants à Iran Kohodro mais aussi à son concurrent Pars Khodro. Les deux groupes locaux fabriquent en effet la Dacia Logan, rebatisée Renault Tondar, et la Renault Mégane. Les ventes du constructeur au losange sur place ont doublé l'an dernier à 93.578 unités (83. 243 Logan et 10.335 Mégane II). Elles restaient cependant loin de celles de Peugeot.
Sujets les + commentés