
L'Union européenne l'a confirmé en mars, seules les voitures ou voiturettes de moins de 3,5 tonnes n'émettant pas de gaz à effet de serre à l'échappement pourront être vendues à partir de 2035 sur son territoire. Cela signifie que seule l'électrique pourra être vendue hors carburants de synthèses fabriqués à partir d'électricité décarbonée, qui sont en réalité trop chers à produire. Une mesure forte, qui a fait grincer des dents les constructeurs automobiles européens ainsi que de nombreux automobilistes.
Les autorités européennes prévoient 30 millions de voitures électriques en circulation pour 2030. Mais entre peur du manque d'autonomie, doute sur la valeur ajoutée environnementale et pénurie d'énergie, les mythes autour du véhicules électriques sont légions.
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La voiture électrique ne pollue pas
C'est l'une des raisons vantée par l'Union européenne et maintes fois répétée par les constructeurs désormais : la voiture électrique ne pollue pas. Dans les faits, la voiture électrique émet des gaz à effet de serre, principalement au moment de sa fabrication puisqu'il faut extraire les métaux nécessaires à la batterie et réaliser une série de procédés chimiques polluants. Cependant, son empreinte carbone est tout de même plus faible que son équivalent thermique dans la majorité des cas. En effet, il faut rouler en moyenne 30.000 kilomètres, soit un à deux ans généralement, pour compenser ce déficit carbone initial de production.
Un avantage à la voiture électrique même dans les pays où le mix énergétique pour la production électrique est moins bon, comme en Chine, en Australie ou encore en Pologne. Seuls vingt pays, selon Carbone 4, présentent un désavantage pour la voiture électrique comparé au même modèle thermique. A noter que plus la voiture est lourde et grosse comme les SUV, plus son empreinte carbone est élevée au départ, du fait, notamment, d'une plus grande quantité de métaux à extraire pour la batterie. Il faudra donc rouler plus longtemps afin de compenser ce déficit, jusqu'à 100.000 kilomètres pour les plus gros modèles.
Globalement, il n'y a que dans les cas où la voiture électrique sert très peu, que vous la détruisez avant un an d'utilisation et que vous habitez en Inde, dans certains pays d'Afrique, à Cuba ou au Moyen-Orient qu'elle émettra plus que son équivalent thermique.
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Il n'y aura pas suffisamment de métaux
Les batteries des voitures électriques utilisées dans la majorité des véhicules sont pour l'instant des batteries lithium-ion de type nickel-manganèse-cobalt (NMC) et nécessitent en moyenne l'extraction initiale de 21 tonnes de minerais qui doivent par la suite être raffinés. Un chiffre qui varie selon la taille de la batterie ainsi que la technologie utilisée. Dans les métaux utilisés, la notion de « métaux rares » est souvent employée. Elle est inexacte, il faudrait plutôt parler de « métaux stratégiques ». Car en réalité, le cobalt ou le lithium par exemple, ne sont pas rares mais sont très concentrés dans certaines régions du globe. Selon l'Agence internationale de l'énergie, la demande en lithium pourraient encore être multipliée par sept d'ici à 2030 et il en faudra 35 fois plus en Europe en 2050 par rapport à 2022.
Afin de ne pas se retrouver à court de métaux, l'Europe a annoncé plusieurs projets miniers en particulier en France où les projets d'Eramet, de Lithium de France et de Viridian en Alsace ainsi qu'Imerys dans l'Allier font promettre des capacités d'extraction et de raffinage de lithium totales de 18.000 tonnes.
Insuffisant selon le Boston consulting group (BCG). L'offre de lithium « devrait être inférieure d'environ 4 % à la demande projetée en 2030 et de 24% en 2035 », soit respectivement de 100.000 tonnes et 1,1 million de tonnes. Afin d'éviter les pénuries, les constructeurs signent des contrats avec des mines sur plusieurs années mais le recyclage sera d'une importance capitale pour éviter les pénuries. A ce sujet, l'Union européenne demande d'incorporer des taux recyclés de 16% de cobalt, 85% de plomb ainsi que 6% de lithium et de nickel avant 2031. Aussi, 70% du poids des batteries devra être recyclé à cette même date.
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La Chine a le monopole de la chaîne de la valeur
Ces extractions de métaux soulèvent une autre problématique : la question de la souveraineté. Car si les véhicules thermiques entrainent une dépendance vis à vis des pays détenant du pétrole, les métaux nécessaires pour les batteries sont concentrés dans certains pays. Ainsi, les mines de lithium sont concentrées principalement en Australie ou au Chili, le cobalt en République démocratique du Congo (RDC) et le cuivre au Chili. Quant au raffinage de ces métaux, près de 90% des usines se situent en Chine ce qui en fait une situation de quasi monopole.
La relocalisation des mines en Europe, pour l'instant à l'étape de projets dans de nombreux pays, permettrait d'une part de se défaire de cette dépendance mais aussi de mieux maîtriser l'exploitation de ces mines, d'un point de vue environnemental mais aussi éthique. En effet, sur de nombreux sites d'extraction, en particulier en Afrique, les conditions de travail sont très opaques. En Europe, l'ensemble des projets devraient couvrir 40 % des métaux raffinés nécessaires aux batteries à horizon 2030.
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La recharge est difficile et chère
L'une des peurs de la voiture électrique reste les problèmes d'autonomie. En effet, les premières voitures électriques comme la Renault Zoe affichaient une autonomie de 160 kilomètres. Aujourd'hui, elle oscille entre 300 et parfois plus de 600 kilomètres. Des distances rarement effectuées dans la réalité puisqu'en moyenne, un Français parcourt 8,7 kilomètres par jour.
Afin de diminuer ce frein, l'Etat a promis de développer davantage les bornes de recharge. Résultat : la barre des 100.000 bornes a été dépassée cette année. Mais leur répartition reste inégale. Si toutes les autoroutes sont équipées de bornes rapides, les réseaux secondaires sont beaucoup moins fournis. Or, dans certaines villes, la recharge à domicile reste compliquée pour des raisons d'emplacement.
Reste que le déplacement est différent entre un véhicule électrique et thermique même si les constructeurs martèlent l'inverse. Sur les longues distances, il faut prévoir une pause dans la recharge d'une heure à deux heures pour un trajet entre 300 et 500 kilomètres quand il faut seulement 10 minutes pour faire un plein d'essence. Le prix de la recharge est, lui aussi, soumis à diverses informations erronées. Selon l'association Transport et environnement (T&E), le coût d'un trajet de 100 km avec une voiture électrique s'élevait en moyenne à 4 euros entre avril et septembre 2022. Sur la même période, le même trajet en véhicule essence coûte 11,5 euros, soit quasiment le triple. En revanche, charger son véhicule sur l'autoroute dans les stations rapides coûtera plus cher, jusqu'à 13 euros pour 100 km.
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Il n'y aura pas suffisamment d'électricité pour tout le monde
Si le parc automobile électrique augmente, la demande en électricité va également croître. Dans son livre intitulé Voitures : fake or not ?, le chercheur Aurélien Bigo estime que la consommation actuelle des voitures électriques est de moins de 0,4 % en 2022. En 2050, si toutes les voitures sont électriques en France, alors il faudrait 100 TWh supplémentaires pour répondre à la demande, soit 20 % de a consommation actuelle d'électricité. Mais ce chiffre dépendra en réalité des horaires de recharge des véhicules.
C'est pourquoi de plus en plus de constructeurs développent des recharges bidirectionnelles qui permettent à la fois de charger le véhicule mais aussi de réinjecter l'énergie dans le réseau lors des heures de pointe lorsque le véhicule est à l'arrêt. Ce pilotage qui permettrait le stockage de l'électricité ponctuellement pourrait absorber une grande partie de la consommation supplémentaire nécessaire au développement des voitures électriques.
Des investissements pour développer la production d'électricité seront néanmoins nécessaires sur le long terme afin d'éviter des risques de pénurie ou de dépendance forte à d'autres pays.
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