Elles ne décolèrent pas. Les dix principales fédérations professionnelles de l'immobilier viennent de pousser un énième coup de gueule contre la politique gouvernementale du logement. Quinze jours après la nomination de Gabriel Attal à Matignon, la Fédération française du bâtiment (FFB), son pôle Habitat, l'Union sociale pour l'habitat (USH), la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), les promoteurs immobiliers (FPI), la fédération Procivis, l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis), les notaires employeurs (UNNE), les architectes (UNSFA) et les économistes de la construction (UNTEC) ont interpellé, ce 24 janvier, le Premier ministre et le président de la République. Leur principal reproche: le manque de considération de l'exécutif pour les Français qui peinent à se loger, dans l'ancien comme dans le neuf, dans le social comme dans le privé.
Un« appel de la dernière chance »
Figure de proue, Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment, n'a toujours pas digéré la petite phrase « Il faut sevrer l'immobilier de la drogue fiscale ». Prononcée par Patrice Vergriete, (ex-?) ministre du Logement, la sentence est qualifiée de « dangereuse » par le professionnel. « Il ne faut pas attendre la loi de finances de 2025, sinon nous aurons des conséquences négatives en 2025, 2026 et 2027 », a encore tonné Olivier Salleron, qui redoute la suppression de 150.000 emplois dans sa branche.
Plus politique encore, l'ancienne ministre du Logement de François Hollande, Emmanuelle Cosse a lancé un « appel de la dernière chance » et jugé « vital » d'avoir des réactions « au plus haut sommet de l'Etat ». A la tête de l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui fédère les bailleurs sociaux, l'écologiste a dénoncé « un renoncement moral et politique de la puissance publique ». Comme annoncé avant et pendant le congrès HLM, le logement social est en panne: 2,6 millions de ménages sont en attente d'un habitat. C'est 7,5% de plus qu'en 2022...
Deux propositions sur la table
Ce n'est guère mieux du côté des agents immobiliers qui sont en première ligne pour constater la baisse de pouvoir d'achat des ménages. Le président de la FNAIM propose donc de réactiver la portabilité et la transférabilité des prêts. « C'est une solution pragmatique qui ne coûte rien à l'Etat et peu aux banques », a argué Loïc Cantin. Il propose également de créer un nouveau dispositif fiscal baptisé « acheter aujourd'hui, défiscaliser demain ». Sur un prêt de 20 ans, le ménage pourrait supporter son prêt pendant dix ans, puis être exonéré d'impôt sur les revenus locatifs les dix ans restants, voire même les quinze années suivantes s'il achète dans le neuf ou s'il rénove.
Deux dispositifs qui intéressent évidemment le président des promoteurs immobiliers. Pascal Boulanger rêve même d'une aide aux maires bâtisseurs qui construisent plus qu'un seuil défini par la loi. Une idée qui risque d'être retoquée par le pouvoir politique actuel. Juste avant les conclusions du Conseil national de la refondation dédié au Logement en juin dernier, l'ancien ministre Olivier Klein avait évoqué cette piste devant l'Assemblée nationale, mais avant d'être remplacé par Patrice Vergriete, il avait de lui-même fermé la porte à cette idée pour relancer la machine au niveau local.
Une « vraie faute »
A cet égard, le président du pôle Habitat de la Fédération française du bâtiment, spécialisé dans la construction de maisons individuelles, pense avoir trouvé la solution: « Mon prêt premier logement » pour aider tous les primo-accédants à la propriété. Le recentrage du prêt à taux zéro (PTZ) sur l'immobilier collectif en zone tendue, c'est-à-dire où l'offre de logement est inférieure à la demande, ne fait évidemment pas ses affaires. Aussi s'élève contre « une métropolisation, un verdissement et une verticalisation du PTZ qui sont un contre-sens ».
« Exclure 93% du territoire français est une vraie faute. On exclut les classes moyennes de leur parcours résidentiel », a abondé Yannick Borde, président du réseau Procivis, bailleur social, constructeur et promoteur, mais aussi maire (Horizons) de Saint-Berthevin (Mayenne).
La simplification, un vœu pieu ?
La présidente de l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis) appelle, elle, à « simplifier » la rénovation dans les copropriétés. Cela tombe bien: le rare moment de sa conférence de presse où le chef de l'Etat a parlé - et pour la première fois - de la crise du logement, c'était en lien avec la simplification.
Sans attendre ce texte en Conseil des ministres, l'Assemblée nationale examine déjà, en ce moment même, un projet de loi relatif à l'habitat indigne et aux copropriétés dégradées, mais de l'aveu même de l'un des rapporteurs Renaissance, la simplification des règles de vote en assemblée générale n'a pas été intégrée... contrairement à ce qui avait été annoncé en février 2023 par le gouvernement Borne.
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