Relocalisation de l'industrie : la Bretagne prépare un programme de 2 ans pour convaincre acheteurs et fournisseurs

L’agence économique Bretagne Développement Innovation (BDI) a organisé, fin juin à Douarnenez, les premiers « Rendez-vous de la relocalisation ». Prémisse d’un plan plus large qui sera présenté au Forum économique breton en septembre, cette rencontre visait à sensibiliser les décideurs et à mettre en relation fournisseurs et acheteurs, afin de créer des chaînes d’approvisionnement plus vertueuses en Bretagne. Plusieurs entreprises pilotes comme l’entreprise de sérigraphie Publigraphic et la PME Marinelec ont témoigné de leur expérience.
Frédéric Guemas, gérant de Publigraphic à Pont l'Abbé et Viviane Barrais, responsable achats de Marinelec à Quimper ont témoigné de leur politique de relocalisation des achats lors du premier Rendez-vous de la relocalisation qui s'est tenu fin juin à Douarnenez. Au niveau régional, cette démarche est poussée par Loïc Hénaff, patron de la société agro-alimentaire Hénaff et conseiller régional en charge de la relocalisation et du fret.
Frédéric Guemas, gérant de Publigraphic à Pont l'Abbé et Viviane Barrais, responsable achats de Marinelec à Quimper ont témoigné de leur politique de relocalisation des achats lors du premier "Rendez-vous de la relocalisation" qui s'est tenu fin juin à Douarnenez. Au niveau régional, cette démarche est poussée par Loïc Hénaff, patron de la société agro-alimentaire Hénaff et conseiller régional en charge de la relocalisation et du fret. (Crédits : Région Bretagne)

Relocalisation et réindustrialisation: à l'heure de la quête de souveraineté et de la transition environnementale, ces deux préoccupations sont devenues majeures pour les territoires. En Bretagne, ces questions, et les solutions à mettre en oeuvre, sont déjà prises en compte et seront encore largement débattues début septembre au prochain Forum économique Breton à Saint-Malo.

Deux ans après l'étude Reloc, publiée par le réseau Produit en Bretagne avec le Medef au printemps 2021 sur le potentiel de relocalisation industriel breton, et la mise en place d'une expérimentation avec dix entreprises pilotes, la Région Bretagne y dévoilera un plan d'action et de plus grande ampleur de deux ans.

L'annonce a été formulée lors du premier « Rendez-vous de la relocalisation », organisé le 28 juin par Bretagne Developpement Innovation, l'antenne économique du Conseil régional. Cette rencontre avait pour but d'inciter et aider les entreprises et les collectivités bretonnes à acheter local, au lieu de commander en Chine ce qui peut être fabriqué à Marseille, Quimper, Lorient ou Brest.

Décarbonation, emploi, défense du modèle social

« La relocalisation est plus que jamais d'actualité pour créer ou préserver des emplois locaux directs ou indirects, réduire la pollution due au transport, sécuriser les approvisionnements et tout simplement décarboner la production » fait valoir le Conseil régional.

Première région de France en termes d'achats locaux par les consommateurs,  la collectivité a voté en décembre dernier un objectif de 75% d'achats publics sur son territoire d'ici à la fin 2025.

Cette démarche de relocalisation des achats a été lancée en septembre 2022 par Loïc Hénaff, conseiller régional en charge de la relocalisation et du fret, au dernier Forum Economique Breton. Elle est menée en partenariat avec les organisations professionnelles (Medef, UIMM, ABEA, FFB...) et fait suite à l'étude Reloc que le patron de l'entreprise agro-alimentaire du même nom avait lui-même présentée lorsqu'il était président du réseau Produit en Bretagne.

 « Un objectif important du projet est la sensibilisation des décideurs économiques » explique Loïc Hénaff. « Nous croyons que les achats des entreprises peuvent être un puissant outil des transitions pour répondre aux enjeux de la Bretagne : souveraineté, décarbonation, emploi, défense de notre modèle social », assure-t-il.

Des mâts en composite 100% made in Bretagne

Afin de tester des idées, une première expérimentation de relocalisation des achats engage déjà une dizaine d'entreprises pilotes dont certaines ont témoigné à Douarnenez.

La mise en place de cet accompagnement leur a permis de cartographier leur chaîne d'approvisionnement et d'en évaluer les impacts environnementaux et sociétaux, d'identifier les produits ou services à sourcer ou à relocaliser en France, d'élaborer un plan d'action.

À Pont-l'Abbé, Publigraphic, petite entreprise spécialisée dans la sérigraphie et l'impression numérique vient d'investir 350.000 euros dans une machine fabriquée en Europe, et pourtant deux fois moins chère à l'achat en Asie.

« Nous n'avons pas regardé uniquement l'aspect industriel de la machine, mais vraiment sa globalité, sa productivité, ses résultats, son ergonomie, sa consommation d'énergie, ses rejets dans l'atmosphère, ses consommables » a indiqué Frédéric Guemas, son directeur général à Douarnenez. « Nous nous rendons compte que la machine nous apporte énormément. Elle consomme cinq fois moins d'énergie que la précédente, son ergonomie fatigue moins les équipes et elle sera mieux rentabilisée. »

Engagée depuis longtemps, la PME quimpéroise Marinelec Technologies, spécialiste de la sécurité dans le domaine maritime a, de son côté, rappelé que 45% de ses achats étaient réalisés en France, 45% en Europe et le reste au-delà. 90% de ses sous-traitants sont également installés dans un rayon de moins de 350 kilomètres autour de la Cornouaille, 76% à moins de 290 kilomètres.

« La proximité est une condition pour correspondre à la norme et aux contrôles inhérents. Sur le plan économique, ce n'est pas plus cher car nous commandons de petits volumes répartis sur une gamme de références élargie et nous économisons les coûts de transport » analyse Viviane Barrais, responsable des achats de Marinelec.

À Guidel (Morbihan), Nautix surfe aussi sur la vague de la relocalisation. Ce spécialiste de l'équipement nautique a bénéficié d'un accompagnement de la Région Bretagne pour relocaliser la fabrication de mâts de planches à voile en composite, fabriqués depuis plus de 10 ans en Asie.

L'entreprise s'est associée avec la PME finistérienne Fiiish à Guipavas, l'université de Bretagne Sud et l'Institut régional des matériaux avancés (IRMA) à Lorient. Cette coopération aboutira à la fin de l'année à la fabrication de mâts en composite haut de gamme 100% made in Bretagne.

Des zones de relocalisation en Bretagne - Grand Ouest et en France

Il y a deux ans, l'étude Reloc avait identifié un potentiel de développement économique de 132.000 emplois, soutenables et participant aux transitions, dont 62.000 emplois au titre de la relocalisation industrielle sur l'ensemble de la Bretagne historique (Loire-Atlantique comprise) pour un chiffre d'affaires de 5,3 milliards d'euros.

Fin juin, la Chambre de commerce et d'industrie métropolitaine Bretagne Ouest (CCIMBO) et le Centre national des acheteurs (CNA), ont dévoilé les résultats d'une enquête menée cette année en Finistère sur les tendances des achats locaux.

Il apparaît que les deux tiers des 28 entreprises ayant répondu disent avoir été confrontées à des pénuries critiques. La moitié pense que les crises actuelles, la recherche d'impact environnemental et d'une qualité meilleure, vont pousser à réorienter les achats. Les zones de relocalisation étant en priorité situées en Bretagne - Grand Ouest, puis dans le reste de la France.

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