Cette semaine, Bali est venue s'ajouter à la longue liste des destinations qui prennent des mesures pour lutter contre les impacts négatifs du tourisme. Depuis mercredi dernier, l'île indonésienne impose aux visiteurs étrangers une taxe d'environ 10 euros pour « protéger la culture et l'environnement ». Un choix qui ne devrait pas être un repoussoir pour les Français. Selon une étude réalisée par OpinionWay pour l'agence de voyages Evaneos, les Français ont déjà commencé à adopter de nouvelles habitudes de voyage pour lutter contre le surtourisme. Une notion dont l'appréciation di ère selon les sensibilités mais que Didier Arino, directeur général de la société de conseil Protourisme, résume ainsi : un afflux de visiteurs tel que « le milieu n'est plus capable de se régénérer ou que les populations locales ont le sentiment de ne plus pouvoir correctement se loger et se déplacer ».
Venise, Florence, les calanques, Bréhat, même combat
Ainsi, selon l'étude, 52 % des Français se disent favorables à la mise en place de quotas de touristes sur les sites jugés surpeuplés. C'est d'ailleurs le choix fait pour la calanque de Sugiton, à proximité de Marseille. Mais aussi, depuis l'été 2023, par l'île bretonne de Bréhat, qui s'était fixé une jauge maximale de 4 700 visiteurs par jour du 14 juillet au 25 août. L'arrêté a été reconduit cette année, la mairie se félicitant d'avoir « accueilli quasiment le même nombre de visiteurs qu'en 2022, mais mieux répartis d'avril à fi n septembre ». De tels quotas sont souvent l'étape précédant la fermeture des sites trop fréquentés quand s'approche le point de non-retour. Une mesure certes radicale - mais souvent temporaire - qui a prouvé son efficacité notamment en Thaïlande pour la plage de Maya Bay. Venise, de son côté, bannit depuis 2021 les grands paquebots de son centre historique. Les bateaux, désormais, stationnent à bonne distance. Pour éviter cette extrémité, d'autres villes italiennes cherchent à orienter les touristes vers des lieux moins fréquentés. C'est le cas de Florence, qui a récemment lancé une campagne de promotion d'autres points d'intérêt touristique situés aux alentours.
Autre moyen de ne pas contribuer au surtourisme : partir en vacances vers des destinations ou des lieux moins fréquentés. 83 % des Français y sont prêts. Comme choisir « l'Albanie plutôt que la Grèce, la Corée du Sud plutôt que le Japon » ou privilégier des périodes moins fréquentées, par exemple « la saison des pluies pour visiter les parcs nationaux en Tanzanie plutôt que la saison sèche », explique Laurent de Chorivit, coprésident de l'agence Evaneos, qui invite les entreprises du tourisme à faire de telles recommandations. Dans la même veine, plus de six Français sur dix sont prêts à limiter leur nombre de voyages par an. Pour autant, cette sensibilisation cache un paradoxe : les Français ne sont que 23 % à s'estimer « en partie responsables » des conséquences d'une surfréquentation sur l'écosystème. En France, par exemple, 60 offices de tourisme bretons distribuent désormais une « charte du voyageur » qui décline douze bonnes pratiques pour protéger le patrimoine, sur un ton qui se veut ferme : « On ramasse ses déchets parce que c'est pas la mer à boire. »
« Un immense travail de sensibilisation reste à faire »
« Un immense travail de sensibilisation reste à faire », poursuit de son côté Laurent de Chorivit, qui met en exergue ce paradoxe : « 92 % des sondés ont identifié des situations de surtourisme, mais seuls 41 % estiment les avoir subies, ce qui traduit une forme de normalisation, voire d'acceptation du phénomène. » Néanmoins, cette étude révèle qu'une tendance au « slow tourism » se dessine, puisque 72 % des Français se disent prêts à voyager hors des sentiers battus. « 90 % du territoire français souffre du sous-tourisme », souligne Didier Arino. Avec près de 75 millions de visiteurs étrangers en 2022, il existe forcément une solution pour mieux répartir les flux, à défaut de s'engager vers une décroissance de ce poids lourd de l'économie mondiale. Une option qui ne semble être à l'agenda de personne - surtout pas des touristes. En témoigne le trafic aérien mondial, qui est presque revenu à son niveau d'avant la crise sanitaire.
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