Avec l’explosion des coûts, Sunak abandonne la LGV Birmingham-Manchester : 41 milliards d'euros économisés

Le Premier ministre britannique a annoncé l'abandon d'une partie du projet de ligne de train grande vitesse baptisée HS2. Le budget de cette infrastructure, qui visait à désenclaver le nord du Royaume-Unis, s'est envolé en dix ans, accusant un surcoût de 60 milliards de livres. Face à la colère des élus locaux, Rishi Sunak a promis que sa « priorité » serait d'assurer de « meilleures liaisons de transport » dans cette zone du pays.
La HS2 (pour High Speed 2) devait à l'origine relier la capitale britannique à Birmingham puis à Manchester et Leeds. Elle s'arrêtera donc finalement après Birmingham.
La HS2 (pour High Speed 2) devait à l'origine relier la capitale britannique à Birmingham puis à Manchester et Leeds. Elle s'arrêtera donc finalement après Birmingham. (Crédits : DR)

Le couperet est tombé ce mercredi 4 octobre : le Premier ministre britannique a confirmé l'abandon de la portion, entre Brimingham et Manchester, de la deuxième ligne à grande vitesse du pays. « J'annule le reste du projet HS2 », a déclaré Rishi Sunak lors d'un discours au congrès annuel du parti conservateur, qui se tient justement à Manchester, au nord de l'Angleterre.

« À sa place nous réinvestirons chaque penny, 36 milliards de livres (ndlr : 41 milliards d'euros), dans des centaines de nouveaux projets de transports », a-t-il lancé sous des applaudissements nourris de la salle, contrastant avec la colère des élus locaux.

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La HS2 (pour High Speed 2), projet de deuxième ligne à grande vitesse au Royaume-Uni après celle empruntée par l'Eurostar vers le tunnel sous la Manche (HS1), devait à l'origine relier la capitale britannique à Birmingham puis à Manchester et Leeds. Elle s'arrêtera donc finalement après Birmingham. Pour rappel, les travaux ont commencé en avril 2020 et les premiers trains devraient s'élancer entre 2029 et 2033.

Explosion des coûts de 60 milliards de livres

Pour justifier sa décision, le Premier ministre a affirmé qu' « HS2 est l'exemple ultime du vieux consensus ». « Le résultat est un projet dont le coût a plus que doublé et a souffert de retards répétés », a-t-il ajouté.

Initialement évalué à 37,5 milliards de livres en 2013, le projet ferroviaire est désormais estimé à près de 100 milliards de livres (115 milliards d'euros). Soit une hausse des coûts de 60 milliards de livres en 10 ans (71,68 milliards d'euros). Cela en fait « l'un des projets ferroviaires les plus chers du monde » au kilomètre, comme l'expliquait fin septembre à l'AFP Sam Dumitriu, responsable des politiques pour l'association pour la croissance économique Britain Remade, qui a comparé des projets d'infrastructure dans quatorze pays.

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À titre d'exemple, la facture pour réaliser les 215 kilomètres de voies du premier tronçon, entre Londres et Birmingham, s'élèvera à 247 millions de livres (284 millions d'euros) par kilomètre. C'est ainsi plus de huit fois plus cher que la LGV Tours-Bordeaux, entrée en service en 2017. En cause notamment, selon Sam Dumitriu, la prise en compte des griefs des riverains ou aux défenseurs de l'environnement dans tous les projets d'infrastructure, qui se traduit, dans le cas de la HS2, par une multiplication des tronçons en tunnels, plus coûteux.

Promesses d'alternatives

Pour faire des économies, Downing Street avait déjà supprimé en novembre 2021 le tronçon qui devait relier Birmingham à Leeds, puis annoncé en mars que la ligne n'irait pas, dans un premier temps, jusqu'à la gare de Euston, dans le centre de Londres, mais s'arrêterait dans la banlieue ouest de la capitale. Rishi Sunak a changé d'avis sur ce point ce mercredi : la HS2 ira bien jusqu'au centre de Londres, mais elle n'ira finalement pas à Manchester - même si les trains à grande vitesse pourront toujours atteindre la ville du nord à vitesse réduite depuis Birmingham.

« Ce dont nous avons vraiment besoin, c'est de meilleures liaisons de transport dans le nord » et cela « sera notre priorité », a martelé Rishi Sunak.

Le Premier ministre a notamment confirmé qu'il comptait doper un projet ferroviaire déjà dans les tuyaux pour améliorer les connexions entre les principaux centres économiques du Nord, qui réduira les temps de trajets entre Manchester, Bradford, Sheffield ou Hull, sur des lignes électrifiées. Le Premier ministre a aussi énuméré une longue liste de projets de transports urbains, bus ou trams et de connexions routières, améliorés.

Les investissements concernent essentiellement le nord de l'Angleterre, mais aussi d'autres régions du pays. Douze milliards de livres supplémentaires seront consacrés à des liaisons rapides entre Liverpool et Manchester, a encore annoncé Downing Street ce mercredi.

Les élus locaux ne décolèrent pas

Cette décision ne fait pas l'unanimité. Les revirements de Londres sont en effet très mal perçus par les élus du nord de l'Angleterre, qui accusent le gouvernement de renier ses promesses envers des régions plus défavorisées économiquement. « Ils sont sur le point de faire une gaffe politique incroyable », avait averti déjà mardi Andy Street, le maire conservateur des West Midlands, région de Birmingham, agitant au passage des menaces de démission.

« Tous les députés travaillistes du Nord s'aligneront demain pour dire: "Les Tories sont venus à Manchester pour rouler le Nord" ». Le maire travailliste de Manchester, Andy Burnham, a de son côté pesté déclaré ce mercredi sur la BBC : « Je ne vois pas comment le parti conservateur peut se regarder dans le miroir ».

La question, symbole des promesses de rééquilibrage au profit des régions défavorisées du Nord de l'Angleterre, est d'autant plus délicate que le basculement à droite de ces terres traditionnellement travaillistes, avait joué un rôle clé dans le triomphe historique des conservateurs sous Boris Johnson en 2019.

(Avec AFP)

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