Microsoft, Snap, eBay, Google, PayPal... Ces dernières semaines, les entreprises de la tech ont annoncé des licenciements en série. Dernière en date ? Cisco, qui supprime 5% de ses 85 000 postes. L'entreprise est pourtant rentable. Ses bénéfices s'élevaient à 2,6 milliards de dollars au dernier trimestre en 2023. Ils sont toutefois en baisse de 5%, par rapport à la même période un an auparavant. Chuck Robbins, PDG de Cisco, présente ces suppressions d'emplois comme un moyen « d'aligner les investissements avec des opportunités de croissance futures ».
Depuis plus d'un an, les vagues de licenciements sont devenues une norme dans le secteur. En 2023, 1.191 entreprises se sont séparées de 262.735 personnes, rapporte le site Layoff.fyi, qui recense les licenciements depuis 2020. En ce début d'année, 154 entreprises ont licencié 39.496 personnes en 2024. Mais les chiffres restent moins importants que ceux annoncés lors de l'hécatombe de 2023.
Tout va bien, mais on licencie quand même
Pourtant, ces entreprises affichent, pour la plupart, de bons résultats. C'est le cas en particulier de Microsoft, dont on ne peut pas vraiment dire qu'elle soit en difficulté avec un revenu record de 62 milliards de dollars (57,6 milliards d'euros) au dernier trimestre 2023. Le géant a pourtant annoncé en début d'année le licenciement de 1.900 personnes chez Activision Blizzard (dont l'acquisition a récemment été finalisée) et Xbox. Mais en parallèle, l'entreprise planifie des investissements, notamment dans l'intelligence artificielle générative.
Pour justifier ces départs, les entreprises ont abandonné le refrain de l'an passé - « le climat macroéconomique n'est pas favorable » ou encore « c'est l'effet rebond suite aux embauches trop optimistes post Covid » - à une nouvelle rengaine. A savoir : se restructurer et réallouer les ressources pour embrasser la vague de l'intelligence artificielle.
Des suppressions qui touchent les fonctions d'encadrement
« Ces suppressions concernent surtout des fonctions d'encadrement, commercial, marketing..., note Stéphane Distinguin, associé et fondateur d'EY Fabernovel. Ce sont des fonctions dont on peut imaginer qu'elles pourraient être automatisées par l'IA. Ces entreprises ont d'ailleurs intérêt à faire-valoir les gains de productivité permis par l'intelligence artificielle puisque c'est aussi ce qu'elles vendent. Mais c'est surtout parce qu'il parait légitime de remettre en question ces fonctions lorsqu'on se réorganise.»
Il estime que le secteur arrive à la fin d'un cycle et le début d'un nouveau. Des coupes dans les fonctions support pour plus d'efficacité : c'est notamment la justification de Snap, qui a dernièrement supprimé 500 postes pour réduire les niveaux hiérarchiques.
Une guerre de talent moins féroce
Stéphane Distinguin note par ailleurs un changement sur le marché de l'emploi. « Pendant très longtemps, les Gafam accumulaient le plus de talents qu'ils pouvaient. Ils recrutaient en masse pour éviter que des profils intéressants travaillent ailleurs. Ils ne sont plus désormais dans cette guerre des talents, sauf peut-être pour les profils experts en intelligence artificielle »
Dans les colonnes d'Axios, Tigran Sloyan, co-fondateur de la plateforme CodeSignal, spécialiste des compétences techniques, explique que les entreprises réorientent leurs ressources pour dépenser davantage dans le recrutement d'ingénieurs ayant des compétences très recherchées. Selon un rapport de CompTIA, 10 % des annonces publiées dans le secteur de la tech sont pour des postes nécessitant des compétences en intelligence artificielle.
Par ailleurs, les Gafam comme les autres entreprises de la tech procèdent à ses suppressions pour plaire aux investisseurs, observent différents analystes. Ces entreprises sont rentables, mais ont pour objectif de l'être encore plus. Meta et Apple ont récemment annoncé qu'ils distribuaient des dividendes. Ce qu'ils n'avaient pas l'habitude de faire jusqu'alors. Cette pression à la rentabilité concerne par ailleurs l'ensemble du secteur de la tech, y compris les startups.
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