
Le système de systèmes MGCS (Main Ground Combat System) enclenche enfin la marche avant. Pour le système de combat terrestre du futur, ce qui s'est passé sur la base aérienne d'Evreux est à la fois un petit et un grand pas. Ainsi, la signature jeudi par le chef d'état-major de l'armée de Terre le général Pierre Schill et son homologue allemand du document de haut niveau HLCORD (High Level Common Operational Requirements Document), l'équivalent d'une fiche d'expression de besoins, est une percée indéniable après des mois et des mois d'incertitudes sur ce projet franco-allemand. Ce document fixe les « exigences opérationnelles communes » des deux armées pour ce programme, a expliqué le ministre des Armées, Sébastien Lecornu.
Un petit pas car cette percée demande encore à être confirmée. D'autant que le programme en est encore à ses balbutiements sept ans après son lancement en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel. Ainsi, ce document a « une vertu stratégique, il vient commencer à préfigurer de ce que va être le cahier des charges », a expliqué Sébastien Lecornu. « Cette étape va permettre le travail, jusqu'à fin décembre » de définition des différents piliers de blocs technologiques à développer et la responsabilité de chaque État, a expliqué de son côté le ministre de la Défense allemand Boris Pistorius, qui espère signer un contrat en 2024 avec les industriels. Selon le ministre des Armées français, le programme MGCS devrait être opérationnel à l'horizon 2040/2045 - soit « un calendrier souple et réaliste » - alors que l'armée de terre souhaite un premier système en service avant 2040.
Reprise en main politique
Un grand pas aussi parce que Sébastien Lecornu et son homologue allemand ont décidé d'une reprise en main de ce programme sur le plan politique comme le demandait d'ailleurs dans une interview accordée à La Tribune le directeur général de KNDS, Frank Haun, qui estimait que « bon nombre des frictions qui en découlent pourraient être surmontées par un leadership politique rigoureux ». C'est le message qu'a fait passer jeudi sur la base aérienne d'Évreux Sébastien Lecornu, qui a regretté la politisation des programmes de défense à l'approche des élections européennes :
« La réalité c'est que ce sont les deux États, qui sont porteurs du projet sur le terrain politique et diplomatique mais ce sont aussi les deux États qui seront les clients, les acheteurs pour nos propres armées de ce nouveau char ». Le programme reste sous leadership allemand et la charge de travail est répartie à 50/50 entre la France et l'Allemagne. Sébastien Lecornu .
Les industriels, notamment Rheinmetall, n'ont qu'à bien se tenir, les États ont décidé de piloter à nouveau ce programme qui était au bord du gouffre. « Un peu de lest a pu s'installer et, pour le coup, avec Boris (Pistorius, ndlr), on a décidé d'en tirer les conclusions » en prenant de façon plus ferme le manche du programme MGCS et en imposant comme référentiel celui du SCAF avec ses piliers. C'est à la direction générale de l'armement (DGA) et à son homologue allemand, le Bundesamt für Wehrtechnik und Beschaffung (BWB) de « veiller aux intérêts des deux États clients », a insisté Sébastien Lecornu. D'autant que la France met sur la table 500 millions d'euros pour le MGCS tout au long de la prochaine loi de programmation militaire (2024-2030). Le ministre français, avec Boris Pistorius, souhaite mettre la pression sur leurs équipes et les industriels de MGCS, le groupe franco-allemand KNDS et Rheinmetall :
« Nous nous sommes vus le 10 juillet à Berlin, a-t-il rappelé. Je serai à mon tour le 9 et 10 octobre en Allemagne pour le séminaire franco-allemand où nous aurons un temps bilatéral à nouveau et nous allons garder ce rythme pour tenir les délais des projets dans lesquels nous sommes engagés, ce qui nous permet à chaque fois de donner différents mandats à nos équipes civiles et militaires et en assurer le portage politique ».
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