
Une tempête dans un verre d'eau... qui a provoqué un raz-de-marée sur les réseaux sociaux et des réactions très vives au sein du monde politique. De quoi parle-t-on ? D'un article du journal allemand Handelsblatt, qui estime que le projet de char de combat franco-allemand MGCS (Main Ground Combat System) est menacé d'abandon par Berlin pour un nouveau projet européen. Si le programme franco-allemand reste extrêmement compliqué à lancer - un euphémisme -, écrire l'épitaphe du MGCS est encore trop tôt même si certains en Allemagne (en France aussi) souhaite la fin de ce projet.
Des consortiums rivaux
Pourquoi le mot fin n'est pas encore à l'ordre du jour ? Parce que la constitution d'un consortium formé par KNDS, Rheinmetall, Saab et Leonardo, qui a répondu à un projet technologique (Future Main Battle Tank ou FMBT) financé par la Commission européenne (20 millions d'euros) dans le cadre d'un appel à évaluation (« call ») du Fonds européen de défense (FED), ne met pas en danger le programme MGCS. Le projet FMBT, qui va courir sur deux ans, doit servir à développer des briques technologiques au profit entre autre du MGCS et non pas pour le remplacer. Du moins pour le moment. Dans deux ans, il y aura en quelque sorte des balles neuves...
« Le projet Future Main Battle Tank FMBT) est un programme européen dont le montage industriel est encore ouvert. Un consortium industriel ouvert à toutes les nations a été formé à cet effet. KNDS est membre de ce consortium. Rheinmetall et KNDS sont partenaires des programmes MGCS et FMBT », a rappelé un porte-parole du groupe KNDS.
En outre, comme l'écrivait le 24 août La Tribune, la France, via Nexter et Thales, devait participer à ce consortium. Mais le ministère des Armées a refusé au dernier moment que les industriels tricolores participent à une réunion en Allemagne pour finaliser ce projet sous prétexte que les Allemands étaient trop hégémoniques. Logiquement les Allemands ont poursuivi leurs travaux avec les entreprises pressenties (Saab et Leonardo) tandis que les Français ont lancé à la demande de la Direction générale de l'armement (DGA) des travaux en vue de former un consortium concurrent. Ce qui ne sera pas facile pour les Français dont le noyau est composé de Nexter et de Thales. Leonardo n'en sera pas contrairement à ce que La Tribune a pu écrire, il a finalement choisi de rester avec les Allemands.
L'ombre de Rheinmetall
A qui profite le crime ? A Rheinmetall, qui avait semble-t-il tout intérêt à ce que l'article du Handelsblatt soit publié à quelques jours d'une rencontre cruciale entre le ministre des Armées français Sébastien Lecornu et le ministre de la Défense allemand Boris Pistorius (22 septembre), pour déstabiliser un programme déjà au bord du gouffre et pour déchainer les ressentiments anti-allemands en France et anti-français en Allemagne. Bref, compromettre définitivement une rencontre déjà complexe où les deux ministres doivent jouer cartes sur table.
Alors que le groupe de Düsseldorf, où est d'ailleurs également implanté le Handelsblatt, souhaite limiter la France à la portion congrue sur ce programme ou carrément l'éjecter, Paris doit en principe proposer à Berlin de faire monter à bord du MGCS l'Italie, une proposition qui pourrait être celle de la dernière chance. Si le MGCS devait in fine capoter, KNDS n'aurait plus vraiment de raison d'être. En espérant que la France aura alors un plan B (Inde ? Émirats Arabes Unis ? Ou les deux ?). L'heure du momentum pour le MGCS est proche, très proche...
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