Prix alimentaires : l'accord sur la modération des marges évoqué par Emmanuel Macron en suspens

Emmanuel Macron a annoncé son intention de parvenir à « un accord sur la modération des marges » de l'industrie agroalimentaire. Cela impliquerait de lever plusieurs obstacles.
Giulietta Gamberini
Malgré la fermeté affichée dimanche par le président de la République, le gouvernement semble plutôt espérer obtenir un accord par la concertation.
Malgré la fermeté affichée dimanche par le président de la République, le gouvernement semble plutôt espérer obtenir un accord par la concertation. (Crédits : Reuters)

Trois jours après, l'idée semble déjà avoir été mise entre parenthèses. Dimanche 24 septembre, lors d'une interview télévisée, Le ton était des plus fermes: « je vais y veiller personnellement », promettait le président de la République, déplorant « des grands groupes qui ont fait flamber les prix de certaines de leurs marques » et promettant des « contrôleurs » pour procéder à des vérifications.

Mais le projet de loi présenté mercredi 27 septembre en Conseil des ministres, visant à anticiper les négociations commerciales entre les distributeurs et leurs plus grands fournisseurs de marques nationales, ne fait aucune mention d'un tel accord. « Le sujet des marges est scruté régulièrement : nous continuons d'échanger », s'est limité à promettre Bercy lors de la présentation du texte à la presse.

Un travail de transparence préalable

Selon nos informations, le ministère de l'Economie souhaite d'abord obtenir des données plus précises sur les marges réalisées par les industriels.

« Pour le secteur de l'agroalimentaire, l'Insee calculait le 31 mai que le taux de marge de l'industrie atteignait 48,1%, soit dix points de plus que la moyenne des six dernières années. En parallèle, l'institut calculait à la fin du second trimestre que l'excédent brut d'exploitation grimpait au niveau historique de 7 milliards d'euros, soit une hausse de quasi 19% sur un trimestre », rappelait Nicolas Meizonnet, député du Rassemblement national, le 20 septembre, lors d'une audition des distributeurs et des industriels par la Commission affaires économiques de l'Assemblée nationale.

Une estimation rejetée par les industriels. L'Institut de liaisons et d'études des industries de consommation (Ilec) calcule plutôt qu'entre le 1er janvier 2022 et le 30 juin 2023, pour un échantillon comptant plus de la moitié des adhérents de l'association, les coûts ont augmenté de 2 milliards, alors que les revenus générés n'ont crû que de 1,4 milliard.

« Les industriels ont couvert les deux tiers de leurs surcoûts », affirmait devant les parlementaires son directeur général, Richard Panquiault : « Leur marge ne s'améliore pas, leur marge se détériore ».

Pour Bercy, y voir plus clair est donc une étape préalable incontournable. Et ce travail d'éclaircissement devra être mené à 360°, puisque les industriels souhaitent que la même transparence soit faite sur les marges des distributeurs.

Les limites du droit de la concurrence

Il s'agira ensuite d'imaginer un mécanisme assurant que toute baisse des cours des matières premières se reflète sur les prix en rayons. Malgré la fermeté affichée dimanche par le président de la République, le gouvernement semble plutôt espérer y parvenir par la concertation. Selon nos informations, il n'y aura vraisemblablement pas de contrainte légale ou réglementaire.

Interpellé par un communiqué publié le 25 septembre par l'Ilec sur le risque d'une distorsion de la concurrence découlant d'un tel accord, le gouvernement devra en outre en vérifier la conformité aux droits français et européen. Une nécessité qui déterminera aussi son périmètre, ses contenus et son niveau de contrainte. Le gouvernement est déjà à la recherche de précédents, et pourrait être amené à consulter, formellement ou informellement, l'Autorité de la concurrence et la Commission européenne.

Le pari d'un marché qui restera attractif pour les multinationales

Quant au risque d'un impact négatif sur l'attractivité de la France, mis en avant par certains industriels, l'exécutif compte sur le fait que le marché français est le principal en Europe pour les biens de consommation : un argument qui devrait à ses yeux suffire pour convaincre les multinationales de continuer à investir en France.

Le gouvernement envisage d'ailleurs une « réforme d'ensemble » des négociations avec les grandes marques, qui remettrait en cause l'exception française de l'encadrement de ces relations commerciales, afin de l'adapter à une volatilité des cours croissante. Elle pourrait rapidement faire l'objet d'une mission parlementaire.

Giulietta Gamberini

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Commentaires 5
à écrit le 28/09/2023 à 17:56
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Un accord pour modérer les marges ? La concurrence ça marche pas ? Ce pays est un pot pourri, le pire du libéralisme et du communisme... en même temps !!

à écrit le 28/09/2023 à 17:42
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Un 49-3, sinon rien!

à écrit le 28/09/2023 à 12:04
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Avec ce nouvel emprunt souverain extra-ordinaire (qui parle déjà de lui lui-même) - pour financer ses ambitions totalement irrationnelles dans un laps de temps aussi réduit et dans un tel triptyque (économique/géopolitique/financier) où pareille disr...

à écrit le 28/09/2023 à 10:05
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le titre fait presque de la peine, alors que c'est lui qui peut bloquer les prix ! du coup, parler de modération de marge c'est aussi savoir que c'est un choix qu'il fait. Mais comme il n'assume rien, qu'une com permet de laisser croire que sa paro...

à écrit le 28/09/2023 à 8:03
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boh, a l'ecole francaise, ceux qui savent lire ou compter sont punis, il ne faut pas stigmatiser ceux qui n'ont pas la chance de savoir, he ben pour les entreprises, celles qui gerent leurs couts sont punies car il ne faut pas stigmatiser les autres,...

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