Manque de personnel navigant : Easyjet pourrait annuler massivement ses vols cet été

Dans une lettre adressée à la compagnie aérienne low-cost britannique, les pilotes français d'Easyjet alertent sur des effectifs insuffisants, en particulier chez les hôtesses de l'air et stewards. Cette pénurie de main d'œuvre touche tout le secteur du transport aérien, confronté à une reprise très rapide de l'activité post-Covid.
Les pilotes français d'Easyjet ont adressé, le 6 juin, une lettre à leur direction, révélée par le média britannique Inews.
Les pilotes français d'Easyjet ont adressé, le 6 juin, une lettre à leur direction, révélée par le média britannique Inews. (Crédits : Paul Childs)

C'est encore et toujours le même problème pour Easyjet ces derniers mois : la compagnie low-cost britannique, qui a mené des plans de départ - comme d'autres compagnies aériennes - pour traverser la pandémie de Covid-19, manque aujourd'hui de personnel. A tel point, qu'en dépit des perspectives positives de reprise du trafic aérien, son fonctionnement risque d'être perturbé cet été. Au printemps, déjà, pour limiter ses besoins en personnel, la compagnie aérienne avait été contrainte de supprimer plusieurs centaines de vols et avait même dû retirer six sièges de ses A319 au Royaume-Uni.

Cette fois, ce sont les pilotes français d'Easyjet qui alertent sur la situation compliquée. Dans une lettre adressée à leur direction le 6 juin et révélée par le média britannique Inews, ils mettent en garde contre des risques d'annulations massives de vols faute d'effectifs suffisants, « essentiellement chez les hôtesses et stewards et un peu chez les commandants de bord », selon le président du Syndicat national des pilotes de lignes (SNPL) de la compagnie, Arnaud Wiplier. Il s'interroge : « Si on n'arrive pas à être résilient pour un week-end de trois jours, est-ce qu'on pourra l'être durant l'été », en référence aux difficultés rencontrées par la compagnie lors des longs week-ends du printemps.

Lire aussi 6 mnTransport aérien : la crainte que le fort rebond estival ne soit qu'un feu de paille

La compagnie aérienne est « moins bien préparée que les autres années » et se voit contrainte d'annuler des vols dans des proportions « pas vues depuis dix ans », déplore-t-il, faisant état de dizaines de vols annulés en France chaque semaine. Ces perturbations, déjà constatées dans certains aéroports européens, « vont atteindre leur apogée cet été » et risquent de compliquer encore la tâche des équipes d'Easyjet, assure-t-il.

« Piloter en toute sécurité »

D'autres problèmes sont soulevés par les pilotes dans leur lettre comme le rapporte Arnaud Wiplier qui pointe aussi la réduction des équipes chargées des plannings et du suivi des opérations, basées à l'aéroport de Luton, près de Londres. « S'il y a une personne malade, il n'y en aura plus qu'une seule pour vérifier la légalité des plannings du lendemain sur toute l'Europe, donc on a des annulations qui se font tardivement parce qu'on s'aperçoit trop tard qu'il n'y a plus d'équipage », décrit le délégué syndical. Les pilotes suggèrent de créer des annexes à ce centre d'opérations car « à Luton on trouve qu'ils n'arrivent pas à gérer le réseau ».

Enfin, les pilotes s'inquiètent dans leur lettre du recours au sous-traitant SmartLynx, un spécialiste des vols en location avec équipage très mal noté par l'ECA, l'organisation qui représente les pilotes européens. « On demande à la compagnie de s'assurer que les conditions de travail des pilotes leur permettent de voler en toute sécurité », indique Arnaud Wiplier, qui dénonce le recours à « des pilotes non salariés d'Easyjet, auto-entrepreneurs de type Uber ».

D'après le SNPL, la compagnie a prévu de recruter une centaine d'hôtesses et de stewards en France, mais « cela prend du temps de recruter et former ces gens », affirme le syndicat. La direction « donne l'impression de ne pas avoir saisi l'ampleur du problème », regrette Arnaud Wiplier.

De son côté, la direction assure, dans une réaction transmise à l'AFP, qu'elle maintient un dialogue constant avec les syndicats et qu'elle « répondra directement au SNPL » sur les questions soulevées dans leur lettre. Si Easyjet « continue d'exploiter jusqu'à 1.700 vols et transporte 250.000 voyageurs tous les jours », la compagnie reconnaît faire face à « des conditions d'exploitation difficiles qui conduisent à l'annulation d'une petite partie de [ses] vols ».

Un problème international

Easyjet n'est pas la seule compagnie à devoir affronter une pénurie de personnel alors que le secteur connaît une forte reprise du trafic aérien post-Covid. Le phénomène touche d'ailleurs autant les low-cost que les transporteurs classiques. Le 9 juin, la Lufthansa a annoncé supprimer en juillet quelque 900 vols intérieurs et européens prévus les vendredi et week-ends au départ et à destination de Francfort et Munich, deux gros aéroports. Cela correspond à 5% des sièges normalement ouverts à la réservation. Sa filiale low-cost Eurowings s'est également dite contrainte de supprimer « plusieurs centaines de vols » en juillet. Reconnaissant connaître des difficultés, la compagnie allemande a reconnu ne pas être en mesure de faire face au regain de demandes de voyages. « L'infrastructure ne s'est pas encore complètement remise » de « la plus grave crise subie par l'aviation » qu'a constituée la pandémie, a-t-elle expliqué, admettant également faire face à des « difficultés financières et une pénurie de personnel ». En mai, c'est la compagnie néerlandaise KLM qui avait été contrainte, pour les mêmes raisons, d'annuler des dizaines de vols.

Lire aussi 4 mnPénurie de personnel : après Easyjet, Lufthansa annule des centaines de vols cet été

Des hausses de salaire réclamées

Si les salariés alertent sur le manque de personnel, ils militent également pour des hausses de revenu comme dans le cas de Ryanair dont le personnel de cabine portugais a prévu de se mettre en grève pendant trois jours à la fin du mois de juin, selon le SNPVAC, le syndicat portugais du personnel de l'aviation civile. « Cette mobilisation est non seulement l'occasion de braquer les projecteurs sur les multiples atteintes à la dignité des travailleurs et de faire connaître cette réalité, mais aussi un moment d'unité et de solidarité contre le dumping », a ajouté le syndicat.

Ce fut également le cas au sein de l'aéroport de Roissy qui s'est retrouvé en partie paralysé par une grève de son personnel le 9 juin, réclamant une hausse de salaire de 300 euros. Environ un quart des vols prévus dans la matinée avaient dû être annulés.

Lire aussi 11 mnTransavia, Ryanair, Easyjet, Vueling, Volotea : les low cost vont frapper fort cet été sur le marché français

Mêmes revendications aux Royaume-Uni où le principal syndicat britannique, Unite, a également organisé une grève de cinq jours en avril chez les bagagistes de l'aéroport de Luton et menaçait d'en faire de même chez British Airways cet été. De même, en Italie, deux syndicats ont mené une grève de 4 heures début juin dans la compagnie irlandaise Ryanair pour demander de meilleurs salaires et dénoncer son refus d'accorder les journées de repos obligatoires cet été. Même chose chez Volotea. Conséquence : 360 vols ont ainsi été annulés en Italie.

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.