Coup de tonnerre : Airbus s'allie à Bombardier face à Boeing

Airbus va prendre une participation majoritaire dans le programme d'avions de ligne CSeries de Bombardier.
Fabrice Gliszczynski
Airbus apportera en effet au programme C-Series sa puissance commerciale son expertise en matière d'achats, de ventes et marketing et de service clients, soulignent les deux groupes.

Coup de tonnerre dans le secteur aéronautique. Secoué par les affaires de corruption, Airbus n'en garde pas moins les yeux rivés sur le « business » et signe un coup de maître en annonçant prendre une participation majoritaire dans le programme C-Series du constructeur ferroviaire et aéronautique canadien Bombardier, un programme lancé en 2008 dans l'espoir de permettre au constructeur d'avions d'affaires et d'avions régionaux d'entrer sur le marché des avions de plus de 100 places et de défier Airbus et Boeing sur leur avions d'entrée de gamme (A319, B737-700).

Avec ce partenariat, Airbus va bénéficier d'une famille d'avions allant de 110 à 149 sièges (voire 160 en version monoclasse), complémentaire avec ses A320 et A321 (150-220 sièges environ) et en ligne avec sa stratégie de se focaliser sur des avions plus gros, notamment sur le marché du 220-260 sièges si d'aventure Boeing lançait un avion d'une telle capacité. Certes, l'A319 (120-150 sièges) risque de faire les frais de ce partenariat avec Bombardier, mais comme le rappelle Tom Enders, le directeur général d'Airbus Group, il n'a pas enregistré de ventes depuis 2012.

Conflit avec les Etats-Unis

Tout comme Airbus, mais pour des raisons différentes, Bombardier est lui aussi secoué par une affaire d'envergure puisqu'il est au centre d'un conflit entre les Etats-Unis et le Canada depuis que Washington a décidé d'imposer des taxes de 300% aux appareils C-Series sous la pression de Boeing qui estime que l'avion canadien a réussi à se placer chez Delta grâce à des prix cassés liés aux subventions que reçoit le constructeur canadien. Boeing aura désormais doublement raison de s'inquiéter.

Une ligne d'assemblage de C-Series à Mobile

Une fois la transaction conclue, Airbus disposera d'une participation de 50,01% dans le programme tandis que Bombardier et la province du Québec conserveront respectivement environ 31% et 19%. Si aucune contribution en cash n'est prévue de la part des partenaires lors de la conclusion de la transaction, l'accord donne à Airbus le droit d'acquérir à l'avenir 100 millions d'actions Bombardier de classe B. Le siège du programme et la ligne d'assemblage primaire resteront basés à Québec, au Canada. Une seconde ligne d'assemblage de C-Series sera établie à Mobile, en Alabama (au sud des Etats-Unis), où, depuis deux ans, Airbus assemble des A320. Ce qui pourrait permettre du coup de contourner les taxes à l'importation.

L'accord est bénéfique aux deux parties.

"Ceci est un accord gagnant-gagnant pour tout le monde!", a déclaré le président exécutif d'Airbus, Tom Enders. "Je n'ai pas de doute que notre partenariat avec Bombardier va gonfler les ventes et la valeur de ce programme."

Le C-Series bénéficiera de la force commerciale d'Airbus

Airbus apportera  en effet au programme C-Series sa puissance commerciale son expertise en matière d'achats, de ventes et marketing et de service clients, soulignent les deux groupes. Cet aspect est fondamental et a de quoi inquiéter Boeing. Car Airbus va proposer en entrée de gamme un avion très compétitif qui aura d'autant plus de chance de se vendre qu'il serait présenté aux compagnies aériennes sous l'étiquette Airbus, alors que Boeing n'a pas trop d'option sur ce marché. Considéré comme un très bon avion par un grand nombre de spécialistes de l'aviation, le C-Series n'a pas rencontré néanmoins le succès espéré. La faute notamment à Airbus et à son directeur commercial John Leahy qui, en lançant en 2010 la remotorisation de la famille A320 (Neo), a tué dans l'œuf les velléités canadiennes. La faute aussi à des problèmes d'industrialisation et de motorisation qui n'ont pas incité les clients à passer commande. Lancé commercialement en 2004 et mis en production dès 2008, il a été livré à son premier client, la compagnie Swiss, à l'été 2016. La mise en ligne de l'appareil semble bien se passer et la direction de Bombardier estime que l'intérêt pour le C-Series ne cesse de grandir. Signe d'une volonté de rebondir, le constructeur canadien avait ces derniers mois musclé son équipe commerciale en recrutant des anciens vendeurs d'Airbus. Et des commandes comme celle de Delta ont apporté un bol d'air au programme. A fin juin, le C-Series comptait 360 commandes.

Une issue salvatrice pour Bombardier

Pour Bombardier, l'issue est néanmoins salvatrice. Après les déboires rencontrés dans l'industrialisation du programme (lequel a dérapé de deux ans avec des coûts de développement presque doublés, à 5,4 milliards de dollars), le groupe s'est retrouvé en difficulté financière et ne pouvait pas vivre bien longtemps avec le 1,5 milliard de dollars canadiens accordé fin 2015 par le gouvernement du Quebec. La direction entend en effet arriver à l'équilibre de la production unitaire qu'à partir de 2020.

"Nous sommes très heureux d'accueillir Airbus dans le programme C-Series", a de son côté déclaré Alain Bellemare, le PDG de Bombardier. "Airbus est le partenaire parfait pour nous, Québec et Canada".

 Airbus (mais aussi Boeing) avait déjà regardé une telle coopération en 2016 mais le dossier ne faisait pas l'unanimité à l'époque chez Airbus Group, qui sortait de l'échec de la fusion avec BAE Systems

Graphique Statista Airbus Bombardier Boeing avion

[Crédits : Statista.] 

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 23
à écrit le 19/10/2017 à 3:49
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Arnold: la même chose vient de m'arriver.Misère! Pasdepseudo :si j'en juge par tout ce que j'ai lu dans les journaux de Montréal, c'est vous qui ne connaissez pas le monde de l'aéronautique.Allez lire La Presse.

à écrit le 17/10/2017 à 23:22
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Espérons que Airbus rappela à Boeing, à chaque procès, comment le marché des ravitailleurs a été gagné par Airbus par deux fois et comment le gouvernement américain a annulé la compétition pour favoriser Boeing, et soit disant l'emploi aux USA.

à écrit le 17/10/2017 à 23:19
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Il y a vraiment un problème chez La Tribune. On passe des minutes à écrire un commentaire et voilà que la page se rafraichis toute seul et fait perdre tout le contenu ! Merci à la Tribune de revoir ça avec son Webmaster. cela dure depuis des année...

le 18/10/2017 à 22:58
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Je fais la même constatation que vous !

à écrit le 17/10/2017 à 21:54
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Balivernes : Airbus n'est pas plus "sauvé" par ce programme qui est un gouffre financier, qu'il ne pouvait hier être sauvé de l'agonie qui nous était annoncée par le calamiteux tandem Jupiter/Angela.Y a t'il quelqu'un à La Tribune qui connaisse le ma...

le 19/10/2017 à 5:11
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Ce n'est pas un gouffre pour Airbus, c'est même très malin, les gros investissements ont déjà été fait. Bravo Airbus.

à écrit le 17/10/2017 à 21:25
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Que pense de tout çà ATR qui il n'y a pas si longtemps attendait le feu vert d'Airbus pour se lancer dans le 100/150 places?

le 18/10/2017 à 0:37
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Bon à rappeler celà. ATR était une réussite. Les Allemands veulent l'asphyxier, n'est-ce pas ?

à écrit le 17/10/2017 à 21:03
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Avec la nouvelle politique Americain les jours de bombarder ete compter... Maintenant espérons que cette alliance sera fructueuse à tous le monde.... Au canadien tous comme au europenne....

à écrit le 17/10/2017 à 16:41
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Nos cousins n'ont plus qu'à acheter des avions de chasse européens et non des F35. Le Ceta serait il une alliance industrielle de part et d'autre de l'Atlantique. M. Trudeau serait il un partenaire réel et non de circonstance. Les européens mais éga...

à écrit le 17/10/2017 à 13:52
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Bravo pour cette alliance avec Québec ,d'autres entreprises françaises devraient y songer ,le Canada est une terre d'avenir dont la prospérité croît rapidement et pacifiquement,avec un melting pot qui l'ouvre sur le monde ,et les patronymes québequo...

à écrit le 17/10/2017 à 13:41
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Siemens-Alsthom devraient aussi s'allier à Bombardier en Ferroviaire

à écrit le 17/10/2017 à 13:35
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Bravo pour cette alliance avec Québec ,d'autres entreprises françaises devraient y songer ,le Canada est une terre d'avenir dont la prospérité croît rapidement et pacifiquement

à écrit le 17/10/2017 à 13:22
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Bien vu ou raté ? La vraie concurrence sur ce marché des petits jets me semble etre plutot avec : un peu les russes , beaucoup les chinois .

à écrit le 17/10/2017 à 13:20
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Bien vu ou raté ? La vraie concurrence sur ce marché des petits jets me semble etre plutot avec : un peu les ruses , beaucoup les chinois .

à écrit le 17/10/2017 à 9:13
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Tout cet impérialisme économique imposé par les USA est vraiment ignoble et ne pousse qu'a être fort avec les plus petits et les détruire. Pitoyable.

le 17/10/2017 à 13:40
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@bull: "la raison du plus fort est toujours la meilleure". Non pas que ce soit très moral, mais il faut aussi tenir compte des réalités de la vie :-)

le 17/10/2017 à 14:20
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une bonne claque pour Trump ! bienfait !

à écrit le 17/10/2017 à 8:54
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Trump, comme on pouvait s'en douter fait une politique clientéliste, le lobby pétrolier l'adore et il le lui rend bien, du coup airbus et bombardier sont en train de souffrir puissamment du réseau lié au secteur pétrolier qu'a choisi trump et donc ai...

le 17/10/2017 à 11:43
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Contrairement à ce que vous pensez l'Europe innove vraiment : Ariane reste le premier lanceur mondial et avec Ariane 6 elle va aller concurrencer sur ses tarifs SpaceX. Airbus est la locomotive de l'aviation mondiale, et Boeing n'arrivant pas à sui...

à écrit le 17/10/2017 à 8:26
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... et on attend les mèmes mesures envers MacDo, Amazon ou Microsoft !

à écrit le 17/10/2017 à 8:25
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Tout ce qui peut concurrencer (...ou eroder ! )une entreprise américaine est bon a prendre car les USA jouent avec leur propres règles ......celles d'un protectionnisme a peine dissimulé !

à écrit le 17/10/2017 à 8:24
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Tout ce qui peut concurrencer (...ou eroder ! )une entreprise américaine est bon a prendre car les USA jouent avec leur propres règles ......celles d'un protectionnisme a peine dissimulé !

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