Le yen chute face à l'euro, au plus bas depuis 2008, malgré les annonces de la Banque du Japon

Mauvaise surprise pour le Japon : le yen tombe à son plus bas niveau face à l'euro depuis plus de 10 ans. La Banque du Japon a pourtant annoncé abandonner sa politique monétaire de taux négatifs, mais la baisse opérée reste encore insuffisante aux yeux des marchés.
Le yen est tombé mercredi à son plus bas niveau face à l'euro depuis 2008.
Le yen est tombé mercredi à son plus bas niveau face à l'euro depuis 2008. (Crédits : KIM KYUNG-HOON)

C'est un record depuis plus de 10 ans. Le yen est tombé mercredi à son plus bas niveau face à l'euro depuis 2008, au lendemain de l'annonce par la Banque du Japon du maintien d'une politique monétaire « accommodante » même si elle abandonne sa politique de taux négatifs.

Dans le détail, la devise japonaise a chuté à 164,48 yen pour un euro en fin de matinée. En cause : le passage à un taux d'intérêt de court terme entre 0% et 0,1% restant jugé insuffisant pour attiser la demande face au taux de dépôt de 4% pratiqué par la Banque centrale européenne. Le yen a également reculé face au dollar, à plus de 151 yens pour un dollar mercredi, contre quelque 149,3 avant la décision.

Une politique monétaire à contre-courant

La Banque du Japon a mis fin mardi à sa politique de taux négatifs, mise en place en 2016 et qu'elle était la dernière au monde à pratiquer, avec un relèvement de 0,1 point de sa fourchette. La Banque a parallèlement souligné mardi que « les conditions financières accommodantes seront maintenues » jusqu'à nouvel ordre.

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En effet, la Banque du Japon (BoJ) n'a pas suivi le chemin classique de l'Europe ou encore des Etats-Unis concernant sa politique monétaire. La BoJ conservait ainsi pour le moment une politique monétaire avec un taux négatif, à contre-courant des hausses successives de taux de la BCE et de la Fed. L'institution voulait soutenir l'économie nippone qui reste fragile.

Sauf que comme les marchés avaient largement anticipé une hausse des taux, la première pratiquée par l'institution depuis 2007, la modestie du relèvement a déçu les investisseurs, qui sanctionnent le yen pour ce qu'ils interprètent comme une « hausse molle », estime Alex Loo, analyste chez TD Securities.

Inflation et hausse des salaires

Surtout que, comme de nombreux pays, l'inflation s'est brutalement réveillée au Japon depuis 2022, avec la flambée des prix du pétrole et d'autres matières premières après la pandémie de Covid-19 ainsi que le début de l'invasion russe de l'Ukraine. La hausse des prix à la consommation dans le pays (hors produits frais) a même atteint 3,1% en moyenne en 2023, un record depuis 1982. Cette dernière reste même relativement tenace (2% en janvier, selon les derniers chiffres officiels disponibles).

Les premiers résultats des négociations salariales annuelles au Japon, qui montrent une hausse record depuis 1991, ont également laissé présager une hausse des taux de la BoJ.

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Croissance en berne

Le fossé qui s'est creusé entre la politique et les resserrements monétaires drastiques menés aux Etats-Unis et en Europe depuis 2022 avait donc déjà fait chuter le yen par rapport au dollar et à l'euro. Si la faiblesse du yen a des aspects positifs, notamment pour les grandes entreprises japonaises exportatrices et la Bourse de Tokyo, elle fragilise encore davantage le pouvoir d'achat des ménages nippons, et donc la consommation intérieure, ce qui est contre-productif pour l'objectif d'inflation de la BoJ.

Et le début de cette année s'annonce difficile, la consommation des ménages ayant connu en janvier sa pire chute depuis trois ans (-6,3% sur un an). Il s'agit du onzième mois consécutif de baisse de cet indicateur.

La consommation en berne au Japon, du fait de l'inflation et du yen faible, a également des conséquences négatives sur la croissance. Fin 2023, le pays du Soleil Levant évite de justesse la récession, son produit intérieur brut (PIB) au quatrième trimestre ayant été révisé ce lundi en hausse, à 0,1% en termes réels sur un trimestre.

En termes nominaux, c'est-à-dire sans corriger l'effet de l'inflation, le PIB nippon a même été rétrogradé en 2023 au quatrième rang mondial, ayant été dépassé par l'Allemagne. Au Japon, les médias locaux ont abondamment commenté la perte par le pays de son troisième rang économique mondial. Car au-delà de l'impact exceptionnel de la chute du yen, de puissants facteurs fondamentaux négatifs sont aussi à l'œuvre tels que le déclin démographique accéléré de l'archipel ou encore la faiblesse chronique de sa productivité.

(Avec AFP)

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Commentaires 4
à écrit le 20/03/2024 à 14:35
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Je rentre du japon et il est vrai que le cours de 150 ¥ pour un euro à fait du bien au porte monnaie. Hormis certains produits spécifiques et services, la vie reste tout de même chère si on achète fruits, et autres produits frais mais pour l'essentie...

à écrit le 20/03/2024 à 9:50
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L’écart des taux entre Euro (ou US $) et Yen et est mortifère pour le yen. Avec des mouvements déjà très importants (pour mémoire) l’an passé (à la louche, une perte de valeur pour le Yen contre l’Euro de 11% (sic!)), puis rebelotte depuis le début d...

à écrit le 20/03/2024 à 9:32
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Le Yen s'effondre face à toutes les monnaies, c'est parfait pour ses exportations.

à écrit le 20/03/2024 à 8:43
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Le Japon ne va pas bien, son peuple ne veut plus avancer à marche forcée mais l'UE ne va pas bien non plus son peuple ne veut plus de corruption politico-financière, son seul atout c'est d'être assis sur la fortune des vieilles familles européennes a...

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