Le Japon relance son projet d'un avion de ligne « made in Japan »

Le Japon ressuscite son rêve de construire un avion de ligne, un an après l'abandon du programme d'avion commercial SpaceJet de Mitsubishi Heavy Industries. D'après des médias nippons, ce nouveau projet fonctionnera potentiellement à l'hydrogène, cette source d'énergie étant l'un des piliers de la stratégie de transition énergétique du pays.
Avec ce nouveau programme aéronautique associant tout un écosystème d'entreprises, le Japon va essayer de retenir les leçons de l'échec cuisant du SpaceJet (Photo d'illustration).
Avec ce nouveau programme aéronautique associant tout un écosystème d'entreprises, le Japon va essayer de retenir les leçons de l'échec cuisant du SpaceJet (Photo d'illustration). (Crédits : Michaela Rehle)

Le Japon va officiellement relancer son projet de construire un avion de ligne « made in Japan », 60 ans après le dernier modèle. Des annonces sur une « nouvelle stratégie pour l'industrie aéronautique » japonaise sont attendues plus tard ce mercredi de la part du ministère de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (Meti). Des informations de presse en ont toutefois déjà révélé une partie de leur substance.

Dans le détail, ce nouveau projet vise à commercialiser d'ici à 2035 un avion de nouvelle génération, d'après le quotidien économique Nikkei et l'agence de presse Kyodo. Il sera développé par plusieurs entreprises privées, dont Mitsubishi Heavy Industries (MHI), avec un soutien de l'État. Au total, selon Nikkei, 5.000 milliards de yens (plus de 30 milliards d'euros) d'investissements publics et privés seront fléchés pour sa réalisation.

L'hydrogène envisagé

Ce projet ne serait qu'une étape pour le Japon, qui nourrit de plus grandes ambition. Car, pour atteindre une « croissance durable » de son industrie aéronautique, le pays « ne peut pas se satisfaire » de son statut actuel dans ce secteur, où il est cantonné à un rôle de fournisseur de pièces, a déclaré ce mercredi Kazuchika Iwata, l'un des ministres adjoints du Meti.

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« Dans les nouveaux domaines d'activité des technologies neutres en carbone, y compris l'hydrogène, nous voulons prendre une position de premier plan », a-t-il ajouté.

Divers projets d'avions à propulsion hydrogène sont déjà en développement dans le monde, dont le « ZEROe » de l'avionneur européen Airbus, qui ambitionne de le faire voler également d'ici à 2035. L'hydrogène est d'ailleurs un pilier de la stratégie japonaise de transition énergétique. De nombreuses entreprises du pays sont déjà largement impliquées dans ce domaine, notamment des constructeurs automobiles, comme Toyota et Honda.

Faire oublier l'échec cuisant de SpaceJet

Avec ce nouveau programme aéronautique associant tout un écosystème d'entreprises, le Japon va essayer de retenir les leçons de l'échec cuisant du SpaceJet (longtemps connu sous de le nom de Mitsubishi Regional Jet, ou MRJ). Pour rappel, ce programme d'avion commercial que MHI développait seul, avec un soutien du gouvernement essentiellement limité à la partie « recherche », a été un véritable fiasco alors qu'il devait normalement être le premier avion civil « made in Japan » depuis le YS-11, un précédent court-courrier produit dans les années 1960-70.

Présenté en 2007 et lancé en 2008, l'appareil pouvant accueillir 90 passagers (une version raccourcie de 76 places étant également prévue) aurait dû démarrer ses opérations commerciales cinq ans plus tard. Mais en raison de difficultés techniques et des procédures de certification plus complexes que prévu, le MRJ avait vu sa phase de développement s'éterniser, gonflant considérablement ses coûts et repoussant sans cesse la date de première livraison. Et ce, malgré l'appel à de nombreux équipementiers occidentaux. En 2019, MHI a tenté de redonner de l'allant au programme en le renommant SpaceJet, mais la pandémie de Covid-19 lui a donné le coup de grâce.

Après avoir été gelé en 2020, le projet a été officiellement abandonné en février 2023 par MHI, qui a englouti l'équivalent de plus de huit milliards d'euros dans ce désastre. Le groupe avait alors expliqué qu'il avait « insuffisamment pris la mesure au départ des procédures de certification très complexes pour un avion commercial » et qu'il n'avait pas assez de ressources pour poursuivre le développement du projet.

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Un projet d'avion aussi dans le militaire

Malgré le naufrage de ce projet, MHI reste un acteur majeur de l'industrie aéronautique, en tant que fournisseur de nombreux composants et services pour le secteur. Le groupe est aussi présent dans le domaine militaire de la filière et est ainsi en première ligne dans le projet GCAP de développement d'ici 2035 d'un avion de chasse de nouvelle génération réunissant le Japon, le Royaume-Uni et l'Italie. À ce sujet, le gouvernement nippon a approuvé ce mardi un nouvel assouplissement de ses strictes règles en matière de transfert d'équipements militaires, pour permettre l'exportation de ce futur engin.

Le Japon fera en sorte que cet appareil soit exporté vers des pays tiers avec lesquels il a des accords de transfert d'équipements ou de technologies de défense, comme les États-Unis, la France, l'Australie, l'Inde, les Philippines ou encore les Emirats arabes unis. Par ailleurs, les ventes de l'avion seront uniquement autorisées pour des pays non impliqués dans des conflits actifs, et chaque projet de vente devra obligatoirement recevoir l'aval du gouvernement nippon. Le verrou japonais sur les exportations d'armes était un obstacle jusqu'à présent pour ce programme, dont les ventes à des pays tiers pourraient aider à amortir ses coûts de développement qui s'annoncent, là encore, très lourds.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 27/03/2024 à 21:08
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Le MRJ était saboté par les américains. Si vous allez le faire Japon, au moins améliorer votre sécurité et faites une vraie avance svp – avion Coanda et fuselage levante (Burnelli). Merci.

le 28/03/2024 à 13:43
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Oh oui... Ce sont toujours les méchants américains qui font crouler les projets révolutionnaires des autres, n'est ce pas? Vous allez me sortir l'histoire de Concorde, du 380, du Minitel, etc. En suivant votre logique, je suis certain que SpaceX a vo...

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