Tesla allume la mèche et le marché de la voiture électrique s'embrase. Le constructeur américain a lancé une guerre des prix en 2023 en baissant à trois reprises le coût de ses véhicules. Si ses concurrents n'ont pas suivi l'an dernier, ils ont fini par rentrer dans l'arène en ce début d'année. Résultat : Renault a abaissé de 4.000 euros le prix de sa Mégane électrique, désormais proposée à partir de 34.000 euros (hors bonus) pour la version à 300 kilomètres d'autonomie. Même combat du côté de Volkswagen : sa ID.3 électrique est disponible à partir de 39.990 pour 400 kilomètres d'autonomie.
Face à cette riposte, Tesla en a remis une couche en diminuant encore le prix de sa Model Y, son modèle le plus vendu, affiché aujourd'hui à 42.990 euros pour 450 kilomètres d'autonomie. Dernier constructeur à entrer dans la danse, Hyundai a annoncé ce mardi vouloir « ajuster ses offres commerciales pour répondre aux modifications tarifaires des principaux concurrents ».
Le prix de la Kona électrique, son SUV qui bataille sur le même terrain que la ID.3 et la Megane E-Tech, devrait ainsi baisser de 4.000 euros pour atteindre 36.850 euros. Une aubaine pour les clients, dans la mesure où toutes ces voitures bénéficieront également du futur bonus écologique de 4.000 euros en France, dès que le texte législatif sera publié au Journal Officiel. Les marques écartées du bonus ne sont pas en reste. Elles n'hésitent pas à casser leur prix avant l'application de ce décret, à l'instar de la marque chinoise MG, laquelle a également baissé de 7.000 euros le prix de sa MG4, désormais à 22.990 euros depuis janvier.
Stellantis craint le « bain de sang »
À contre-courant de ses concurrents, le groupe Stellantis, quant à lui, ne souhaite pas rentrer dans cette guerre de prix.
« Si vous baissez vos prix sans égard pour la réalité de vos coûts (...) alors vous aurez un bain de sang. J'essaie d'éviter une course vers le bas », a averti Carlos Tavares, le dirigeant du groupe, lors d'une conférence accordée aux journalistes vendredi dernier, ajoutant : « Je vais ajuster (les tarifs) au même rythme que je réduis les coûts. Je connais une entreprise qui a brutalement baissé ses prix et qui a vu sa profitabilité fondre. Quand vous faites cela, vous vous retrouvez dans le rouge »
Le groupe franco-italo-américain proposera donc sa future 3008 électrique à 44.990 euros pour une autonomie de 527 kilomètres. C'est plus que la Model 3 de Tesla qui affiche la même autonomie. Mais Stellantis gagne la bataille grâce aux subventions françaises qui lui sont accordées, la 3008 étant assemblée à Sochaux alors que la Model 3 est fabriquée en Chine.
Une résistance qui ne devrait pas durer, selon certains économistes, estimant que l'industrie automobile ne pourra pas passer à 100 % sur l'électrique en restant à des prix aussi élevés.
Une baisse de prix qui devrait perdurer
Preuve en est, Luca de Meo, le directeur du groupe Renault, a lui aussi lutté toute l'année 2023 pour ne pas entrer dans cette guerre tarifaire, avant de s'y résigner ce mois-ci. La faute aux ventes de voitures électriques qui ont reculé en Europe au mois de décembre, une première depuis avril 2020. Si, après la crise sanitaire, les constructeurs ont joué sur la baisse de production provoquée par la crise des semi-conducteurs pour augmenter le prix de leurs véhicules, le retour à la normale entraîne une surcapacité.
« Les marges opérationnelles à deux chiffres risquent bien de ne plus être qu'un souvenir dans quelques mois, prévient Bernard Jullien, économiste spécialisé sur le secteur automobile. Il y a une forme de nécessité de retrouver les volumes de véhicules neufs d'avant crise pour amortir les coûts de production, mais aussi pour garder les emplois. Sinon, nous pourrions assister à une hécatombe dans les usines. »
Et pour vendre un tel volume de voitures, les constructeurs doivent impérativement baisser les prix. Pour cela, deux solutions s'offrent alors à eux : diminuer les marges en baissant drastiquement le prix des véhicules déjà produits comme ils le font actuellement. Ou privilégier la production de petites voitures, comme les citadines électriques, moins chères, où la demande est plus forte. Une option plus « puissante », selon Bernard Jullien, et déjà anticipée par la plupart des constructeurs. Ainsi, Renault sortira sa Renault 5 électrique cette année à 25.000 euros, Citroën sa C3 électrique à 23.300 euros et Volkswagen devrait commercialiser sa ID.2 en 2025 dans les mêmes prix.
Le leasing social montre que le prix oriente la demande
Avec ces prix moins élevés, les constructeurs espèrent donc relancer les commandes, à la peine en 2023, et contrer une arrivée progressive des constructeurs chinois qui proposent des modèles en dessous des prix du marché européen. En ce début d'année 2024, c'est par ailleurs le leasing social, proposé par le gouvernement, qui fait monter les ventes pour les constructeurs. Hyundai affirme que la moitié de ses Kona électriques ont été réservées grâce à ce dispositif en janvier.
L'engouement pour cette mesure, qui permet de louer une voiture électrique autour de 100 euros par mois, montre l'effet du prix sur la demande et confirme un attrait pour l'électrique si les prix tendaient à baisser. « Cet engouement montre que ce n'est pas la technologie électrique qui empêche les achats de voitures neuves, c'est bien le prix. Il faut impérativement recoller aux ménages et aux prix qu'ils sont prêts à mettre dans une voiture », insiste Bernard Jullien.
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