Logements sociaux : la construction risque de chuter alors que la demande est déjà au plus haut

Les bailleurs sociaux pourraient construire beaucoup moins de logements dans les prochaines décennies, selon une étude prospective de la Banque des territoires. Pris entre leurs obligations de rénovation et une dette grandissante, ils n'auront ainsi pas les moyens financiers de tout faire en même temps. Or, le nombre de ménages en attente d'un logement social atteint déjà des records.
La construction de HLM, passée depuis 2020 sous la barre des 100.000 logements par an, devrait continuer de ralentir pour se stabiliser à une moyenne de 66.000 nouveaux logements annuels à partir de 2030.
La construction de HLM, passée depuis 2020 sous la barre des 100.000 logements par an, devrait continuer de ralentir pour se stabiliser à une moyenne de 66.000 nouveaux logements annuels à partir de 2030. (Crédits : Jean-Pierre Amet)

Les bailleurs sociaux n'auront pas les moyens de rénover leur parc et, en même temps, de construire de nouveaux logements sociaux. Telle est la conclusion d'une étude prospective de la Banque des territoires publiée ce jeudi 21 septembre. Cette dernière, dont les projections courent jusqu'en 2061, se base sur l'hypothèse d'une inflation et d'un taux du Livret A de 2% en moyenne à partir de 2027. Elle suppose aussi un « comportement des bailleurs inchangé » et des politiques publiques constantes.

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Il ressort ainsi que la construction de HLM, passée depuis 2020 sous la barre des 100.000 logements par an, devrait continuer de ralentir pour se stabiliser à une moyenne de 66.000 nouveaux logements annuels à partir de 2030. Poussés par l'interdiction progressive de louer les logements les plus énergivores, les bailleurs devraient donner la priorité à la rénovation. Les réhabilitations atteindraient ainsi un pic à 125.000 logements par an en 2025 et 2026, puis reflueraient, pour atteindre 90.000 par an sur la période 2031-2061.

Manque de finances pour tout faire

L'inflation et la forte augmentation des taux d'intérêt qui touchent actuellement les bailleurs, non compensées par la hausse des loyers, affaiblissent leur capacité d'investissement à long terme, note la Banque des territoires. Les bailleurs sociaux sont largement financés par l'épargne, notamment via le Livret A. Quand les taux d'intérêt remontent, leur dette s'alourdit, d'autant plus qu'elle est à taux variable.

« Si on veut prioriser la rénovation du parc, mécaniquement, il faudra réduire la construction de logements », explique à l'AFP Kosta Kastrinidis, directeur des prêts de la Banque des territoires, l'une des branches de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

À moins que les politiques publiques ne changent : injection de nouvelles aides, assouplissement des réglementations... Pour soutenir le logement social, le ministre délégué chargé du Logement, Patrice Vergriete, a précédemment promis de « réfléchir à des mesures qui puissent améliorer les fonds propres des bailleurs », et de développer le bail réel solidaire, dispositif d'accession sociale à la propriété.

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La demande, elle, explose

Construire 66.000 logements par an « est insuffisant » compte tenu des besoins, juge en tout cas Kosta Kastrinidis. Le nombre de ménages en attente d'un logement social n'a, en effet, jamais été aussi élevé. Ils étaient 2,42 millions fin 2022 selon l'Union sociale pour l'habitat (USH), soit 162.000 de plus qu'en 2021. Parmi eux, les deux tiers (1,63 million) ne sont pas déjà logés dans le parc social. Les autres (797.000) attendent quant à eux un logement plus adapté à leurs besoins.

« On a plus de demandes, parce que d'une part on ne construit pas assez, et d'autre part les gens qui sont dans le parc HLM le quittent moins qu'avant. Parce que le marché privé est trop cher pour eux, ou ils ont des structures de revenus qui ne leur permettent pas d'y avoir accès ; je pense aux gens en intérim, qui n'ont pas de revenu issu d'un CDI », expliquait début septembre à l'AFP Marianne Louis, directrice générale de l'USH.

Un constat partagé par Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL), première organisation représentative des locataires dans les conseils d'administration des bailleurs. « On siège dans les commissions d'attribution, et c'est la pénurie. Quand il y a un logement qui se libère, il y a des tas de dossiers qui se présentent, et quelquefois, c'est quand même assez compliqué pour choisir qui va avoir le logement... », dénonce-t-il.

Un phénomène qui se concentrait dans le passé dans les grandes villes, mais qui aujourd'hui se généralise. « Le nombre de gens qui enregistrent une demande augmente, et ce dans toutes les régions, y compris dans des régions dans lesquelles la progression de la demande était pour l'instant maîtrisée », alertait Marianne Louis.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 21/09/2023 à 11:54
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Il serait temps d'enquêter sur cet incroyable microcosme de magouilles en tout genre privé/public qu'est le BTP d'abord et avant tout, après nettoyage des voyous je peux vous garantir qu'on en récupérerait des milliards et comme par magie les aberrat...

à écrit le 21/09/2023 à 11:44
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Il faudrait mieux étudier d'où provient la demande. Normalement sans immigration illégale la population française devrait commencer à baisser et on devrait avoir besoin de plus de RSA mais pas de plus d'HLM qui enlaidissent le pays. Avec une plus gra...

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