Embourbé dans l'aciérie de Tarente, ArcelorMittal espère toujours vendre ses parts à l'Etat italien

En perdition depuis 2015, l'aciérie de Tarente ne parvient plus à payer ses fournisseurs, au point de risquer des coupures de gaz et d'électricité. Actionnaire majoritaire à 62%, ArcelorMittal espère vendre l'intégralité des parts à son co-actionnaire, l'Etat italien. Mais pour l'instant, ce dernier refuse de sortir le carnet de chèque.
ArcelorMittal espère se retirer du bourbier de l'aciérie de Tarente.
ArcelorMittal espère se retirer du bourbier de l'aciérie de Tarente. (Crédits : Francois Lenoir)

ArcelorMittal a exprimé de nouveau sa volonté de vendre à l'Etat italien ses 62% détenus dans l'aciérie géante de Tarente, en grande difficulté, où des milliers d'emplois sont en jeu. Le numéro deux mondial de la sidérurgie a envoyé une lettre vendredi, signée par son directeur général Aditya Mittal, et adressée à la Première ministre Giorgia Meloni.

Le dirigeant y indique qu'il est enclin à trouver une « solution amiable » pour la reprise de l'aciérie et veut éviter d'en arriver à une solution « unilatérale et extrême » ou autrement dit à un passage en force de l'Etat. « Nous avons proposé de céder la totalité de notre part à Invitalia [l'agence des participations d'Etat italienne, NDLR] pour un prix qui reflète seulement une fraction de notre investissement en cash », précise-t-il, en soulignant que cette proposition « restait sur la table ». Si le gouvernement continue de reguser son offre, Aditya Mittal fait part de son souhait de « rester un partenaire stratégique minoritaire, le temps que le gouvernement décide d'une solution durable », comme il était initialement prévu.

L'Etat italien force la main

L'aciérie de Tarente, une des plus grandes d'Europe, est en proie à une grave crise de liquidités, qui dure depuis des années. Elle ne parvient plus à rémunérer une grande partie de ses fournisseurs ni à régler ses factures de gaz et d'électricité, au point que le risque de coupure est imminent. Parmi les hypothèses sur la table pour sauver la situation : une prise de contrôle totale par l'État italien. Le gouvernement Meloni permettrait à l'entreprise de régler ses dettes envers ses fournisseurs, et ambitionne même de relancer la sidérurgie italienne.

Non seulement Rome considère que le site a une activité stratégique, mais en plus, sa potentielle disparition menace jusqu'à 20.000 emplois, directs et indirects, dans la région. C'est pourquoi jeudi, le gouvernement italien a annoncé qu'il œuvrait à une rapide mise sous tutelle de l'aciérie par l'Etat, afin de permettre la poursuite de l'activité. Celle-ci prendrait quelques semaines à se mettre en place, avec l'objectif d'avoir un administrateur pour assurer la gestion de l'aciérie et préparer un plan de sauvetage en attendant l'arrivée d'un nouvel investisseur. L'annonce a agacé ArcelorMittal, actuel actionnaire majoritaire à hauteur de 62%, qui comptait vendre ses parts, mais se ferait forcer la main par l'Etat.

« Nous n'avons pas de temps à perdre », a déclaré le ministre italien des Entreprises Adolfo Urso. « D'un autre côté, si ArcelorMittal fait des propositions qui correspondent à ce que le gouvernement considère comme une absolue nécessité pour la protection du site et la relance de la production, les actionnaires peuvent évidemment discuter », a-t-il ajouté.

Plan de sauvetage raté

Le site de Tarente, très pollué, avait été placé sous administration de l'État en 2015, après une série de déboires financiers et judiciaires. ArcelorMittal l'avait ensuite repris en 2018, lors de son rachat du groupe Ilva, avec la promesse d'y investir 2,4 milliards d'euros sur cinq ans, dont la moitié pour la ramener à des normes environnementales acceptables sous quatre ans, c'est-à-dire jusqu'à cette année..

Mais en 2019, le géant de la sidérurgie avait fait volte-face et exprimé sa volonté de se retirer du projet. C'est alors que le gouvernement italien était entré en scène. Il s'était engagé à entrer progressivement au capital de l'aciérie, et d'en devenir actionnaire majoritaire à hauteur de 60% à l'horizon de mai 2024. Pour commencer, il avait donc pris 38% des parts en avril 2021, laissant à ArcelorMittal la part majoritaire de 62%. Puis il devait en récupérer 22% supplémentaires. La prise de contrôle de la deuxième tranche avait un temps été imaginée plus tôt que prévue, au printemps 2022, avant de finalement conserver la date initiale.

Mais face à la crise financière actuelle de l'aciérie et sous la pression des syndicats, l'État italien a revu sa feuille de route, et envisage donc un passage en force. Tandis que ArcelorMittal espère de son côté se retirer entièrement du bourbier financier.

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