Défense sous-marine : une pépite de Loire-Atlantique primée par l’OTAN

Au départ, ils étaient 1.300 candidats. Au final, seules 44 entreprises ont été retenues à l’issue de l’appel à candidatures de Diana, le tout jeune accélérateur d’innovations de défense lancé par l’OTAN. Parmi elles, une seule est originaire de France : Elwave. Une reconnaissance pour cette PME située en Loire-Atlantique.
La société Elwave développe des capteurs capables de détecter la présence d'objets enfouis (mines, câbles, pipelines...).
La société Elwave développe des capteurs capables de détecter la présence d'objets enfouis (mines, câbles, pipelines...). (Crédits : Elwave)

Initié en 2021 par les pays de l'OTAN et doté d'une enveloppe de 50 millions d'euros par an, l'Accélérateur d'innovation de défense pour l'Atlantique Nord (DIANA) a pour mission de soutenir les innovations qui peuvent transformer la défense et la sécurité. En décembre dernier, il a dévoilé les noms de 44 entreprises sélectionnées pour relever les défis de l'Alliance.

Concrètement, cette première vague s'est concentrée sur trois thématiques : la résilience énergétique, la détection et la surveillance et enfin, le partage d'information sécurisé. Retenues parmi 1.300 candidats (dont 29 français), la société Elwave, basée à Carquefou près de Nantes (Loire-Atlantique), s'est distinguée dans la défense et la sécurité sous-marine. A la clé, un coup de pouce de 100.000 euros pour soutenir la montée en maturité de sa technologie.

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Seule lauréate tricolore

Elwave est ainsi la seule lauréate française de cet appel à candidatures lancé durant l'été dernier. Fondée en 2018 par Pierre Tuffigo, avant de s'installer à Carquefou deux ans plus tard, cette PME « développe des capteurs électromagnétiques de détection sous-marin dont le lancement commercial date de fin 2023 ».

« Destinés à des applications aussi bien civiles que militaires, ils peuvent être embarqués sur des robots sous-marins télé-opérés (en anglais Remotely Operated Vehicle ou ROV) et des véhicules autonomes sous-marins (Autonomous Underwater Vehicle ou AUV), comme des drones, pour donner une image électrique de l'environnement, aussi bien pour le secteur de la défense que de l'énergie », explique-t-il.

Ses capteurs sont capables d'effectuer des missions à court terme de surveillance d'une infrastructure critique (gazoducs, pipelines, câbles internet transocéaniques) afin de détecter la présence de mines, notamment des UXO. Pour rappel, cet acronyme désigne ces obus et munitions datant de la Seconde Guerre mondiale non explosés. Ils sont disséminés au fond de l'océan Atlantique, de la Mer du Nord, de la Manche ou de la mer Baltique.

« Dans le cadre du développement des champs éoliens offshore, nous nous assurons également que les zones retenues pour leur installation sont sûres », complète-t-on.

Une technologie inspirée de la nature

Avec ses 15 salariés, l'entreprise Elwave s'est appuyée, dans les faits, sur les travaux du laboratoire de l'IMT Atlantique de Nantes. Objectif, développer une technologie de détection marine inspirée de la nature. Elle reproduit en effet le sens électrique de poissons tropicaux qui évoluent dans des eaux turbides en Afrique et Amérique du Sud et génèrent un champ électrique pour se repérer dans leur environnement. L'IMT Atlantique et Elwave ont toujours un laboratoire commun et possèdent un brevet industriel mondial en copropriété, d'autres étant en cours d'écriture.

D'après Pierre Tuffigo, l'entreprise qui compte parmi ses clients TotalEnergies et Technip Energies ou encore Naval Group serait la seule au monde à avoir développé une telle technologie. « Des laboratoires chinois et russes travailleraient sur le sujet », précise-t-il. Ses concurrents seraient principalement des fabricants américains et norvégiens de capteurs magnétiques (magnétomètres) qui apporteraient, selon lui, une information moins fiable et précise.

Grâce à cette subvention de DIANA de l'Alliance atlantique, Elwave va ainsi pouvoir mener, en février prochain, des essais de démonstration et de qualification de son produit au sein du Centre de recherche et d'expérimentation maritimes (CMRE) de l'OTAN situé à La Spezia en Italie pour la détection des mines et des UXO. Une phase d'expérimentation qui va durer six mois.

Une dizaine de millions de chiffre d'affaires d'ici à 2026

Cette première subvention pourra être portée à 300.000 euros dans un second temps. Dans la foulée, Elwave pourrait en effet entrer dans une deuxième phase du projet, dans le cadre du fonds d'innovation de l'OTAN (NIF), doté d'un milliard d'euros et financé par 23 nations, dont la France ne fait pas partie. Le but serait de poursuivre ses travaux.

En parallèle, dans le cadre d'applications scientifiques et de ses activités océanographiques, Elwave va participer à mieux connaître la biodiversité et la géodiversité des grands fonds marins via l'appel à projet Grands Fonds Marins porté par France 2030 à hauteur de 300 millions d'euros.

Un déploiement commercial est également prévu courant 2025 avec des implantations en Norvège, Royaume-Uni, Ecosse et aux États-Unis. L'année d'après, Pierre Tuffigo n'exclut pas d'installer un autre site de production en Loire-Atlantique pour accompagner la croissance de son entreprise. A titre indicatif, cette dernière recrute actuellement un électronicien et un géophysicien. Un plan de recrutement plus large interviendra fin 2024 pour assurer la commercialisation et le support des produits.

Le PDG, qui ne souhaite pas communiquer son volume d'affaires, est plus disert sur ses ambitions : « Atteindre une dizaine de millions d'euros de chiffre d'affaires à horizon 2026 avec une équipe d'une quarantaine de personnes ». Après un premier tour de table en 2020 de deux millions d'euros, et un coup de pouce financier de la Commission européenne de 1,8 million d'euros dans le cadre de l'appel à projets Blue Economy Window, il ne s'interdit pas de lever à nouveau des fonds, entre 5 et 10 millions d'euros, pour accélérer la commercialisation de ses capteurs. Une décision sera prise mi-2024.

Autre projet : viser d'autres applications, comme la détection de fuite de CO2. Sa ligne de produits pourrait ainsi être étendue dans les un à deux ans à venir.

Une visibilité accrue avec l'index French Blue Tech

Depuis décembre 2023, Elwen fait également partie des 35 jeunes pousses à constituer la première promotion de l'index French Blue Tech, mise en place par le Cluster maritime français (CMF). Cette compétition met en avant les meilleures start-up opérant dans le domaine maritime en France où plus de 1.200 structures sont actives mais ont pour point commun de faire face à des défis en matière de financement. En effet, plus de 80% des opportunités d'investissement se trouvent en régions côtières en France métropolitaine et en outre-mer alors que la majorité des investisseurs sont basés à Paris. La société nantaise Elwave s'est distinguée dans la branche « robotique ». L'occasion de bénéficier d'un joli coup de projecteur.

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