« Je suis heureux de pouvoir vous confirmer la rejointe prochaine par la Belgique du programme SCAF. Initialement comme observateur », a annoncé lundi Emmanuel Macron. La Belgique, qui avait choisi en octobre 2018 le F-35 de Lockheed Martin face à l'Eurofighter et au Rafale, rejoint l'Allemagne et la France, qui avait lancé il y a six ans le programme de Système de combat aérien du futur (SCAF), qui avait ensuite élargi à l'Espagne. « C'est une évolution majeure et cet élargissement permettra encore d'ancrer davantage en Europe ce projet au cœur de la défense aérienne de demain », a estimé le président de la République.
Une décision qui ne va certainement pas faire plaisir à Dassault Aviation, qui ne souhaite pas la présence de la Belgique dans le programme. Les travaux de la phase 1B ont été lancés en mars dernier après un accord trouvé laborieusement en décembre 2022 entre l'avionneur français et Airbus sur le pilier 1 (New Generation Fighter). Aujourd'hui, le travail entre les équipes d'ingénieurs d'Airbus et de Dassault Aviation « se passe très, très bien », a assuré vendredi le président exécutif d'Airbus Guillaume Faury, dans une interview accordée dans le cadre du Paris Air Forum organisé par La Tribune.
Dassault Aviation contre
L'annonce d'Emmanuel Macron intervient un mois après une audition au Sénat du PDG de Dassault Aviation Eric Trappier, qui se disait résolument opposé à l'arrivée de la Belgique dans le programme SCAF. Pour deux raisons. La première tient au partage du programme. « Je pense qu'il faut nous en tenir à ce sur quoi nous nous sommes engagés, ce qui n'est déjà pas facile, a estimé Eric Trappier le 24 mai dernier devant la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat. Nous devons réaliser la phase 1B à trois. J'espère que nous poursuivrons avec la phase 2, qui permettra de faire voler le futur avion, toujours à trois. Si on veut élargir la coopération, les discussions seront plus longues. Je rappelle que nous, Français, nous ne représentons plus qu'un tiers de ce projet. Je crains qu'aller plus loin ne se traduise par une perte de compétences utiles ».
Et puis, le PDG de Dassault Aviation, qui ne veut pas donner du travail aux entreprises belge, a rappelé que Bruxelles avait choisi en octobre 2018 l'avion de combat américain F-35 face à deux avions européens, Eurofighter et Rafale. « Je suggère de créer un club F-35 au sein du projet SCAF pour développer les futurs avions européens », a-t-il ainsi ironisé. Et d'assurer qu'il se « battrait pour faire valoir mon point de vue, même si bien sûr l'État peut toujours imposer le sien ». C'est le cas. Les déclarations d'Eric Trappier avaient agacé la ministre belge, Ludivine Dedonder : « M. Trappier, tout puissant PDG qu'il soit, ne va pas m'indiquer la manière dont je dois agir et j'espère que les gouvernements des autres pays européens favorables à une Europe de la Défense ne suivront pas cet avis », avait-t-elle répondu.
Airbus prêt à accueillir de nouveaux partenaires
Pour sa part, le président exécutif d'Airbus Guillaume Faury, interrogé par La Tribune, s'est montré plus prudent que son homologue de Dassault Aviation. « Premièrement, c'est une très bonne nouvelle qu'il y ait des pays qui aient envie de rentrer dans le programme SCAF. Cela démontre l'attractivité de ce programme. Des pays - il n'y a pas que la Belgique - estiment vraiment que le SCAF est le système de combat aérien du futur et rejoindre notre équipe est important pour eux », a-t-il expliqué.
Pour autant, a-t-il précisé à l'image d'Eric Trappier, « il faut regarder d'où on vient. Nous sommes partis en franco-allemand, puis la France et l'Allemagne ont décidé d'associer l'Espagne au projet. On a alors vu que l'entrée des Espagnols dans le programme avait compliqué la redistribution de la charge de travail et nous avons eu des difficultés tout au long de l'année 2022 pour trouver un nouvel accord. Les trois partenaires ont fini par se mettre d'accord pour lancer la phase 1B. Il faut aujourd'hui exécuter cette phase telle qu'elle est aujourd'hui. Il ne faut pas y toucher ». Et après ? « Quand on lancera véritablement le programme, il sera temps de voir le niveau d'ambitions qu'on se donne et les besoins de financement qu'il y aura », a averti Guillaume Faury.
« Le SCAF - si c'est un succès et je pense que ça va être un succès - aura à un moment donné d'autres partenaires. Mais je pense qu'il faut faire chaque chose en son temps et aujourd'hui nous sommes dans la phase 1B », a affirmé le patron d'Airbus.
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