Automobile : Autoliv à Gournay-en-Bray, chronique d’une mort annoncée ?

Spécialisée dans la fabrication d’airbags, la plus grosse des cinq usines françaises de l’équipementier suédois va connaître un nouveau plan social, dont l’ampleur reste incertaine. Peu encline à monter au créneau d'ordinaire, la CFTC se montre alarmiste.
Devenue mono-produit, l'usine, créée dans les années 1960, ne fabrique plus que des airbags.
Devenue mono-produit, l'usine, créée dans les années 1960, ne fabrique plus que des airbags. (Crédits : Autoliv)

« C'est très rare ». Noam Lesueur, délégué CFTC de l'usine Autoliv de Gournay-en-Bray (Seine-Maritime) l'admet volontiers. Son syndicat n'a pas pour habitude de sortir du bois. « Nous avons toujours privilégié le dialogue avec la direction en étant prêts à tout entendre », souligne-t-il auprès de La Tribune. Mais à l'approche de l'annonce d'un nouveau plan social à l'ampleur incertaine, « le cinquième en quinze ans », la coupe est pleine pour les représentants de la centrale chrétienne.

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Celle-ci vient de publier un communiqué alarmiste dans lequel chaque mot a été pesé au trébuchet, de l'aveu même de ses rédacteurs. A l'origine de ce mouvement d'humeur, la crainte de voir délocalisés de nouveaux compartiments de l'activité. Ce ne serait pas une première. Devenu mono-produit au fil des années, l'établissement normand spécialisé dans la fabrication des airbags s'était déjà vu privé d'une partie de ses lignes de production, après le transfert en Roumanie de la fabrication des boucles de ceintures de sécurité.

« L'usine a compté jusqu'à 1.900 salariés avec les intérimaires en période de pointe. Elle a perdu plus du quart de ses effectifs en l'espace de quinze ans. Alors cette nouvelle baisse qui intervient trois ans après la précédente, nous affole un peu », reconnaît Noam Lesueur.

L'usine allemande fermée

Le site pouvait pourtant espérer un répit. En début d'année dernière, la direction Europe d'Autoliv s'était engagée auprès de la CFTC à y maintenir les activités de R&D, ainsi que la fabrication des airbags pour toutes les usines françaises de Renault, Stellantis et Toyota et pour celle de Nissan au Royaume-Uni, au nom de sa politique de « Green Factory ».

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Sauf qu'entretemps l'équipementier américano-suédois - dont le bénéfice net a reculé sensiblement au premier semestre - a décidé d'un vaste plan de réduction d'effectifs, en vue de réduire ses coûts, grevés par « une forte inflation ». Ledit plan a débouché sur l'annonce, en juillet dernier, de la fermeture de l'usine d'Elmshorn en Allemagne et celle envisagée en 2025 de l'usine de Congleton outre-Manche.

La menace se rapproche en France

Le site normand et ses 580 salariés pourraient-ils être menacés, à leur tour ? C'est précisément ce que redoute la Confédération. Les signaux avant-coureurs se multiplient, martèlent ses représentants. Sans toutefois apporter de preuves formelles, ces derniers affirment que la production de « nombreux airbags », pourtant destinés aux usines françaises des constructeurs, est déjà assurée par autres sites européens. Ils font également état de la délocalisation probable d'une partie de la R&D vers « un centre technique en Europe de l'Est », où Autoliv possède plusieurs implantations en Roumanie (10.500 salariés), en Pologne (2.500) et en Hongrie (2.000).

 « Ces réductions d'effectifs ont pour seul but un transfert des activités vers les pays à bas coût de l'Union européenne, ce qui fragilise une fois de plus la pérennité du site, qui à terme devra fermer, comme ont fermé des sites allemands, anglais et suédois », écrivent-ils.

Si les sombres prédictions de la CFTC se confirmaient, elles apparaîtraient comme un nouveau coup dur pour le bassin d'emplois de Gournay-en-Bray. De fait, Autoliv y est l'un des principaux employeurs privés, avec l'usine voisine du groupe Danone. Enclavée à l'Est de la Seine-Maritime aux portes de l'Oise, à l'écart des autoroutes et des grands centres urbains, la commune, qui se présente comme « la capitale du Pays de Bray », affiche un taux de chômage proche des 8%. Un chiffre supérieur à la moyenne régionale. Il y a quelques jours, ses habitants ont appris la fermeture prochaine du site d'Akwel (79 salariés), un autre équipementier implanté de longue date dans la localité. « C'est une autre confirmation de la crise que traverse l'automobile », commente solidairement Noam Lesueur.

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