Alors que les Franciliens se demandent s'ils pourront circuler dans Paris cet été pendant les JO, le gouvernement veut se montrer d'attaque pour lever ces inquiétudes. La mission a été confiée à Pierre Cunéo, directeur mobilités et transports de Paris 2024 rattaché au COJO (Comité d'Ogranisation des Jeux) qui doit accorder les violons d'une « Équipe de France des transports » constituée des entités publiques et d'une dizaine de marques partenaires (Air Liquide, Toyota, Air France, ADP, la SNCF, RATP...)
Autour de la table, doivent ainsi se coordonner une multitude d'acteurs : les autorités organisatrices des transports (Île-de-France mobilités, RATP, SNCF), les collectivités territoriales et l'Etat. Le tout, régi par un comité réuni toutes les six semaines, présidé par Clément Beaune, ministre des Transports et Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques en France dont l'une des réunions se tenait mardi 19 décembre.
L'enjeu est de taille. Il faudra desservir 40 sites olympiques, avec une affluence pouvant monter jusqu'à 6.000 spectateurs à la minute comme au Stade de France. Que ce soit sur des rails, à pédale ou dans les airs, il faudra transporter plus de 10 millions de spectateurs attendus sur l'ensemble des Jeux, mais aussi les 200.000 accrédités (fédérations, représentants des médias).
A cela s'ajoute la volonté de ce comité d'établir un « plan transport inclusif » pour les personnes à mobilité réduite, tout en privilégiant les solutions bas carbone.
La RATP entièrement mobilisée
Les chantiers ne sont pas tous livrés mais, selon le comité, l'année 2023 a été marquée par d'importants travaux sur les lignes de métro existantes de la capitale. En guise de premier exemple, la RATP a accéléré le prolongement de la ligne 14 jusqu'à l'aéroport d'Orly au sud et Saint-Denis Pleyel au nord. Le RER E sera lui aussi prolongé pour desservir Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne) où se dérouleront les épreuves d'aviron et de canoë-kayak, rappelle le comité.
En attendant la fin des travaux prévue pour juin 2024, le parc des rames de la ligne 14 a été renouvelé. Le but étant d'améliorer la fiabilité ainsi que l'efficacité des lignes desservant les sites olympiques, selon le comité.
« Il y aura une mobilisation humaine sans précédent pour les Jeux olympiques et paralympiques. 19.000 agents opérationnels seront mobilisés chaque jour sur le réseau (manutentionnaires, chauffeurs... ) et 21.000 pendant les Jeux paralympiques durant lesquels le trafic de la rentrée reprend », a déclaré en point presse, Edgar Garçay, directeur délégué aux Jeux olympiques pour la RATP.
Au total, sur la période estivale, ce sont 35.000 agents qui travailleront accompagnés de 2.000 volontaires. Ces agents seront notamment chargés de la gestion des flux sur les sites olympiques (Saint-Denis, parc des Princes...), certaines stations (Châtelet...) mais aussi sur les lignes en tension comme la 8, 9 ou 13. Globalement, la fréquence des trains sera augmentée de 15 %.
« Les besoins sont bien inférieurs aux capacités maximales des lignes. Habituellement, l'affluence se réduit de 30 % en été », a assuré en conférence de presse, Laurent Probst, directeur général d'Île-de-France mobilités.
Mais cette confiance n'est pas partagée par le président de la Fédération nationale d'usagers des transports en Île-de-France (FNAUT), qui considère que les RER B et D, principales dessertes du Stade de France, sont encore « trop fragiles pour s'assurer qu'il n'y ait pas de problèmes pendant les Jeux au vue de l'état vieillissant des lignes » affirmant, par la même occasion, que :
« La grande difficulté sera de concilier les usagers habituels et les visiteurs. Le gouvernement tente d'ailleurs de dissuader les Franciliens de se déplacer pour que l'opération reste gérable », a expliqué Marc Pelissier à La Tribune.
Les usagers habituels ne subiront pas de hausse de tarifs sur leur abonnement Navigo. Pour les visiteurs en revanche, un pass journée à seize euros sera disponible, avec un tarif dégressif à la semaine, plus rentable que le ticket unitaire à 4 euros. Côté bus, le comité a prévu l'augmentation de leur nombre, avec un bus toutes les minutes en sortie du dépôt à Aulnay-sous-Bois et un bus par minute en sortie de village olympique et paralympique.
Les premiers « Jeux cyclables »
En plus des transports en commun, les Jeux souhaitent miser sur les mobilités douces. Le vélo sera au cœur de ces « premiers jeux cyclables ». Un plan vélo a été dévoilé la semaine dernière, dans lequel figuraient 60 kilomètres de voies cyclables, baptisées « Olympistes », reliant les sites intra et extra-muros. Au total, ce sont 415 kilomètres de pistes qui formeront le réseau de la région.
Certains départements sont déjà prêts, à l'image de la Seine-Saint-Denis, terre hôte du village olympique, qui compte 275 kilomètres de pistes déjà aménagées sur le territoire. L'avenue du Président Wilson (Saint-Denis) permettra notamment de relier le Stade de France depuis la porte de la Chapelle.
« La Métropole a financé 140 projets de mobilités douces dans 183 communes, à hauteur de 108 millions d'euros » a affirmé Nicolas Rolland, directeur de l'environnement, de l'eau et du climat pour la Métropole du Grand Paris.
Aussi, 3.000 Vélib' ont été ajoutés au renouvellement de la flotte, portant le nombre total à 15.000 vélos en libre-service. Avec eux, 20.000 places de parking seront mises à disposition autour des sites olympiques.
La voiture bannie
Afin de garantir l'accès aux sites olympiques pour les personnes accréditées, soit les athlètes et les médias, le périphérique parisien aura une voie dédiée aux voitures les transportant. « Nous garantissons une arrivée en moins de 30 minutes sur le site de compétition situé à moins de 10 kilomètres du village olympique », a précisé Amélie Lebourgeois, cheffe de mission Paris 2024 à la Préfecture de Police.
De même que les transports en commun pourront emprunter cette voie, sous réserve de limiter leur nombre d'arrêts afin de ne pas encombrer la circulation, ainsi que les véhicules de secours. Au total, 185 km de voies en région parisienne seront réservées. Comme pour les transports en commun, les organisateurs invitent les Franciliens à privilégier le télétravail ainsi qu'à limiter leur déplacement pendant cette période.
Pour le transport des personnes accréditées, le constructeur Toyota mettra à disposition 2.650 véhicules électrifiés pour l'événement, dont 60 % seront garantis « zéro émission », soit des véhicules électriques ou à hydrogène. Pour cela, EDF prévoit d'installer 800 bornes électriques supplémentaires dans Paris au niveau de la Porte Maillot, du village olympique ainsi que du Bourget. Quatre stations à hydrogène serviront les véhicules : Porte de Saint Cloud, Porte de la Chapelle, Orly et Roissy.
Ce mode de transport sera privilégiée pour le déplacement des personnes à mobilité réduite. En effet, plus de 3.000 à 4.000 personnes en fauteuil sont attendues pour les Jeux olympiques et paralympiques à Paris l'an prochain, pour lesquels 1.000 taxis et 250 navettes garantiront à leur déplacement. Une maigre compensation, alors que les transports en commun sont largement pointés du doigt pour leur absence d'accessibilité.
Autour des sites olympiques, la circulation sera limitée. Seules les voitures ayant une dérogation, à savoir ceux qui travaillent ou vivent à ces endroits pourront circuler.
Moins de difficulté pour la longue distance
En-dehors de l'Ile-de-France, plusieurs villes accueilleront également les Jeux. « Les gares et les aéroports seront les portes d'entrées, la première et la dernière expérience des visiteurs », a souligné le comité. Pour cela, la SNCF a prévu de prioriser les flux pour les délégations ainsi que les médias. Le groupe rappelle également que des billets couplés avec AirFrance grâce au dispositif « Train + Air » permettent d'effectuer 41 liaisons entre Roissy et Orly et les métropoles françaises.
Côté aérien, le groupe Aéroport de Paris (ADP) prévoit une situation très tendue, dans la période la plus intense pour leur trafic avec les départs en vacances.
« Nous ne savons pas encore l'ampleur du trafic donc nous allons nous mettre en capacité maximale avec 100 % des terminaux ouverts pendant quelques mois, c'est historique », a annoncé Renault Duplay, le directeur-adjoint plateforme Roissy-Charles de Gaulles et d'ADP.
Le groupe accueillera par ailleurs 60.000 athlètes accrédités, venus avec plus de 110.000 bagages, dont 17.000 considérés « hors-format ». Pour éviter le risque d'encombrement au moment des retours, ADP a mis en place un système d'enregistrement des bagages directement sur le village olympique. Le groupe a également travaillé sur la fluidification du trafic de passagers au sein de l'aéroport en rajoutant des 50 passages rapides aux frontières extérieures (Parafe) supplémentaires pour cet été.
Le directeur adjoint d'ADP se veut rassurant avant le jour J même s'il reste encore quelques chantiers, comme l'accueil de la ligne 14 à Orly, la formation des équipes ainsi que la préparation d'un plan B en cas de problème. Dans l'ensemble, la SNCF et Air France, habitués aux pics de fréquentation pendant la période estivale, semblent davantage préparés que le reste des transports.
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