Qonto relance la bataille des « pros » avec une offre de paiement fractionné

La fintech spécialisée qui s'adresse aux professionnels et TPE complète son offre de crédit par une facilité de trésorerie. Celle-ci doit permettre à ses clients de régler une facture à 90 jours. Pionnier de ces nouvelles offres en ligne ciblée sur une clientèle longtemps délaissée par les banques traditionnelles, Qonto doit désormais faire face à une forte concurrence, y compris bancaire. Ce qui ne l’empêche pas de réaffirmer son objectif d’un million de clients « pros » d’ici 2025 en Europe, sans négliger son objectif de rentabilité.
Philippine Rougevain-Baville, directrice générale de Qonto France, réaffirme l'objectif de rentabilité du groupe à l'horizon 2025.
Philippine Rougevain-Baville, directrice générale de Qonto France, réaffirme l'objectif de rentabilité du groupe à l'horizon 2025. (Crédits : DR)

Après le « buy now, pay later » (paiement fractionné) pour le consommateur, voici le « pay now, reimburse later » pour les « pros ». En clair, une avance de trésorerie qui permet de payer immédiatement son fournisseur et de... rembourser plus tard. C'est ce que propose la fintech Qonto, une des très rares licornes (startup non cotée, dont la valorisation excède un milliard d'euros) dans le domaine de la finance ciblée sur la clientèle des professionnels (indépendants, artisans, TPE...).

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Cette nouvelle solution, développée en interne, s'appuie sur une licence de services de paiement. Elle vise à proposer aux clients éligibles de Qonto, directement à partir de l'application mobile, une facilité de trésorerie, adossée à une facture, d'un montant maximal de 10.000 euros et remboursable en trois fois sur 30, 60 et 90 jours. Un taux d'intérêt mensuel de 1,17% est appliqué sur cette ligne de crédit accordée par Qonto.

« Près d'une PME ou TPE sur quatre se déclare pessimiste sur son accès au financement. C'est pourquoi nous avons souhaité développer notre offre de financement pour accompagner nos clients, y compris dans leur développement. Et cette nouvelle offre de paiement fractionné complète notre plateforme de financement que nous avons lancé l'an dernier avec plusieurs partenaires, comme Defacto, Silvr, Karmen ou Riverbank », explique Philippine Rougevin-Baville, nouvelle directrice générale de Qonto France.

A ce jour, Qonto a monté quelque 8.000 dossiers de crédit pour 60 millions d'euros d'encours.

Un million de clients en 2025

Qonto, c'est un peu la success story de la néobanque en France. Sa dernière levée de fonds record de 486 millions d'euros en série D a eu lieu en janvier 2022, valorisant alors la société à 4,4 milliards d'euros. C'est l'une des principales fintechs en termes d'effectifs (près de 1.500 salariés), présentes dans quatre pays (France, Allemagne, Italie, Espagne), et qui revendique aujourd'hui 450.000 clients « pros ».

Et c'est évidemment une fintech qui n'hésite pas à faire de la croissance externe, avec le rachat à l'été 2022 de sa concurrente allemande Penta et, plus récemment, de la fintech Regate, qui permettra à la fois de compléter son offre et de lancer une offre spécifique à destination des experts-comptables. Aujourd'hui, Qonto affiche une double ambition à l'horizon 2025 : atteindre un million de clients « pros » sur ses quatre marchés et viser la rentabilité.

La fintech est de fait sur une tendance de croissance rapide, avec une hausse de 50% des revenus en 2023 (les chiffres précis ne sont pas communiqués), et un quasi doublement (+80%) de la clientèle en deux ans.

Simplifier la vie de l'entrepreneur

Qonto , c'est tout d'abord un compte courant professionnel, 100% en ligne, auquel se sont greffés au fil des ans, des outils de gestion financière, dont la facturation électronique, mais aussi des outils de comptabilité, et bien sûr, quatrième brique de l'offre, le financement. Le tout entièrement piloté depuis une application sur un smartphone.

« Le paiement fractionné permet à l'entrepreneur de mieux étaler ses dépenses, d'avoir l'esprit plus tranquille grâce à cette flexibilité », explique Philippine Rougevin-Baville.

C'est toute la stratégie de la fintech : accompagner ses clients dans leur activité, au-delà des seuls produits bancaires, pour lui simplifier la vie quotidienne de l'entreprise au maximum. Une recette qui marche, notamment avec l'explosion ces dernières années de l'auto-entrepreneuriat.

Qonto, comme d'ailleurs sa concurrente Shine, fait figure de pionnier en appliquant ces recettes en plus de tarifs compétitifs et transparents et d'un parcours client à la fois simple et fluide (comme la plupart des néobanques). L'un des cofondateurs, Alexandre Prot, l'a souvent répété. Qonto est une réponse à la faiblesse de l'offre bancaire traditionnelle pour la clientèle des pros, en particulier la nouvelle génération de travailleurs « free lance » : piètre service à la clientèle, tarifs bancaires exorbitants, absence de transparence, produits classiques à peine enrobés d'une mince couche de conseil.

Le réveil des banques

Toutefois, les banques ont vite compris le danger de laisser cette clientèle en devenir filer vers les nouveaux acteurs digitaux. Ainsi, Société Générale a racheté Shine en 2020, alors même que sa filiale Crédit du Nord lançait Prismea, une offre en ligne réservée aux pros. Aujourd'hui, la banque de la Défense souhaite céder Shine, faute de vouloir investir massivement pour atteindre le point mort, d'autant que Bourso Bank, autre filiale en ligne du groupe, a développé une offre « pros » convaincante, et Prismea a fermé ses portes fin 2022.

De son côté, BPCE multiplie les offres de paiement pour cette clientèle, comme le « tap to pay », et la Caisse d'Epargne tente de cibler au mieux cette clientèle d'autoentrepreneurs. BNP Paribas s'appuie sur Hello bank! pour répondre aux besoins des travailleurs indépendants, avec une offre dédiée. Crédit Agricole, lui, a lancé un service en ligne ciblé sur les pros et baptisé du curieux nom Blank (page blanche en anglais, celle que doit écrire le créateur d'une entreprise). Une initiative issue de la structure d'incubation du groupe, La Fabrique by CA, qui complète la plateforme Propulse by CA (ex. JeSuisEntrepreneur) pour aider à la création d'entreprise. Avec 40.000 clients à ce jour, Blank est plutôt une réussite grâce notamment à son adoption par le réseau d'agences.

Les « néobanques » plus ciblées sur les particuliers, développent également leur offre « pros », comme N26, et les banques numériques qui marchent au Royaume-Uni sont celles qui ont su bâtir un vrai fonds de commerce sur les pros, comme Monzo ou Starling Bank. Même les éditeurs de logiciels comptables ou les fintechs très liées à la « compta » commencent à s'intéresser au compte bancaire. C'est le cas de Pennylane, autre licorne, spécialisée dans les solutions pour les experts-comptables, et qui souhaite muscler son offre pour les entreprises dans le domaine du crédit et du paiement.

« Les pros ont été longtemps délaissés par les banques et il existe maintenant beaucoup de nouvelles solutions. C'est une bonne chose pour le marché, cela donne plein d'idées et c'est très motivant car cela prouve que nous étions, en tant que précurseur, sur le bon sujet », résume Philippe Rougevin-Baville.

Memo Bank lance un nouveau compte rémunéré

Memo Bank n'est pas une néobanque « pros » comme les autres. Au contraire. Cette banque en ligne vise une clientèle de PME déjà bien établies d'un chiffre d'affaires compris entre 5 et 10 millions d'euros. Doté d'un agrément bancaire depuis 2020, Memo Bank propose les trois métiers de la banque, le compte courant, le crédit et le dépôt.

« Nous sortons à la demande pratiquement un nouveau produit toutes les deux semaines depuis trois ans », résume Jean-Daniel Guyot, président du directoire de Memo Bank.

Il s'agit cette fois-ci d'un compte rémunéré à 80% du taux de référence de l'euro au jour le jour. Soit une rémunération de plus de 3% actuellement. « Nous avons désormais la capacité de nous positionner comme le compte principal d'une PME, en couvrant désormais 95% de ses besoins. Autrement dit, nous sommes désormais perçus comme pertinent pour remplacer une banque traditionnelle », précise le dirigeant.

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Commentaire 1
à écrit le 26/03/2024 à 13:55
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