Avenir de l'agriculture : coup d'envoi du cycle de négociations pour la Loi d'orientation agricole

Le gouvernement, ainsi que les différents acteurs du milieu agricole, se sont réunis ce matin pour entamer les discussions autour d'une Loi d'orientation agricole. Objectif : répondre au problème du renouvellement des générations chez les agriculteurs, et définir des axes communs autour de la transition écologique. La concertation a débuté ce mercredi 7 décembre et réuni une centaine de parties prenantes, chacune avec des propositions bien concrètes. Retour sur les premières méthodes annoncées par le gouvernement et sur les réactions de certains acteurs présents, entre optimisme et frustration.
Le gouvernement et les représentants des filières agricoles, syndicats, chercheurs, associations... en tout, une centaine d'acteurs du monde agricole, ont pris part aux premières négociations pour l'établissement de cette loi d'orientation agricole. (Photo d'illustration : un agriculteur devant son champ près de Molac, en Bretagne, le 1er septembre 2015.)
Le gouvernement et les représentants des filières agricoles, syndicats, chercheurs, associations... en tout, une centaine d'acteurs du monde agricole, ont pris part aux premières négociations pour l'établissement de cette loi d'orientation agricole. (Photo d'illustration : un agriculteur devant son champ près de Molac, en Bretagne, le 1er septembre 2015.) (Crédits : Reuters)

Positif mais assez flou. C'était le sentiment général vécu par les parties prenantes, en discussion ce matin avec le gouvernement pour le projet de Loi d'orientation agricole (LOA). Cette loi, voulue par le gouvernement lui-même, devrait répondre aux problématiques de la transition écologique dans le milieu agricole mais surtout au manque de renouvellement des générations.

Un cycle de concertations jusqu'en avril, un texte de loi fin juin

Cette réunion permettait de fixer les premières échéances des concertations, prévues entre aujourd'hui et avril 2023. Le texte de loi devrait, quant à lui, être proposé fin juin. Cette loi viendrait s'ajouter aux lignes directrices de la politique agricole commune (PAC), déjà établie pour 2023.

« Il faudra retravailler le plan stratégique national de la PAC pour être mis en cohérence avec la LOA, sinon il va y avoir des blocages », remarque Clotilde Bato, co-présidente du Collectif Nourrir (ex-Pour une autre PAC), présidente de l'association Notre affaire à tous, et déléguée générale de SOL.

À l'issue de ce premier entretien, ouvert par le discours d'exploitants agricoles en difficulté, quatre piliers ont été définis : l'installation, la transmission, la formation, la transition climatique.

« D'ici à 10 ans, un agriculteur sur trois sera en âge de partir à la retraite. Il nous faut donc penser, planifier et réussir cette transition, condition indispensable pour garantir l'avenir de l'agriculture française et maintenir nos capacités de production », a indiqué Marc Fesneau, le ministre de l'agriculture, dans un communiqué de presse paru en fin de journée.

Ce premier échange était surtout « un lancement très politique de ce processus », a indiqué Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne.

De l'espoir et des doutes à l'issue de ce premier échange

Pour définir les enjeux de chaque grand pilier, les parties prenantes ont été réparties dans trois groupes d'études : orientation et formation, installation et transmission, adaptation et transition face au réchauffement climatique.

Représentants des filières agricoles, syndicats, chercheurs, associations... une centaine d'acteurs du monde agricole ont pris part aux négociations pour l'établissement de cette loi. « Il y a une large ouverture à la concertation, donc c'est très positif », se réjouit Clotilde Bato. « Il y a une vraie ambition forte, la grande force c'est d'arriver à un consensus », souligne Sébastien Windsor, président des chambres d'agriculture. L'enjeu désormais, est de s'accorder sur un fil conducteur commun.

« Il ne faut pas de statu quo. Il va falloir faire des choix, il faut converger collectivement et accepter que certains modèles peuvent répondre aux enjeux environnementaux et sociaux et pas d'autres. Il ne faut pas que l'on se base sur le plus petit dénominateur commun, sinon cette loi va être vidée de son innovation », s'inquiète Clotilde Bato.

La loi d'orientation agricole a également été nommée pacte et loi d'orientation et d'avenir agricoles (PLOAA). Un changement qui n'est pas anodin pour Terre de Liens : «Certaines propositions seront avancées par la loi et d'autres non, on ne sait pas si ça veut dire quelque chose, mais on espère que ce pacte sera à la hauteur des ambitions affichées. » Constat également mitigé pour la Confédération paysanne pour qui « les questions qui sont posées sont les bonnes, mais il n'est pas certain qu'en six mois, on arrive à trouver des solutions à tout ».

La transmission aux nouvelles générations, première inquiétude du gouvernement

C'est l'un des points clés de cette future loi. Le monde agricole n'attire plus, et l'installation des jeunes agriculteurs est souvent un parcours du combattant. Dans un papier publié sur leur site, l'Institute for Climate Economics (I4CE) parle de cette transmission générationnelle comme « d'un moment charnière pour les agriculteurs et pour le climat » à l'heure où « 55% des agriculteurs ont plus de 50 ans. »

Une réalité qui a alerté le gouvernement, bien conscient de l'importance de ce renouvellement de génération dans le maintien de la souveraineté alimentaire du pays et dans la cohésion des territoires. « Quand une exploitation tombe, si on ne sait pas bien la reprendre, c'est tout un territoire qui parfois se fragilise et se détricote », avait souligné Emmanuel Macron, en septembre 2022.

Pour favoriser l'attractivité du monde agricole, il faut se pencher sur la transition sociale. « Les jeunes ont besoin d'une garantie sur les revenus mais aussi une garantie à travailler dignement et dans le bien-être », explique Clotilde Bato. Des garanties d'un confort au travail certes, qui doit s'accompagner d'une facilitation à l'accès aux terres agricoles pour les nouvelles générations.

Ces questions d'accès au foncier restent pour l'heure floues dans cette loi, le gouvernement ayant annoncé ne pas vouloir faire une loi foncière. « Il va falloir des règlementations sur le foncier pour le partage et l'accès aux terres. C'est le principal écueil à lever dans les prochaines semaines avec le gouvernement », s'inquiète Nicolas Girod. L'objectif est aussi d'attirer les vocations au-delà du cercle familial, souvent premier moteur de la transmission des fermes de générations en générations.

Appeler la population à participer à l'écriture de cette loi

Afin de garantir l'établissement d'une loi qui concerne toutes les tranches de la population, le gouvernement a décidé d'impliquer un maximum de personnes dans ces débats.

Pour le secteur agricole, les décisions ne resteront pas au niveau national mais s'étendront sur l'ensemble du territoire. Ce sont les chambres d'agriculture qui se chargent de prendre ce rôle de relai au niveau régional. « Nous animerons une série réunions pour chaque région autour des piliers établis avec le gouvernement. L'idée, c'est d'aller chercher des pépites, des bonnes expériences au niveau local qui pourront être transposées dans d'autres régions. On va définir ensemble les enjeux de l'agriculture, puis les outils et les solutions pour répondre à ces enjeux et on fera remonter au niveau national », s'est félicité Sébastien Windsor.

Mais le secteur agricole n'est pas le seul mobilisé par le gouvernement. Dès janvier, une consultation sera ouverte sur Internet à tous afin de prendre en compte les attentes du grand public. Cette concertation sera déclinée sous forme d'ateliers-débats « dans au moins un établissement d'enseignement technique agricole ou un établissement d'enseignement supérieur agronomique, vétérinaire ou du paysage », a indiqué le ministère dans son communiqué.

Si nous sommes à la genèse de cette loi pour l'orientation agricole, il est clair que le calendrier serré des concertations laisse peu de doute quant à l'urgence de ces réflexions. La question du financement sera également au cœur des débats, à l'heure où l'agriculture biologique est touchée de plein fouet par l'inflation.

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