"Amazon n'impacte pas l'activité de nos centres commerciaux" (La foncière Frey)

La foncière Frey développe et exploite une vingtaine de centres commerciaux à ciel ouvert. Pour maintenir leur attractivité face au commerce en ligne, elle aménage sur ses parkings des infrastructures dédiées au click and collect et revendique des loyers bas. Antoine Frey, son président-directeur général, défend un modèle économique "frugal" qui ne craint pas la concurrence d'Amazon.
Le groupe Frey a inauguré en mars 2021 un centre commercial en plein air sur 65.000 mètres carrés en périphérie de Strasbourg.
Le groupe Frey a inauguré en mars 2021 un centre commercial en plein air sur 65.000 mètres carrés en périphérie de Strasbourg. (Crédits : Frey)

LA TRIBUNE - Face à la montée en puissance du commerce en ligne et malgré la crise sanitaire, vous avez continué de lancer de nouveaux projets en 2021. La conjoncture n'est-elle pas devenue délicate pour développer des centres commerciaux ?

ANTOINE FREY - L'e-commerce a connu une accélération de son développement grâce à la pandémie. Les commerces traditionnels ont dû fermer pendant un certain temps. Mais cette accélération ne s'est pas faite aux dépens du commerce classique. Nous exploitons une vingtaine de sites en France, en Espagne et au Portugal. Nos enseignes ont affiché des croissances spectaculaires de leur chiffre d'affaires en 2021, par rapport à l'année de référence en 2019. L'activité est en hausse de 13% sur les neuf premiers mois. Nos flux de fréquentation ont augmenté de 3%.

Vous avez ouvert deux Shopping Promenade, votre concept de centres commerciaux en plein air, à Strasbourg et à Claye-Souilly en 2021. Le marché est-il encore demandeur de nouvelles installations ?

Strasbourg a été livré en pleine crise du Covid. Le site est rempli à 100%. Un tiers des enseignes présentes n'étaient jamais venues en retail park. Les locataires ne supportent plus les centres commerciaux traditionnels et les loyers qu'elles doivent y verser. Chez nous, le taux d'effort est moitié moins élevé.

Comment pouvez-vous en attester ?

Le taux d'effort est notre indicateur qui désigne le montant du loyer, rapporté au chiffre d'affaires des commerçants. Il s'élève à 8,8 %. Il n'y a pas seulement le chauffage et la climatisation qui coûtent moins cher dans nos centres en plein air. Nous ne sommes pas soumis aux mêmes classifications que les centres commerciaux classiques, en termes d'incendie par exemple. Nous n'avons pas besoin de construire des toits et des verrières au-dessus des parties communes. Nos services d'ingénierie ont un savoir-faire qui permet de construire moins cher.

Comment accompagnez-vous vos commerçants dans la numérisation de leurs activités ?

Nous accompagnons tous ceux qui pratiquent le click and collect. Nos sites sont équipés de pistes dédiées. Ce sont des places de parking bien identifiées. Certaines sont même réservées aux magasins qui vendent les produits les plus pondéreux, comme Boulanger.

Qu'est-ce qui attire les clients dans vos centres commerciaux ?

Nous offrons aux consommateurs une fonctionnalité extrême. On se gare facilement. Les espaces publics sont parsemés d'aires de jeux pour les enfants. Des animations sont organisées pour créer du lien social.

Vous revendiquez de multiples labels de responsabilité sociétale et de respect de l'environnement. Une telle orientation est-elle compatible avec l'aménagement de centres commerciaux, nécessairement consommatrice de foncier ?

Notre activité, historiquement, a consommé beaucoup de foncier. Des équipements ont été conçus en périphérie des agglomérations à une époque où l'on se souciait peu de l'artificialisation des sols. Aujourd'hui, les élus n'acceptent plus d'artificialiser le moindre mètre carré. Pour nous, c'est une opportunité.

Une partie de notre activité consiste à moderniser des équipements existants, comme ce fut le cas à Strasbourg. En tant que partenaire aménageur de l'Eurométropole, nous répondons à plusieurs problématiques de cette zone commerciale vieillissante, sur 150 hectares. Il s'agit notamment de réaménager toutes les voiries afin de dissocier les flux de véhicules pendulaires des flux de notre clientèle.

Nous sommes la première foncière en France à avoir adopté le statut d'entreprise à mission, ce qui consiste à remettre le commerce au service de l'intérêt collectif. Notre savoir-faire permet aussi de racheter des sites existants, et de les faire performer.

Le commerce traditionnel est attaqué de toutes parts, par des géants en ligne mais aussi par des initiatives locales, mais vous ne semblez pas sentir la menace...

Quand Amazon annonce l'ouverture d'une nouvelle implantation en France, il n'y a aucun impact direct sur notre activité. Amazon n'attend pas l'ouverture d'une plateforme régionale pour servir les zones de chalandise qu'elle adresse. Quant aux initiatives locales, elles sont intéressantes, mais nous ne connaissons pas leurs indicateurs économiques. Pour trouver un modèle viable, le commerce en ligne doit atteindre une taille stratosphérique. Amazon ne gagne pas de l'argent en vendant des produits, mais grâce au cloud et à ses autres activités. 90 % des produits physiques sont encore achetés en magasin.

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Commentaire 1
à écrit le 03/02/2022 à 11:10
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"et revendique des loyers bas" Tout simplement.

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