Face au changement climatique, « il faut développer la culture du risque » (Jean-Philippe Dogneton, Macif)

D'une magnitude de 5,3 à 5,8, la plus forte secousse ressentie en France depuis le début des années 2000 s'est produite le 16 juin. Plus de deux mois après ce tremblement de terre qui a secoué l'Ouest de la France, l’assureur mutualiste lance l'opération 5 jours-5 communes à compter de ce lundi 28 août. Objectif, apporter des réponses aux sinistrés, pour certains encore relogés, et mettre l'accent sur la prévention, afin de limiter l'impact des risques climatiques, alors que ceux-ci sont voués à s'accroître dans les années à venir, explique son directeur général, Jean-Philippe Dogneton à La Tribune.
Pauline Chateau
Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif
Jean-Philippe Dogneton, directeur général de la Macif (Crédits : Macif)

LA TRIBUNE - Mobilisant 9 personnes de la Macif, l'opération 5 jours-5 communes se déroule du 28 août au 1er septembre en Charente-Maritime et dans les Deux-Sèvres. La permanence s'arrêtera dans cinq communes reconnues en état de catastrophe naturelle. Est-elle la première de ce genre organisée par votre groupe ?

JEAN-PHILIPPE DOGNETON - Nous sommes toujours en proximité de nos sociétaires et nous adaptons notre présence en fonction des situations. Généralement, nous appelons les sinistrés, les délégués sont au contact des sociétaires, les gestionnaires aussi, et nous ouvrons parfois des points d'accueil dans les mairies. Dans ce cas précis, nous avons retenu une formule itinérante : cette initiative illustre la volonté de la Macif de maintenir le lien humain indispensable pour rassurer et accompagner nos sociétaires victimes au-delà de la déclaration de sinistre. C'est une forme de relation augmentée et plus forte dans le contact avec le sociétaire.

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Les sinistres d'origine climatique se généralisent pourtant depuis de nombreuses années déjà. Pour quelle raison cette opération intervient-elle seulement maintenant ?

La mutuelle veille le plus souvent possible à aller au contact direct des victimes. Ce n'est pas toujours facile lorsque l'événement concerne une très grande population. Dans le cas présent, le tremblement de terre est concentré sur un espace limité. Par ailleurs, les tremblements de terre, il n'y en a pas tous les matins. C'est un événement que les gens ont vécu dans leur chair. Sur l'échelle de Richter, l'intensité du séisme a été mesurée à plus de 5.

C'est tout à fait significatif. Demain, nous allons être confrontés à des sinistres climatiques de plus en plus violents et ciblés. On pourrait à l'avenir parler de violence climatique, comme une nouvelle forme de violence qui va affecter la société.

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En outre, ce que nous voulions montrer à travers cette opération, c'est que ce sinistre n'est pas tombé dans l'oubli. Avec l'actualité, un sujet chasse l'autre. Ce qui s'est passé le 16 juin dernier, les gens ne l'ont plus vraiment en mémoire. Or, nous avons été confrontés à un événement majeur. Nous avons une charge globale pour le marché qui doit être, à peu près, de 300 millions d'euros. Côté Macif, nous avons comptabilisé plus de 2.000 sinistres qui ont touché directement nos sociétaires.

Quel est l'objectif poursuivi à travers cette opération ?

Avec un peu de recul, suite aux premières missions d'expertise menées et les arrêtés de catastrophe naturelle, notre objectif est d'aller au contact des communes et surtout des sinistrés, afin d'apporter des réponses : nous ferons de la pédagogie, et donnerons toutes les explications techniques attendues pour rassurer nos sociétaires. Je pense que ce n'est pas facile, lorsqu'on est sinistré, de comprendre comment fonctionne un arrêté de catastrophe naturelle, une expertise, comment on va être relogé, s'il s'agit d'une reconstruction ou d'une réparation, dans quels délais, si je peux bénéficier d'un soutien...

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Au-delà des réponses apportées aux sinistrés, quelle est l'ambition de la Macif ?

Il faut développer la culture du risque. C'est indispensable pour sauver des vies. Pour ce faire, il convient de poser les bons axes de prévention, qui sont souvent simples, mais pas toujours exécutés. Il faut également soutenir plus, accompagner davantage. C'est d'autant plus important que l'on sait que les événements climatiques vont, hélas, se développer sur la période à venir. Depuis le début de l'année 2023, nous avons ouvert 50.000 sinistres sur des grêles, sur des coups de vent, etc.

Comment développer la culture du risque, et ce, bien avant l'arrivée du sinistre ?

2500 à 3000 communes concentrent 60% de la charge climatique. Si on devait prioriser l'action, elle devrait s'axer sur ces communes. J'ai toujours cette idée qu'il faut avoir une vision globale certes, mais surtout agir en local. Le local doit primer, car chaque risque est différent.

En outre, les périls climatiques sont très variés et d'intensité inégale (grêle, vent, submersion marine, sécheresse...). Ils peuvent être aggravés lorsque la nature d'un événement tombe dans l'oubli, c'est ce qu'il s'est passé avec la tempête Xynthia en 2010.

Enfin, il convient d'être très pratico-pratique : si vous habitez dans une zone où existe le risque de submersion marine, prenez le temps de lire le plan de prévention des risques de votre commune. Ce sont autant de conseils de bon sens, mais dans les faits, ils ne sont pas mis en œuvre. C'est ça la culture du risque : qu'est-ce qui peut arriver ? Et qu'est-ce qui peut arriver d'un péril dont j'ai oublié l'existence ? Nous devons apprendre à vivre avec le risque, cela devrait être naturel, et il n'y a rien d'anxiogène.

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Au mois de mai dernier, les ministres Bruno Le Maire et Christophe Béchu ont lancé une mission sur l'assurabilité des risques climatiques, dont les conclusions doivent être publiées d'ici la fin de l'année. Qu'en attendez-vous ?

Je suis un défenseur forcené du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Plus largement, et bien au-delà du régime des catastrophes naturelles, je plaide pour un vieux principe d'assurance, celui de la mutualisation. Mutualiser c'est accepter la vie en collectivité, c'est accepter de faire société, c'est enfin accepter de réguler les situations qui menacent la solidarité. La tendance à la segmentation, en particulier mise en œuvre par les nouveaux entrants, me heurte, et n'apporte pas les réponses aux défis que nous devons affronter.

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Pour revenir au régime des catastrophes naturelles, je le trouve très vertueux, et je souhaite qu'il perdure en le modifiant le moins possible, mais en tenant compte de l'exigence de prévention et de la véritable valeur du risque.

Un assuré pourrait vous rétorquer que les risques climatiques sont difficiles à anticiper. Ils devraient certes s'accélérer, mais on peine aujourd'hui à évaluer quelle sera leur ampleur, ce qui complexifie la tâche pour évaluer la hausse des cotisations. Que répondez-vous ?

Il suffit de regarder la courbe tendancielle. Le constat est assez évident : la charge des
sinistres augmente d'année en année, et cette tendance s'accélère et dans ce contexte,
l'assureur prend, bien entendu, sa part de risque. Je pense que si on l'explique bien, la hausse des cotisations sera acceptée, parce que l'alternative serait douloureuse : on protège moins, voire on ne protège plus. C'est déjà le cas dans certains pays. Jamais je ne me résoudrai à cela.

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Pauline Chateau

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Commentaires 14
à écrit le 17/09/2023 à 5:56
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Il y a confusion entre météo et climat. Il suffit de relire Leroy-Ladurie pour se rappeler que les événements météo intenses et destructeurs du passé ont souvent été bien plus dramatiques. Quant aux prévisions du futur faites par des modèles numériqu...

à écrit le 10/09/2023 à 9:41
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Il y a confusion entre météo et climat. Il suffit de relire Leroy-Ladurie pour se rappeler que les événements météo intenses et destructeurs du passé ont souvent été bien plus dramatiques. Quant aux prévisions du futur faites par des modèles numériqu...

à écrit le 10/09/2023 à 9:40
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Attention : un tremblement de terre n'a rien à voir avec le climat. Cet article laisse planer le doute....

à écrit le 07/09/2023 à 18:44
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Il y a confusion entre météo et climat. Il suffit de relire Leroy-Ladurie pour se rappeler que les événements météo intenses et destructeurs du passé ont souvent été bien plus dramatiques. Quant aux prévisions du futur faites par des modèles numériqu...

à écrit le 07/09/2023 à 18:43
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Attention : un tremblement de terre n'a rien à voir avec le climat. Cet article laisse planer le doute...

à écrit le 01/09/2023 à 9:40
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Il y a confusion entre météo et climat. Il suffit de relire Leroy-Ladurie pour se rappeler que les événements météo intenses et destructeurs du passé ont souvent été bien plus dramatiques. Quant aux prévisions du futur faites par des modèles numériqu...

à écrit le 01/09/2023 à 9:39
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Attention : un tremblement de terre n'a rien à voir avec le climat. Cet article laisse planer le doute....

à écrit le 29/08/2023 à 17:22
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Il y a confusion entre météo et climat. Il suffit de relire Leroy-Ladurie pour se rappeler que les événements météo intenses et destructeurs du passé ont souvent été bien plus dramatiques. Quant aux prévisions du futur faites par des modèles numériqu...

à écrit le 29/08/2023 à 17:16
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Attention : un tremblement de terre n'a rien à voir avec le climat. Cet article laisse planer le doute....

à écrit le 28/08/2023 à 16:09
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Face au changement climatique, il faut individuellement : "Demerden sie sicht"! Autre chose? Non, parce que c'est utopique.

à écrit le 28/08/2023 à 12:30
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Vous imaginez un monde sans OMS, sans OTAN, sans GIEC, sans ..UE? Pas de pandémie, pas de guerre, pas d’urgence climatique, on s’ennuierait à mourir!..

à écrit le 28/08/2023 à 9:53
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Que l'on mette des scientifiques face à face sur ce réchauffement et que l'on compare. Pour moi en l'absence de consensus scientifique je passe. Renseignez vous dans des bouquins je démarre actuellement celui d'Emmanuel Le Roy Ladurie - Histoire du c...

à écrit le 28/08/2023 à 9:00
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La culture du risque s'apprend sur le tas et non pas en voulant nous fourguer son attirail publicitaire ! ;-)

à écrit le 28/08/2023 à 8:37
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Changement climatique-tremblement de terre ? Hum je suis pas sûr du tout les les gars hein... scabreux.

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