Adieu Stelia Aerospace, bonjour Airbus Atlantic

La NewCo française, issue du rapprochement des activités d'aérostructures d'Airbus et de celles de sa filiale Stelia, continue d'avancer avec l'annonce de son nom officiel : Airbus Atlantic. Le projet entame désormais sa dernière ligne droite afin de devenir opérationnel le 1er janvier 2022. Seule ombre au tableau, Airbus fait face à une forte opposition pour la mise en place d'un projet similaire en Allemagne chez Premium Aerotec, sistership allemande de Stelia Aerospace.
Léo Barnier
Airbus Atlantic prend place aux côtés d'Airbus Defence and Space et Airbus Helicopters au sein du groupe.
Airbus Atlantic prend place aux côtés d'Airbus Defence and Space et Airbus Helicopters au sein du groupe. (Crédits : Benoit Tessier)

Après une période d'accalmie cet été, la refonte de l'activité d'aérostructures du groupe Airbus est repartie de plus belle en cette rentrée. Le rapprochement entre les établissements de l'avionneur européen à Nantes et Saint-Nazaire et ceux de sa filiale Stelia Aerospace vient de franchir un jalon symbolique, à l'occasion d'un comité social et économique central (CSEC) extraordinaire le 20 septembre. Il s'agit de l'annonce du nom de la nouvelle compagnie, désignée jusqu'ici « NewCo », qui résultera de cette fusion

Après consultation des salariés, celle-ci s'appellera Airbus Atlantic, référence directe à son positionnement géographique qui n'en déplaise aux salariés de Stelia Aerospace à Méaulte (Hauts-de-France) ou en Tunisie. Elle deviendra société de rang 1 du groupe, aux côtés d'Airbus Defence and Space et d'Airbus Helicopters.

Le processus d'information-consultation des organisations syndicales est pour l'instant toujours en cours dans les différentes entités concernées. Il doit s'achever entre le 21 et le 25 octobre par la consultation successive des comités de groupe européen et français, ainsi que des CSE central et d'établissements concernés. La future organisation de cet ensemble, qui pèsera cinq milliards d'euros de chiffres d'affaires pour un effectif de 12 000 salariés (dont plus de 9 000 en France), commence néanmoins à se dessiner. L'objectif d'Airbus est que celle-ci soit opérationnelle au 1er janvier 2022.

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Cédric Gautier aux manettes

Sans surprise, Airbus Atlantic sera dirigée par Cédric Gautier, l'actuel PDG de Stelia Aerospace. Celui-ci a commencé à rassembler son équipe, dont la composition doit être dévoilée prochainement. Elle devrait rassembler aussi bien des dirigeants de Stelia Aerospace que des sites d'Airbus de Nantes et Saint-Nazaire.

Ce choix de Cédric Gautier à la tête d'Airbus Atlantic doit permettre d'assurer une certaine continuité avec Stelia Aerospace. Cette dernière est certes filiale à 100 % d'Airbus, mais elle dispose d'une certaine autonomie et surtout d'une activité propre avec d'autres clients que l'avionneur européen. Elle fournit ainsi des aérostructures pour les avions d'affaires de Bombardier, de Dassault Aviation, les turbopropulseurs régionaux d'ATR et de Bombardier, mais aussi les appareils commerciaux de Boeing. Stelia Aerospace dispose également d'activités au profit d'appareils militaires (Dassault Aviation, Lockheed Martin, Embraer) et d'hélicoptères (Leonardo) en dehors du groupe Airbus.

Cette activité vers des clients tiers va se poursuivre, même si la perspective de conserver des contrats Boeing en s'appelant Airbus semble compliquée. La grande majorité de la production devrait tout de même rester en interne, Airbus représentant déjà aujourd'hui 80 à 85 % du chiffre d'affaires de Stelia Aerospace.

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Transformation en douceur

Pour l'instant, cette transformation de l'activité se passe sans heurts en France, où les salariés de Stelia Aerospace se réjouissent de réintégrer pleinement le groupe après plus d'une décennie d'incertitudes. En 2009, après avoir échoué à vendre ses usines d'aérostructures comme le prévoyait le plan de restructuration Power 8 lancé deux ans plus tôt, Airbus avait placé ces activités dans deux filiales détenues à 100 % : Premium Aerotec en Allemagne et Aerolia en France, devenue Stelia Aerospace à l'issue de sa fusion en 2015 avec Sogerma. Malgré des discussions avec Latécoère au début des années 2010, Stelia Aerospace n'est finalement jamais sortie du giron de l'avionneur et redevient aujourd'hui l'une des activités centrales du groupe. De l'autre côté, les sites Airbus de Nantes et Saint-Nazaire sont également rassurés de conserver le nom de l'avionneur européen.

Les organisations syndicales ont également salué l'engagement de la direction à mettre à harmoniser les statuts sociaux des salariés venus de Stelia avec ceux du reste d'Airbus. Une démarche largement facilitée par la refonte des accords salariaux actuellement en cours au sein du groupe, qui a pour objectif d'arriver à la définition d'un statut commun en 2023, en parallèle de la réforme de la convention collective de la métallurgie.

Toujours côté syndical, on note la bonne volonté affichée par la direction quant à la préservation de l'ensemble des sites actuels et une répartition équilibrée de la charge de travail, des technologies et des investissements. Les activités "sièges" et "cabines" sont également pérennisées en dépit des difficultés actuelles dues à la crise du transport aérien.

Enfin les perspectives d'investissement apparaissent encourageantes pour le développement de l'activité et la poursuite de la modernisation des moyens de production. Dans le cadre de la mise en place d'Airbus Atlantic, le groupe pourrait investir un montant de l'ordre du milliard d'euros pour accélérer la digitalisation et la transition vers l'usine du futur. Une somme équivalente pourrait être aussi débloquée en Allemagne.

Résistances allemandes

La partie est pourtant beaucoup plus compliquée outre-Rhin, où Airbus mène une démarche parallèle chez son autre filiale d'aérostructures, Premium Aerotec. Au contraire de Stelia Aerospace, qui a fait de nombreux efforts ces dernières années pour baisser ses coûts et améliorer sa compétitivité - notamment en vendant ou en délocalisant ses activités à faible valeur ajoutée - l'entreprise allemande serait aujourd'hui, selon Airbus, entre 25% et 30% plus chère que ses concurrents.

Dans le cadre de la refonte de ses activités d'aérostructures, la direction d'Airbus souhaite donc se séparer des activités de Premium Aerotec consacrées aux pièces primaires, peu rentables. Une décision qui pourrait impacter un millier d'emplois sur les 2 500 que compte la filiale allemande. D'où une levée de boucliers de la part des salariés allemands, menée par le puissant syndicat IG Metall.

Cette opposition entre syndicat et direction en Allemagne ne semble pas parasiter pour l'instant l'avancée du projet français. Les calendriers des NewCo française et allemande sont théoriquement identiques avec une mise en place le 1er janvier 2022, mais force est de constater que le niveau d'avancement est bien différent. La question d'une décorrélation ou d'un glissement des deux échéanciers pourrait donc finir par se poser, même si cette perspective semble encore peu probable aujourd'hui. Pour un syndicaliste français, la possibilité de trouver une solution pour dénouer le problème côté allemand reste tout à fait envisageable.

Léo Barnier

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Commentaire 1
à écrit le 21/09/2021 à 7:43
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Et tout ça va finir ... aux mains des Allemands, comme decidé sous Mitterrand, Macron ayant été désigné comme liquidateur en dernier ressort, ce qu'il a accepté bien volontiers.

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