L'Allemagne va-t-elle devenir le champion des carburants synthétiques pour l'aviation en Europe ? Après une action politique forte à Bruxelles pour les intégrer plus fortement au sein du règlement européen RefuelEU Aviation sur les carburants d'aviation durables (SAF), c'est au tour des industriels de prendre le relais. Et pas des moindres. Ce jeudi, Lufthansa, Airbus, MTU Aero Engines, l'aéroport de Munich et le DLR (Centre de recherche allemand pour l'aéronautique et l'aérospatiale, équivalent allemand de l'Onera en France) ont annoncé leur volonté de s'associer pour le développement des carburants synthétiques.
Les cinq partenaires ont signé une lettre d'intention (LoI) à Berlin en vue « d'une vaste collaboration de recherche » sur les carburants d'aviation durables. Plus précisément, ce travail commun portera les carburants du type « Power-to-Liquid » (PtL), c'est-à-dire des carburants synthétiques produits à partir d'hydrogène provenant de l'électrolyse de l'eau et du monoxyde de carbone issu de gaz carbonique prélevé dans l'air ou dans des sites industriels. L'objectif est ainsi « d'accélérer la sélection de la technologie, l'introduction sur le marché et la mise à l'échelle industrielle des carburants d'aviation PtL en Allemagne ».
Montée en maturité
Bien que le carburant synthétique ne soit pas nouveau avec l'invention du procédé de Fischer-Tropsch dans les années 1920 - et son utilisation par l'Allemagne pendant la Seconde guerre mondiale - cette solution est moins mature technologiquement que les biocarburants. Mais contrairement à ces derniers, elle évite les conflits d'usage avec le secteur alimentaire et offre surtout des perspectives de production à grande échelle sans être limitée par la disponibilité de la biomasse.
« L'un des objectifs est la compatibilité future de l'aviation avec le climat. Pour y parvenir, il est indispensable de disposer de carburants aéronautiques durables en grandes quantités. C'est pourquoi nous développons des processus de production qui permettent un approvisionnement économique de l'aviation et nous optimisons constamment le SAF », a déclaré le professeur Meike Jipp, membre du conseil d'administration de la division Énergie et transports du DLR, dans un communiqué.
Cette collaboration doit ainsi prendre en compte l'ensemble de la chaîne de valeur, depuis la production jusqu'à l'utilisation des PtL en exploitation ou encore leur impact sur la maintenance des moteurs. Il faudra prendre en compte l'absence d'aromatiques, présents dans le kérosène et qui contribue à l'étanchéité des circuits de carburant et la lubrification du moteur et des pompes. Enfin, elle devra évaluer les impacts écologiques, avec les effets CO2 (réduction des émissions sur l'ensemble du cycle de vie) et non CO2 (traînées de condensation, émissions de Nox).
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