Reconversion, aménagement de fin de carrière...Safran mise sur l'emploi senior

Réforme des retraites ou pas, Safran veut conserver ses salariés seniors et préparer le renouvellement des générations. Il vient de signer un accord à l'unanimité avec les syndicats pour aménager les parcours de fin de carrière et adapter les postes si nécessaires.
Léo Barnier
Safran veut embaucher 10 % de séniors en France cette année.
Safran veut embaucher 10 % de séniors en France cette année. (Crédits : GONZALO FUENTES)

Alors que les enjeux sur l'emploi des seniors pourraient bien devenir encore plus pressants avec le projet gouvernemental de réforme des retraites, le groupe Safran vient, lui, de conclure un accord pour renforcer l'emploi de ses « salariés expérimentés ». Signé mardi par l'ensemble des syndicats représentatifs du groupe, à savoir la CFDT, la CFE-CGC, la CGT et FO, il porte un ensemble de mesures pour la période 2023-2025.

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La première consiste en un engagement chiffré sur l'emploi des plus de 50 ans. Safran devra ainsi recruter au moins 10% de salariés expérimentés en CDI en France sur l'ensemble de la durée de l'accord. C'est 1,3 point de plus que lors des trois derniers exercices (marqués par la pandémie). Sur les 5.000 recrutements prévus cette année dans l'Hexagone, cela représente donc 500 personnes. En revanche, les 12.000 recrutements prévus à l'étranger ne sont pas concernés.

Ces recrutements doivent permettre au groupe de maintenir une part de salariés expérimentés d'au moins 30 % dans son effectif, ce qui était déjà le cas en 2022. Stéphane Dubois, son directeur des responsabilités humaines et sociétales, vise même d'aller au-delà, à 35 %.

Prendre en compte le vécu

Le groupe entend ensuite pérenniser cet emploi senior en préparant la dernière partie de carrière dès l'arrivée des salariés à 50 ans. L'accord prévoit plusieurs mesures pour assurer des reconversions au sein de l'entreprise, en prenant notamment en compte « le vécu physique des collaborateurs », et la poursuite des formations tout au long de la carrière. Cela comprendra, notamment, des évolutions vers le numérique et la réduction de la pénibilité grâce aux possibilités offertes par l'automatisation. Ces reconversions n'entraveront pas l'évolution salariale et la progression de carrière à en croire Stéphane Dubois.

Ces parcours devront néanmoins tenir compte de la nouvelle classification mise en place avec la convention collective de la métallurgie qui entrera en vigueur l'an prochain. Celle-ci pose un changement fondamental : les personnels ne seront plus évalués et classés en fonction de leur parcours, mais de leur poste. Stéphane Dubois assure que « ce n'est pas une difficulté ». Mais, si Safran « a pris l'engagement très clair qu'il n'y aura aucune baisse de rémunération dans le cadre de la mise en place de la nouvelle convention collective », la situation est un peu plus floue dans le cas des reconversions.

Le directeur des responsabilités humaines et sociétales entend néanmoins aborder cette question « de façon très constructive, le but du jeu étant vraiment de faire en sorte que chacun puisse donner le meilleur de lui-même dans les meilleures conditions jusqu'au bout ». Faute de quoi, le dispositif de reconversion ne motiverait personne. Cela pourrait passer par une valorisation du transfert d'expérience et la responsabilisation des collaborateurs plus âgés.

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Décroissance progressive

La dernière grande mesure « innovante » consiste à aménager la fin de carrière et préparer la transition vers la retraite. Applicable à partir de 55 ans, elle vise essentiellement les salariés dépassant les 60 ans. Cela consiste notamment à permettre une décroissance progressive de l'activité pour les salariés, sans pour autant passer par des systèmes de préretraite avec un arrêt total du travail. Ce qui nécessite de mettre en place une organisation du travail suffisamment souple pour ce type de situation, surtout en atelier.

« Si nous voulons que les salariés restent plus longtemps, il faut que les entreprises elles-mêmes acceptent de changer l'organisation du travail », selon Stéphane Dubois.

D'autres mesures plus classiques sont également présentes, sur l'abondement sur le compte épargne temps, l'engagement sur congés solidaires, les congés pour les proches aidants, ou la tenue d'un bilan de santé annuel. Un dernier point sur lequel Safran s'est engagé à l'échelle mondiale.

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Hors de la réforme des retraites

Malgré l'actualité, pour Stéphane Dubois, cette démarche ne s'inscrit pas comme une réponse à la réforme des retraites. Il y voit la volonté du groupe de répondre aux évolutions de la relation de travail à l'œuvre depuis la crise sanitaire « qui ne se limitent absolument pas au télétravail ». Selon lui, « dans une relation de travail dont la caractéristique première post-Covid est de s'être fortement individualisée, ce qui est véritablement important pour les entreprises est de retrouver ou de conserver un sens du collectif et un lien entre les générations ». D'où l'importance de conserver un équilibre dans la pyramide des âges malgré le départ des baby-boomers et d'assurer la transmission des compétences d'une génération à l'autre.

D'ailleurs, les dispositifs prévus dans le cadre de la réforme des retraites ne semblent pas convaincre Safran. Interrogé sur ce point par La Tribune, le directeur des responsabilités humaines et sociétales déclare : « Nous n'avons pas l'intention d'utiliser le CDI senior. Nous ne sommes pas dans une logique d'économie de charges concernant les 10 % de recrutements de séniors, et ce, dans la continuité de ce que l'on a toujours fait. » Et il est tout aussi dubitatif concernant l'index senior : « Je ne sais pas ce qu'il va devenir dans le contexte actuel. S'il y en a un, nous nous adapterons, nous le mettrons en place et il n'y aura pas de sujet. »

Léo Barnier

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Commentaires 2
à écrit le 15/04/2023 à 15:10
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Idem chez Airbus

à écrit le 15/04/2023 à 9:57
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Depuis quelques années, la politique salariale chez Safran est extrêmement mauvaise, et en 2023 les augmentations sont inférieures à l'inflation. Les gens ne progressent plus dans leurs carrières au sein du groupe, et en conséquence les personnes exp...

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