Grande distribution : créanciers et actionnaires de Casino avalisent son plan de sauvetage

Le groupe, qui est entré fin octobre en procédure de sauvegarde accélérée, a évoqué vendredi matin un « très large soutien des actionnaires et des créanciers ». Du côté des représentants syndicaux du groupe, on craint une vente à la découpe des magasins de l'enseigne.
Des étapes restent encore à franchir pour la restructuration financière du groupe, attendue dans deux mois.
Des étapes restent encore à franchir pour la restructuration financière du groupe, attendue dans deux mois. (Crédits : STEPHANE MAHE)

C'était attendu et c'est désormais chose faite. Créanciers et actionnaires de Casino ont avalisé ce vendredi matin le plan de sauvegarde du groupe négocié ces derniers mois, ce qui permet au distributeur en grande difficulté financière d'avancer dans la restructuration de son intenable endettement, toujours prévue à horizon mars-avril prochain.

Le groupe, qui est entré fin octobre en procédure de sauvegarde accélérée, a évoqué vendredi matin un « très large soutien des actionnaires et des créanciers ». Les actionnaires de Casino ont voté favorablement pour ce projet à 98,87%. Ce, même si certains petits porteurs avaient la veille fait entendre leur colère ou leur inquiétude avant le vote formel.

Pas de surprise

Il n'y avait pas tellement de suspense : créanciers comme actionnaires du groupe, qui fin 2022 comptait encore 200.000 salariés, dans le monde dont 50.000 en France, sous diverses enseignes (Casino, Monoprix, Franprix ou CDiscount), avaient tout intérêt à entériner ce qui constitue « l'unique solution sur la table permettant de viabiliser » le groupe, comme l'a rappelé jeudi une des administrateurs judiciaires à son chevet, Aurélia Perdereau.

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L'issue de cette consultation était d'autant plus attendue dans la mesure où l'actuel PDG Jean-Charles Naouri, un des artisans de ce plan de sauvetage, est encore principal actionnaire du groupe, et où les candidats à la reprise Daniel Kretinsky et Marc Ladreit de Lacharrière détiennent aussi des parts significatives de capital.

Quant aux créanciers, les principaux d'entre eux avaient donné leur accord il y a plusieurs mois sur un plan de sauvegarde permis par l'apport d'argent frais du milliardaire tchèque et de ses alliés, Fimalac et Attestor, et qui prévoit un fort écrasement de la dette, autour de 5 milliards d'euros, qui va les léser significativement.

De nouvelles étapes à venir

Des étapes restent encore à franchir pour la restructuration financière du groupe, attendue dans deux mois. Elle doit encore emporter, notamment, l'approbation de différentes autorités de la concurrence « autres que la Commission européenne », qui a donné son feu vert début janvier sur ces questions. Tout particulièrement celle du ministère de l'Economie sur les investissements étrangers et mais aussi celle de la Commission européenne sur les questions de subventions étrangères.

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Le Tribunal de commerce de Paris devra statuer le 5 février prochain sur l'examen du projet de plan de sauvegarde accélérée, ont précisé les administrateurs judiciaires au cours de la matinée. La période de sauvegarde accélérée de Casino s'achèvera le 25 février.

Augmentation de capital

Les diverses augmentations de capital doivent ensuite avoir lieu en mars et une assemblée générale des nouveaux actionnaires devra dans la foulée statuer sur la nouvelle composition du conseil d'administration, ont expliqué jeudi les administrateurs judiciaires aux actionnaires.

Ces derniers n'auront plus tellement voix au chapitre, puisqu'ils vont être massivement dilués : actuel actionnaire majoritaire, Rallye (contrôlé Jean-Charles Naouri) ne détiendra plus que 0,12% du capital.

Philippe Palazzi, appelé à devenir le directeur général du groupe une fois que les repreneurs seront actionnaires majoritaires, a présenté jeudi les grandes lignes d'un objectif de « croissance rentable et responsable », avec un programme d'investissements à hauteur de 300 millions d'euros par an jusqu'en 2028 pour redresser les comptes. Interrogé sur l'avenir de l'équipe actuelle, il a indiqué qu'il prévoyait « des changements », mais « gardera aussi les personnes compétentes ».

Craintes de vente à la découpe

L'avocat Saam Golshani, qui accompagne Daniel Kretinsky dans la reprise de Casino, a quant à lui balayé les doutes d'un actionnaire sur des velléités de vente à la découpe, présentant le milliardaire tchèque comme un investisseur « de long terme ».

Les repreneurs ne se sont toutefois pas opposés à l'entrée de Casino « en négociations exclusives » avec Intermarché et Auchan pour céder« la quasi-totalité » de son parc de magasins de grande taille, 313 hyper et supermarchés. Ces négociations doivent s'achever d'ici « fin janvier », selon le patron des Mousquetaires/Intermarché Thierry Cotillard.

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Les syndicats réunis en intersyndicale (FO, CGT, CFDT, UNSA et CFE-CGC), y voyant un dépeçage de l'activité historique du groupe né à Saint-Etienne, ont déposé un nouveau préavis de grève allant du 9 janvier au 5 février. L'intersyndicale a indiqué jeudi qu'elle allait négocier avant la fin du premier trimestre un « accord de méthode » pour l'accompagnement social des salariés concernés par la vente des hyper et supermarchés. Trois dates de négociation ont été arrêtées, les 18, 26 janvier et le 7 février.

Un groupe qui perd encore beaucoup d'argent

Pour l'exercice de l'année 2023, le groupe prévoit que son Ebitda (résultat brut d'exploitation), un indicateur clé de rentabilité, passe dans le rouge avec une perte d'environ 100 millions d'euros, selon un communiqué publié en novembre dernier. Pour rappel, fin octobre, il prévoyait un Ebitda dans le vert, à moins de 100 millions d'euros. C'est la deuxième fois en moins d'un mois que le groupe sabre dans ses prévisions de rentabilité.

En plus de ce nouveau chiffre, Casino prend encore plus de précaution en donnant une fourchette, allant d'une perte de 78 millions d'euros à une perte encore plus lourde de 140 millions, dans laquelle pourrait finalement s'établir son Ebitda pour 2023 « en fonction de la bonne réalisation des plans d'actions ».

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Casino, qui a baissé ses prix début 2023 après les avoir laissés filer l'année précédente, indique également que ses marges souffrent, dans un contexte d'inflation, de l'impact des « investissements » mis en place dans le cadre de son redressement. Ces effets devraient être durables puisque Casino a également sabré mercredi dans ses prévisions 2024, anticipant un Ebitda de 222 millions d'euros, contre 401 millions précédemment anticipés en septembre dernier. Pour 2025, la baisse est plus contenue, la prévision passant de 582 à 509 millions.

(Avec AFP)

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