Le CAC 40 monte aussi vite que le RSA

VOTRE TRIBUNE DE LA SEMAINE. Avec Macron, gagner "un pognon de dingue" en bourse ou toucher le RSA ? Le flop du revenu d'engagement pour les jeunes et celui de la COP26 à Glasgow ? Va-t-on réguler vraiment les télécoms et lutter contre les concentrations excessives dans les médias ? Et garder Bugatti en France (c'est mal parti)... et autres actualités de la semaine écoulée sous un regard éditorialisé.
Philippe Mabille

Un vieil adage le dit, la bourse aime la gauche au pouvoir ! La preuve par le CAC 40, cet indice boursier créé sous François Mitterrand. Depuis sa première cotation officielle, le 15 juin 1988, l'indice phare des quarante plus belles valeurs françaises a connu ses hauts et ses bas. Plus souvent des hauts en effet quand la gauche a gouverné, ce qui n'est qu'à moitié contre-intuitif. Elle a aussi été au pouvoir dans des périodes de reprise économique (Rocard-Bérégovoy, Jospin-DSK, Hollande-Macron), tandis que la droite l'a souvent emporté lors des récessions (Balladur puis Chirac puis Sarkozy qui a connu la grande crise financière de 2008-2009).

La flambée du CAC 40 qui s'accélère en cette fin du quinquennat d'Emmanuel Macron donne-t-elle raison à l'adage boursier ? Un président du milieu, et de droite et de gauche, fait-il mieux encore que ses prédécesseurs ? En atteignant des records inédits, à plus de 7000 points en clôture ce vendredi, le CAC 40 fait en tout cas gagner aux heureux actionnaires « un pognon de dingue ».

Et la fête n'est sans doute pas finie, écrit Eric Benhamou, notre expert finance, qui relativise cependant les performances de la bourse de Paris : si on le calculait en y intégrant le réinvestissement des dividendes, le CAC 40 aurait doublé de valeur par rapport à son niveau de la bulle internet, pulvérisé cette semaine.

En vérité, tous les marchés européens flambent, rassurés par l'attentisme de la Banque centrale européenne, et ce malgré l'approche d'un changement de pied de l'autre côté de l'Atlantique où la Fed pourrait resserrer le crédit (un peu).

La hausse de la bourse est un indice de la reprise économique, qui profite à de nombreux secteurs. La finance notamment avec une « remontada » de la Société Générale, qui valide la stratégie offensive de son président, Frédéric Oudéa.

La finance sert bien ses actionnaires, relève d'ailleurs Eric Benhamou : Axa, BNP Paribas, Société générale et Scor ont successivement annoncé des programmes de rachat d'actions importants, en partie pour compléter le manque à gagner des actionnaires l'an dernier du fait des restrictions imposés par les régulateurs sur la redistribution des résultats en pleine crise sanitaire.

Attention toutefois à ne pas céder à l'euphorie : de premiers signes de fléchissement sont visibles sur le crédit immobilier pour freiner la frénésie d'achat des ménages.

Pour les jeunes, qui n'ont pas la chance d'être des boursicoteurs, le « pognon de dingue » attendra : Emmanuel Macron, qui vient de multiplier les cadeaux pré-électoraux, a fini par réduire ses ambitions. Le revenu d'engagement promis aux jeunes décrocheurs est passé de carrosse à citrouille et il ne sera qu'un contrat d'engagement revu à la baisse, explique Fanny Guinochet. En clair, pas question de tomber dans le piège de l'assistanat.

Le patron de la CFDT, Laurent Berger, qui vient de présenter son « pacte du pouvoir de vivre » pour peser dans le débat présidentiel est très critique : « le compte n'y est pas pour les jeunes », dit-il dans un entretien avec notre journaliste.

L'insee a publié cette semaine des chiffres inédits et surprenants sur le taux de pauvreté en France. Globalement, grâce au « quoi qu'il en coûte », il est resté stable à 14,6% en 2000. Mais ce chiffre est presque provocateur pour celles et ceux qui ont été pénalisés par la crise du Covid, notamment les étudiants et les travailleurs précaires, et masque une réalité, le boom des allocataires du RSA, relève Grégoire Normand dont le nombre d'allocataires a bondi de plus de 7% pour dépasser le seuil des deux millions de bénéficiaires à la fin de l'année 2020. « La pauvreté s'est sans doute intensifiée mais n'a pas explosé », a résumé le directeur général de l'Insee Jean-Luc Tavernier. Pour rappel, le RMI a été créé, comme le CAC 40, sous Mitterrand...

A la COP26 à Glasgow, Greta Thunberg a fait son coup d'éclat en quittant bruyamment une table ronde sur le crédit carbone en criant au « greenwashing ». Au terme d'une semaine de négociations, peu d'avancées notables sont enregistrées et selon Marine Godelier, on se dirige vers un échec annoncé vendredi 12 novembre pour la clôture, en l'absence de la Chine et de la Russie.

La question clé, c'est bien sûr le hiatus croissant entre les efforts demandés aux uns et aux autres, entre les pays développés égoïstes et les pays émergents incapables de financer seul la transition énergétique. Pour y répondre, un fonds de 100 milliards de dollars avait été prévu lors de l'accord de Paris. La crise Covid l'a fait disparaître du paysage, regrette Giulietta Gamberini. A l'évidence, la fin du charbon est impossible sans l'aide des pays riches. Et la crise sanitaire n'aura été qu'une parenthèse pour le climat, car les émissions mondiales de gaz à effet de serre sont reparties de plus belle en 2021.

Il reste une semaine aux pays présents à Glasgow pour avancer et relever les objectifs de réduction des émissions de CO2 prévus lors de la COP21 de Paris. Pour l'heure, malgré un accord sur le méthane et sur la déforestation, la COP26 est en panne. Mais, selon Bertrand Piccard, président de la fondation Solar Impulse, il faut rester optimiste car le système capitaliste est bien en train de faire sa révolution « éco-logique », comme il l'écrit dans la chronique des « Tops et des Flops de la COP26 » que l'explorateur suisse a accepté tenir en exclusivité pour La Tribune pendant cette quinzaine. En direct de la COP26, Bertrand Piccard croit en un possible win-win à Glasgow. Selon lui, sur le climat, il faut désormais passer du quoi au comment. Alors que les négociations restent sur la corde raide, les parties prenantes peinent à résoudre le malentendu financier de la transition écologique. En attendant, face à des changements irréversibles, l'humanité doit choisir : s'adapter au changement climatique ou l'éviter.

A lire aussi sur latribune.fr cette semaine l'article de Michel Cabirol sur le retour fracassant de l'enfant terrible du spatial, l'américain Greg Wyler. « Celui que certains appellent la diva dans le spatial travaille à Toulouse et de Saint-Barthélemy (Antilles françaises) sur un projet d'une constellation placée en orbite à 600 km d'altitude et composée jusqu'à 350.000 satellites pesant chacun à peine 10 kg. Un projet qui pourrait apparaître invraisemblable tant il est disruptif sur le plan technologique et économique mais il est aujourd'hui bel et bien compétition dans le cadre d'un appel d'offres de l'Union européenne piloté par le commissaire Thierry Breton ».

Dans un entretien avec notre journaliste en Auvergne-Rhône-Alpes, Marie Lyan, le PDG de STMicroelectronics dévoile ses projets pour doubler ses moyens de production en Europe d'ici 2025.

Dans le petit monde des télécoms, on observe aussi de près les difficultés du gendarme du secteur à réguler les opérateurs, accrues depuis la nomination de l'ex député Laure de la Raudière à la tête de l'Arcep, raconte Pierre Manière.

Sous pression du politique, l'autorité indépendante a du mal à le rester, face à des enjeux d'investissement très lourds dans l'aménagement numérique du territoire et en présence d'un opérateur historique, Orange, très puissant, et très contesté par ses concurrents.

Autre actualité à suivre de près dans le contexte de la présidentielle, la consolidation dans le secteur des médias, et notamment la fusion entre TF1 et M6. Les ministères de la Culture et de l'Economie ont commandé une mission sur les règles anti-concentration en vigueur qui pourrait s'appliquer aussi au démantèlement de l'empire Lagardère et à sa reprise par Vincent Bolloré.

Alors que la pandémie de Covid donne d'inquiétants signes de reprise avec l'arrivée de l'automne, et dans l'attente de la généralisation de la troisième dose de vaccins, nous avons enquêté, avec Florence Pinaud et Emilie Guédé sur les nouvelles fortunes des biotech, de Moderna à BioNTech.

Vous y découvrirez les secrets pour réussir dans la santé du futur et en saurez plus sur les mystères et les promesses de l'ARN Messager.

Pour finir, notre article le plus lu de la semaine n'a rien à voir avec le Covid, mais tout à voir avec le luxe et la fortune. Olivier Mirguet, grand fan de Bugatti, nous raconte comment le mythique constructeur français, repris par VW depuis 1998, est désormais devenu croate avec pour nouveau propriétaire le groupe Rimac. Mais qu'on se rassure, surtout si on a gagné au loto ou au CAC 40, la production de l'emblématique Chiron se poursuivra à Molsheim en Alsace jusqu'en 2024. La suite, forcément électrique, climat oblige, reste à écrire...

Philippe Mabille

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Commentaires 5
à écrit le 08/11/2021 à 21:59
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La BCE pilotée par les Etats choisit délibérément de ne pas combattre l'inflation (soit disant temporaire) pour que les plus faibles payent la dette tandis que la bourse flambe Vous avez un LDD rémunéré 2% de moins que l'inflation: on vous vole ... ...

à écrit le 06/11/2021 à 11:37
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Imaginons nous tous être actionnaire et client d'une entreprise...qu'allez vous favoriser? Hausse ou baisse des tarifs?

le 06/11/2021 à 14:43
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C'est le marché (donc le client) qui fait le prix, pas l'actionnaire...

à écrit le 06/11/2021 à 10:35
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Ce n'est pas la politique de macron? pardon, mais faire croire qu'économiquement il cherche a créer de l'emploi, ce qui se passe avec engie et bouygues montre bien qu'il fait le contraire. L'affairisme ne tient pas lieu de bousole, surtout lorsqu'il...

à écrit le 06/11/2021 à 9:05
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Et deux ans après la dictature sanitaire continue: "Papiere, schnell" !

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