Les taux directeurs vont-ils baisser ? Face à l'incertitude, les taux obligataires montent en flèche

Après avoir baissé en décembre, les taux obligataires connaissent un net regain en ce début janvier.
« Bien sûr, la question qui commence à faire jour est celle de savoir quand il sera opportun de réduire la politique monétaire restrictive », avait indiqué le président de la Fed, Jerome Powell, lors de la dernière réunion de la Fed.
« Bien sûr, la question qui commence à faire jour est celle de savoir quand il sera opportun de réduire la politique monétaire restrictive », avait indiqué le président de la Fed, Jerome Powell, lors de la dernière réunion de la Fed. (Crédits : Reuters)

Le marché obligataire redevient nerveux. Ce vendredi vers 12 heures, le rendement de l'emprunt de l'Etat français à dix ans s'établissait à 2,7% alors qu'il s'affichait sous 2,5% quelques jours auparavant. Même constat du côté des Etats-Unis où le 10 ans à de nouveau touché les 4% en séance jeudi, pour la première fois depuis mi-décembre.

Une nervosité des investisseurs liée à la publication ce vendredi des chiffres de l'inflation qui est repartie à la hausse en décembre dans la zone euro mais aussi les bons chiffres de l'emploi américain en décembre publiée ce jeudi (216.000 emplois créés, en hausse par rapport aux 173.000 de novembre), lesquels traduisent une activité dynamique susceptible d'entretenir l'inflation.

Des données qui pourraient inciter les banques centrales européenne et américaine à maintenir leurs taux à des niveaux élevés (respectivement à 4-4,75% et 5,25-5,50%) ce qui influencerait directement les taux des obligations. Anticipant un tel scénario, les investisseurs demandent donc aujourd'hui une prime de risque plus importante pour acheter des emprunts d'Etat.

Léger rebond après une forte baisse des taux obligataires

Le mois dernier, pourtant, l'heure était plutôt à la fête. Le taux à 10 ans américain avait diminué jusqu'à 3,8% fin décembre, loin du pic des 5% en octobre. Ce desserrement de la pression des investisseurs était venu de l'espoir de voir la Réserve fédérale américaine baisser ses taux dès le printemps 2024. Le 14 décembre, des responsables de la Fed avaient évoqué une possibilité de trois ou quatre baisses l'année prochaine, pour les amener à 4,6% fin 2024, contre 5,25 à 5,50% aujourd'hui. « Bien sûr, la question qui commence à faire jour est celle de savoir quand il sera opportun de réduire la politique monétaire restrictive », avait, par ailleurs, indiqué le président de la Fed, Jerome Powell, ajoutant que la question du calendrier avait été « un sujet de discussion » au cours de la dernière réunion de la banque centrale. Un scénario anticipé par les marchés comme l'expliquait alors John Plassard, directeur et spécialiste des marchés chez la banque Mirabaud : « Les marchés ont écarté toute possibilité d'une nouvelle hausse et s'attendent désormais à ce que la première baisse intervienne en mars ou en mai 2024 ».

Lire aussiInflation, croissance, chômage : ce qu'il faut retenir des prévisions de la Banque de France

Depuis, les investisseurs ont largement revu à la baisse leurs attentes de réduction des taux de la Banque centrale européenne (BCE) pour 2024, selon les données de Bloomberg. « Les investisseurs sont de plus en plus confus en ce début d'année après la publication de plusieurs statistiques économiques "meilleures qu'attendues" », relève notamment John Plassard, directeur et spécialiste des marchés chez la Banque Mirabaud dans une note.

Aux Etats-Unis, jeudi, les créations d'emplois dans le secteur privé sont ressorties plus nombreuses que prévu en décembre, à 164.000 selon l'enquête mensuelle ADP/Stanford Lab, contre 114.000 attendues par les analystes, semblant montrer que le marché du travail est encore dynamique. Or les tensions sur le marché de l'emploi américain sont scrutées par la banque centrale américaine, qui surveille tous les facteurs pouvant contrecarrer ses efforts pour ramener l'inflation proche de sa cible de 2%. Ainsi, des chiffres montrant une dynamique trop forte « pourraient constituer un revers » pour le marché obligataire et alimenter les scénarios de baisse des taux seulement au second semestre 2024, selon Stephen Innes, associé de SPI Asset Management.

Regain de l'inflation en Europe

En Europe, les risques de déceptions, sur une éventuelle baisse des taux prochaine de la BCE, sont encore plus forts.

Et pour cause, l'inflation en zone euro -qui fût le déclencheur de la hausse des taux directeurs dans l'objectif de ramener cette dernière autour des 2%- est remontée à 2,9% sur un an en décembre, selon les chiffres dévoilés ce vendredi par Eurostat. Et ce alors qu'elle avait été réduite de manière spectaculaire en novembre, à 2,4%. Un regain qui a surpris certains d'investisseurs alors même que ce scénario était anticipé par d'autres comme Patrick Artus. « Il ne faut pas oublier que l'inflation a diminué en raison d'un effet de base important sur les prix de l'énergie qui avaient fortement augmenté l'an dernier », rappelle à La Tribune l'économiste et conseiller de la banque Natixis qui prévoit même une remontée de l'inflation l'année prochaine.

Lire aussi« Les taux directeurs ne retomberont pas sous les 3% en Europe » (Patrick Artus, Natixis)

L'année 2024 semble donc finalement plus incertaine que prévu. « Au cours des prochaines semaines, après le rebond récent des marchés actions et une baisse des taux longs qui escomptent d'ores et déjà une réduction conséquente des taux directeurs des banques centrales, les investisseurs pourraient faire preuve d'un certain attentisme jusqu'aux premières publications de résultats annuels », anticipe Gilles Guibout, responsable des actions européennes chez AXA IM, dans une note.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 05/01/2024 à 20:15
Signaler
p artus a dit ca ya 15 jours

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.