En croissance, le Groupe ADP met le cap sur l'international pour tenir sa trajectoire

Paris sera toujours Paris, mais le Groupe ADP est sans doute plus fort avec la Turquie aujourd'hui et l'Inde demain. Pilier de sa stratégie, la dimension internationale du groupe devrait encore se renforcer, bien aidée par le dynamisme de la reprise chez ses filiales TAV Airports et GMR Airports.
Léo Barnier
Augustin de Romanet se verrait bien faire un troisième mandat à la tête d'ADP.
Augustin de Romanet se verrait bien faire un troisième mandat à la tête d'ADP. (Crédits : © LÉA CRESPI/PASCO&CO)

Qui dit Groupe ADP, dit Aéroports de Paris. Pourtant, si Orly et Roissy gardent une place centrale pour le groupe, force est de constater que la dimension internationale est de plus en plus prédominante dans ses résultats. Si les résultats de trafic l'avaient déjà laissé entrevoir, les résultats financiers dévoilés hier l'ont confirmé. A l'occasion de la présentation détaillée des résultats ce jeudi, Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, a insisté sur sa volonté de continuer à développer cette présence à l'international, qui constitue l'un des piliers du plan stratégique Pioneers 2025.

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TAV en pointe en attendant GMR

Cette dimension internationale s'illustre par la gestion d'aéroports à l'étranger directement par le groupe ADP, et surtout, désormais par ses participations dans les groupes turc TAV Airports (46%) et indien GMR Airports (49%). Ainsi, sur un chiffre d'affaires de 5,5 milliards d'euros en hausse de 17%, TAV Airports apporte 1,3 milliard d'euros (au prorata de la participation d'ADP). Surtout, ce chiffre est en hausse de quasiment 25% par rapport à 2022, dopé par la hausse du trafic dans ses aéroports d'Almaty et d'Ankara, mais aussi par l'activité de ses filiales de services. Peuvent s'y ajouter 277 millions d'euros venus d'Airport International Group (AIG) en Jordanie, même si la croissance y est plus modeste.

La contribution internationale à la croissance de l'Ebitda (bénéfices avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement) n'est pas négligeable non plus. A l'échelle du groupe, celui-ci atteint 2 milliards d'euros avec une hausse de 15%. Celle-ci provient essentiellement des commerces et des services sur les plateformes parisiennes. Mais TAV Airports dégage tout de même 381 millions d'euros, en hausse de 20% malgré l'inflation forte en Turquie, tandis que AIG amène 84 millions d'euros supplémentaires.

L'apport du groupe indien GMR Airports prendra plus de temps avant d'être réellement positif. Mis en équivalence, sa contribution aux résultats est pour l'instant négative à hauteur de 18 millions d'euros. Mais les perspectives de croissance du trafic ont de quoi séduire, et suffisent pour l'instant à ADP pour justifier sa stratégie de développement international.

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Cap sur les 120 millions de passagers à Dehli

Celle-ci passe en particulier par le développement de nouvelles capacités sur les aéroports déjà intégrés dans le portefeuille d'actifs du groupe ADP. Son PDG souligne ainsi la mise en service de nouveaux terminaux à Almaty au Kazakhstan cette année et Antalya en Turquie l'an prochain. Ce dernier doit atteindre une capacité annuelle de 65 millions de passagers.

Mais le gros morceau sera en Inde, avec l'extension des capacités de l'aéroport de New Delhi : principale base d'IndiGo et hub d'Air India - et déjà en situation de saturation -, il doit passer de 70 à 90 millions de passagers dès cet été, avec des projets pour aller jusqu'à 120 millions de passagers à terme. De fait, il s'imposera comme le principal aéroport du groupe devant Roissy-CDG en termes de capacités, ce qu'il est déjà en termes de trafic (72 millions de passagers, contre 67 millions en 2023) comme l'a reconnu lui-même Augustin de Romanet. GMR Airports a également renforcé sa participation, de 63 à 74%, dans le capital de l'aéroport d'Hyderabad, qui a accueilli 24 millions de voyageurs l'an dernier.

D'ailleurs, GMR Airports est d'ores et déjà devenu la plus grosse entité du Groupe ADP en termes de trafic, avec 108 millions de passagers - supérieur à celui d'avant la crise -, contre quasiment 100 millions pour les aéroports parisiens et 96 millions pour TAV Airports. Et le différentiel devrait continuer de s'accroître l'an prochain : le groupe prévoit une hausse de 8% du nombre de passagers en 2024 par rapport à l'année précédente, mais « la croissance annuelle moyenne du trafic à l'échelle du groupe devrait continuer à être supérieure à celle enregistrée à Paris », précise un communiqué. TAV Airports table ainsi sur un taux compris entre 10% et 14% entre 2022 et 2025, et GMR Airports pourrait aller encore au-delà au vu de son dynamisme actuel.

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Fusion et cotation

Ce développement international passe aussi par un renforcement des structures financières, notamment en Inde. Comme annoncé l'an dernier, le processus de fusion a été engagé entre GMR Airports Infrastructure (GIL) et GMR Airports (GAL), sa filiale commune avec ADP. Cela doit donner naissance à une nouvelle entité baptisée « New GIL », au deuxième trimestre de cette année. Cette opération doit permettre de simplifier une structure actuelle assez complexe, mais a surtout un objectif boursier : GMR Airports Infrastructure étant déjà coté sur les marchés indiens, New GIL le sera également.

Décrite par Augustin de Romanet comme un « pure player » du monde aéroportuaire, New GIL sera détenue à 32,3% par le groupe ADP « avec d'importants droits permanents et un intérêt économique ». Le groupe français disposera notamment d'actions préférentielles lui assurant un intérêt économique à hauteur de 46%, bien supérieur à sa participation. GMR Group, la holding familiale qui était jusque-là actionnaire principal de GMR Airports Infrastructure, restera majoritaire avec 33,7% des parts. Le reste du capital, soit 34%, constituera le flottant.

TAV Airports a également renforcé son autonomie financière, avec une première émission obligataire qui lui a permis de lever 400 millions de dollars. « Cela a montré sa capacité à financer de manière autonome ses besoins en développement », s'est réjoui Augustin de Romanet, qui a rappelé combien il était difficile en Turquie d'accéder aux marchés financiers.

« Ces réalisations sont en ligne avec notre stratégie de développer d'importants relais de croissance à l'international avec une maturité longue », s'est félicité le patron du groupe, qui vise une croissance de l'Ebitda de 4% cette année et 7% supplémentaires l'an prochain.

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Vers un 3e mandat

En attendant, ADP a déjà réussi à obtenir une progression significative, avec une envolée de son résultat net de 22% par rapport à 2022, pour atteindre 631 millions d'euros. De quoi conforter Augustin de Romanet dans la poursuite de son plan Pioneers 2025.

Ce qui pourrait continuer à se faire sous sa direction : en fin de mandat, il s'est déclaré « disponible » pour un troisième mandat comme le rapporte l'AFP. Le choix de l'Etat, actionnaire majoritaire, doit être entériné d'ici la prochaine assemblée générale le 21 mai.

Un changement des statuts du groupe sera nécessaire pour repousser la limite d'âge, aujourd'hui fixée à 65 ans, si Augustin de Romanet souhaite faire un mandat complet de cinq ans. Il fêtera en effet ses 63 ans début avril.

Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 16/02/2024 à 8:33
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Avec notre argent c'est facile, vaincre sans péril et triompher sans gloire devrait être la devise du néolibéralisme et ils osnt contents tous... au secours.

à écrit le 15/02/2024 à 21:17
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Les patrons d'ADP sont nuls en investissements. Ils ont revendu leur participation dans les aéroports de Pékin à la veille de l'ouverture de l'aéroport géant de Daxin qui avec la levée des mesures anti-covid va accueillir des millions de passagers et...

le 16/02/2024 à 16:24
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"Nuls" ? Mais la croissance chinoise grippe alors de l'indienne va continuer à progresser plus vite. Donc en part de marché, y'aurait plus à gagner en Inde que dans la Chine qui cale déjà. L'investissement c'est pour du long terme. Mais souvent fi...

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