"La défense occupe un rôle particulier pour la relance de l'économie et la soutenir permet de relancer efficacement l'économie française", a résumé le 14 mai le président du CIDEF et du GICAT Stéphane Mayer, qui est aussi PDG de Nexter lors de son audition le 14 mai devant la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat. La relance économique par la défense permettrait ainsi aux entreprises de ce secteur, la plupart du temps duales, de s'appuyer sur la commande publique pour passer le cap en attendant un futur rebond du marché civil. D'autant que cette filière crée des emplois et des technologies "Made in France" : entre 80 % et 90% des programmes sont réalisés en France. Pour soutenir la supply chain aéronautique, maritime et de l'armement terrestre, le gouvernement n'a en fait que l'embarras du choix, notamment en anticipant des commandes d'hélicoptères, de Rafale, de véhicules blindés, de navires de guerre, de satellites...
"La défense est un amortisseur, il faut améliorer la LPM (Loi de programmation militaire) qui sera révisée en 2021", a confirmé lors de cette même audition le président du GIFAS et PDG de Dassault Aviation Eric Trappier.
"Pourquoi pas anticiper certains programmes pour appuyer notre industrie selon les priorités, en coordination avec la DGA (Direction générale de l'armement)", a-t-il expliqué. Et le patron de Dassault Aviation a rappelé que "l'aéronautique, c'est avant tout le Rafale qui est très important pour nos armées et l'export". Environ 500 entreprises sont effectivement associées au programme Rafale, piloté par Dassault Aviation.
Des idées dans le domaine aéroterrestre
Dans le domaine terrestre, le patron du GICAT a également des idées sur des programmes à "accélérer" pour soutenir l'industrie de défense, notamment les PME, qui cherchent des financements. "Il faudrait accélérer dans l'idéal, a-t-il estimé, toutes les commandes, qui devraient l'être, dans des tranches additionnels d'ici à 2025". Pour Stéphane Mayer, ce serait "autant de signaux positifs et attendus par tous, plus encore par les PME". Il compte plus particulièrement sur l'affermissement anticipé de tranches conditionnelles des véhicules du programme Scorpion, dont Nexter est l'un des principaux architectes. Soit les Griffon, Jaguar et Serval.
Le PDG de Nexter souhaite également que soient confirmées de nouvelles commandes prévues dans le cadre de la LPM pour des matériels comme le Caesar (artillerie autotractée), certains types d'hélicoptères et de drones... ainsi que les indispensables AOA (autres opérations d'armement), en général de petits programmes. Ces AOA restent très importantes pour les armées, et notamment pour l'armée de Terre. Les ressources programmées affectées aux AOA s'élèvent à 7,3 milliards d'euros de crédits budgétaires pour la période 2019-2023.
Au-delà, pour les programmes en dehors de cette LPM, le programme d'hélicoptère HIL et les incréments du programme Scorpion avec les robots, le véhicule du génie MAC, le Véhicule blindé d'aide à l'engagement (VBAE), le char européen du futur (MGCS), le Système commun de feux indirects CIFS (Common Indirect Fire System) "devraient faire partie des programmes dans la LPM", a suggéré Stéphane Mayer.
... et des idées pour la filière maritime
Le président du GICAN, Hervé Guillou ne manque pas lui non plus d'idées pour la filière maritime. "La relance de la filière maritime est nécessaire avec une accélération des programmes de surveillance maritime pour maintenir les grandes ambitions et ne pas perdre nos volontés pour un nouveau porte-avions et aussi les FDI (frégate de défense e d'intevention, ndlr)", a-t-il rappelé. Il demande à la France de suppléer éventuellement une défaillance de la Grèce, qui est en négociations avec Naval Group pour l'achat de deux FDI. Et de préciser que "la commande publique sera essentielle pour notre reprise. L'activité navale est vitale pour certains territoires comme la Bretagne et la Provence. Nous appelons donc à un plan de relance vigoureux".
"Dans ce plan, il ne faut pas oublier la R&D, a-t-il également souligné. On a déjà fait deux fois l'erreur par le passé car nous sommes dans une compétition mondiale féroce face à l'Allemagne, les Pays-Bas, la Chine et la Corée. La R&D permet de reconstruire l'offre et nous plaidons pour avancer ce point, ce qui aidera mieux les entreprises, en plus de leur donner les moyens par des subventions et aides d'État, pour reconstruire une offre face aux concurrents étrangers".
Dans ce contexte, le patron du GICAN plaide pour une accélération de la "dronisation de la marin", de la surveillance maritime et de l'action de l'État en mer. Ces programmes devraient être également "au cœur" de cette relance, qui permettrait de faire vivre, via des commandes publiques, les PME françaises. Hervé Guillou demande également que "l'État accorde des crédits vendeurs et acheteurs pour nos partenaires commerciaux comme la Roumanie ou la Grèce". L'objectif est d'assurer aux entreprises des marchés exports, qui permettront de sauvegarder ou de créer des emplois en France.
Enfin, selon Hervé Guillou, l'Europe a un rôle à jouer pour lancer des programmes de défense dans le cadre de sa politique industrielle avec l'appui du commissaire Thierry Breton. "Nous souhaitons être soutenus et ne pas se retrouver derniers de la classe, nous voulons un plan spécifique au domaine maritime", a-t-il plaidé. Cette relance s'inscrit dans le cadre du renforcement des coopération européennes, notamment entre STX et Fincantieri, pour construire l'Europe du naval et pour plus compétitifs face aux Russes et aux Chinois, a-t-il estimé.
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