Immobilier : Le Maire a-t-il raison d'attaquer le Pinel et le prêt à taux zéro (PTZ) ?

A la veille des conclusions du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement, le patron de Bercy a dans le collimateur les ristournes fiscales censées s'éteindre fin 2023. Décryptage.
César Armand
Le ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique s'est inscrit en faux par rapport aux déclarations des promoteurs.
Le ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique s'est inscrit en faux par rapport aux déclarations des promoteurs. (Crédits : BENOIT TESSIER)

Alors que les conclusions du Conseil national de la refondation (CNR) venaient tout juste d'être reportées du 9 mai au 5 juin, le président de la République sonnait la charge dans Challenges mi-mai, qualifiant les aides au logement de « paradis pour les investisseurs immobiliers » et de « système de surdépenses publiques pour de l'inefficacité collective ».

« On dépense beaucoup plus que nos voisins européens sans qu'on puisse dire que nos résultats soient particulièrement meilleurs », avait renchéri, dans la foulée sur CNews, son ministre des Comptes publics Gabriel Attal.

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 Une fin de non-recevoir à Bercy

Réunis le 30 mai à Bercy par le ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle, Bruno Le Maire, en présence du ministre de la Ville et du Logement, Olivier Klein, les promoteurs immobiliers s'étaient vu adresser une fin de non-recevoir à leur proposition de défiscaliser les donations parent-enfant et les droits de succession.

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 Le patron de Bercy avait également annoncé vouloir conditionner le prêt à taux zéro (PTZ) au logement neuf érigé dans le respect des normes de la réglementation environnementale RE2020, en vigueur depuis le 1er janvier 2022 avec un an de retard.

« Mais qu'y-a-t-il de plus vert ? » s'était agacé, lors d'un débat organisé le 31 mai par les Républicains de l'Assemblée nationale, Yannick Borde, maire (Horizons) de Saint-Berthevin (Mayenne), président du promoteur-constructeur Procivis et vice-président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), confédération des bailleurs sociaux.

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Vers un PTZ vert ?

Le lendemain, dans un message vidéo diffusé en ouverture du congrès des promoteurs immobiliers (FPI), Bruno Le Maire en avait remis une couche, déclarant « souhaiter » recentrer le PTZ « sur les opérations les plus respectueuses de l'environnement ». Objectif : aboutir à un « prêt à taux zéro vert ».

Et ce alors qu'au même moment sur France Inter, son collègue Olivier Klein (Ville et Logement) l'érigeait en « bonne solution » pour « construire un parcours résidentiel, notamment aux primo-accédants et aux jeunes ».

« Ne laissons donc pas croire que le PTZ est un moyen pour les millions de nos compatriotes qui sont dans la classe moyenne d'accéder à la propriété. C'est tout simplement faux. Nous devons donc le recentrer. Aucune économie n'est facile, mais toute économie est nécessaire », rétorque ce 4 juin Bruno Le Maire dans le JDD.

Haro sur le Pinel

De même que toujours devant les professionnels du logement neuf, le ministre de l'Economie avait évoqué des discussions techniques à « aussi approfondir sur le sujet du Pinel, qui, à [ses] yeux, n'a pas fait la preuve de son efficacité au cours des mois passés ».

Aujourd'hui, il va plus loin et propose de « mettre fin à des dispositifs coûteux et inefficaces pour nos compatriotes » - le PTZ et le Pinel sont censés s'éteindre fin 2023.

Le Pinel est un avantage fiscal du nom de l'ancienne ministre Sylvia Pinel qui l'a porté en 2015. Il s'agit d'une baisse d'impôt qui bénéficie aux investisseurs immobiliers dans le parc locatif privé, à condition de louer leur bien a minima six ans et de respecter un plafond de loyer. Le dispositif prendra fin en 2024 mais a été transformé en « Pinel + » au 1er janvier 2023.

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Une « quasi disparition des investisseurs particuliers »

Les taux de réduction d'impôt de 12%, 18% et 21% pour des engagements de location à loyers plafonnés de respectivement 6, 9 et 12 ans ont alors été ramenés à 10,5%, 15% et 17,5% et en 2024 à 9%, 12% et 14%. Sauf si les habitats concernés se trouvent en quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV), appliquent la nouvelle réglementation environnementale dite « RE2020 » et respectent des critères de qualité.

Parmi lesquels, la surface des logements, leur partie extérieure et leur orientation. Un studio doit mesurer 28 m² et comporter 3m² dehors. Un T2 : 45 m² avec 3 m² ; un T3 62 m² avec 5 m² ; un T4 79 m² avec 7 m² et un T5 96 m² avec 9 m².  Pour les T3 et plus, ils doivent même comporter deux orientations différentes.

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Une réforme qui a conduit à une « quasi disparition des investisseurs particuliers », a pointé le 25 mai la Fédération des promoteurs immobiliers, lors de la présentation des résultats du premier trimestre 2023. Ces derniers ne représentent plus que 33% des acquéreurs, alors qu'ils « contribuent très largement au lancement des programmes en se positionnant plus tôt que les accédants » qui pèsent désormais 66%.

Demain 5 juin, la Première ministre Elisabeth Borne et le ministre de la Ville et du Logement Olivier Klein présenteront les conclusions du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement. Ils devraient notamment annoncer la contribution d'Action Logement dans l'acquisition de logements en vente en état futur d'achèvement (VEFA), des habitats en cours de construction ou de livraison, que les acheteurs ne peuvent plus s'offrir, l'octroi de crédits étant grippé par la remontée des taux d'intérêt.

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César Armand

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Commentaires 19
à écrit le 05/06/2023 à 22:54
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Bien sûr que oui ! D'une part, tout système d'aides est par nature inflationniste. Il resolvabilise une demande qui entretien ainsi une offre suffisante mais à tarification excessive. La fin des aides assainira le marché : il resolvabilisera la deman...

à écrit le 05/06/2023 à 13:57
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Il faudrait aussi peut-être s'attaquer aux APL car sans leur adjoindre un encadrement des loyers, il était évident que les propriétaires profiteraient de l'occasion pour augmenter indument les loyers...

à écrit le 05/06/2023 à 11:26
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Avec le PINEL, l'Etat a favorisé les rentiers au détriment des primo-accédants. Aujourd'hui de nombreux locataires paient des loyers largement supérieurs aux mensualités de crédit (+assurances +charges) dont il sont exclus. Pourquoi ne pas étudier l...

le 05/06/2023 à 15:13
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Bonjour, Non le PINEL ne favorise pas les rentiers. Des études montrent que l'état offre 30% de réduction d'impôts sur 9 ans ou autres, associées à des conditions de locations strictes, tout en retouchant sous 2 ans environ 38 a 42% du montant de l...

à écrit le 05/06/2023 à 11:26
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Avec le PINEL, l'Etat a favorisé les rentiers au détriment des primo-accédants. Aujourd'hui de nombreux locataires paient des loyers largement supérieurs aux mensualités de crédit (+assurances +charges) dont il sont exclus. Pourquoi ne pas étudier l...

à écrit le 05/06/2023 à 8:41
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Bien sûre qu’il a raison, trop d’investissement dans la pierre se fait au détriment des autres secteurs, et le foncier devenant rare pour les épargnants fait exploser les prix. Il y a suffisamment d’ancien à retaper dans les centres ville et villag...

à écrit le 04/06/2023 à 21:07
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vu nos deficit il est en effet urgent d arreter la gabegie. et le PTZ et surtout le pinel en font parti. le marché ne doit pas etre faussé par l etat. On etait arrive a un point ou 50 % de la lcientele des promoteurs etaient des "investisseurs" en fa...

le 05/06/2023 à 14:16
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C'est sûr qu'avec un sevrage de l'immobilier, notre Président aura du mal à atteindre son objectif d'un chômage à 5% en 2027... quoiqu'une partie de la question des "emplois non pourvus" se résoudra toute seule...

à écrit le 04/06/2023 à 20:07
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Recette : Ii suffit de baisser les taux @nono et redresser l' économie au lieu de la planter à chaque tour de roues. Bruno homme a l' égo ..dilaté a l' air tellement jouissif sur ce sujet, comme sur tous les autres., BLM, ...

le 04/06/2023 à 20:27
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En "même temps" comme dirait manu, Nono fait le job pour le reste de la bande qui veut exproprier les français de leurs terrain et les obliger à reverser un loyer à l' état, même "bfmfumé-futé"?! en a parlé!. Mieux en...

le 05/06/2023 à 13:18
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@Gedeon : le problème de fond, c'est que ça fait un demi-siecle que la classe politique gère pour la tranche d'âge née dans les années 40, ce qui a sclérosé la société à une vitesse vertigineuse. Concrètement, ce qui était à la portée du plus grand n...

à écrit le 04/06/2023 à 19:58
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Pinel tout comme tous les dispositifs équivalents qui ont existé jusque là permettent aux promoteurs de surfacturer les biens à vendre en mettant en avant l'avantage fiscal qui de fait n'en est pas un .Je suis tombé dans le piège , à l'époque c'étai...

le 05/06/2023 à 13:51
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Pour ma part, j'ai été harcelé pendant des années par des "cabinets de conseil en defiscalisation" cherchant à me vendre du Robien généralement localisés non pas là où étaient les besoins, mais où foncier ne coûtait rien...

à écrit le 04/06/2023 à 15:12
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Le gouvernement a bien raison (une fois de plus) : on est arrivé au bout du système, définitivement cassé par la hausse des taux et les surcoûts des normes environnementales, puisque les Français ne peuvent plus devenir propriétaires primoaccédants. ...

le 04/06/2023 à 15:50
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Bonjour Les propriétaires bénéficiant d'une réduction d'impôt pour leur achat immobilier avait eux des loyers plafonné. Les loyers sont moins chère que les loyers du marché. Faite faire les investisseurs privés et il n'y aura plus de bien en locati...

à écrit le 04/06/2023 à 14:52
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En Allemagne le coût du logement est environ en moyenne 30% moins cher qu'en France ....Les allemands ont donc un meilleur pouvoir d'achat .

le 04/06/2023 à 15:08
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En Allemagne le PIB par habitant est 15 à 20 % supérieur à celui de la France. Les Allemands sont plus riches que les Français !

à écrit le 04/06/2023 à 13:30
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Une Mesurette rendez nous notre liberté les aides non merci

à écrit le 04/06/2023 à 11:56
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Tant que la construction en France coutera 30 à 40% plus cher que dans les autres pays au développement comparable (normes environnementales et d'urbanisme, couts liés aux autorisations administratives et à leur lourd contentieux,...) il faudra aider...

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