Emirates, Flydubai, Etihad... les compagnies des Emirats arabes unis reviennent à la charge pour avoir plus de vols vers la France

La France va-t-elle céder aux sirènes émiraties au détriment d'Air France ? En pause depuis des années, la question se pose à nouveau. Les Emirats arabes unis demandent de nouvelles autorisations de vol pour permettre à leurs compagnies - Emirates en tête - d'accroître leur offre sur l'Hexagone. Une situation où Air France est celle qui a le plus a perdre, mais qui joue la carte du "business as usual" pour le moment.
Léo Barnier
Les Emirats Arabes Unis sollicitent des réunions avec la France pour obtenir davantage de droits de trafic.
Les Emirats Arabes Unis sollicitent des réunions avec la France pour obtenir davantage de droits de trafic. (Crédits : Ahmed Jadallah)

Les vols entre les Emirats Arabes Unis et la France vont-ils bientôt se multiplier ? Voilà 10 ans que les compagnies émiraties n'ont pas obtenu de nouveaux droits de trafic en France, alors que leur voisine Qatar Airways dispose d'un accord de ciel ouvert avec l'Union européenne depuis 2021, qui lui permet de s'affranchir de toute restriction du nombre de vols. La situation pourrait être amenée à évoluer avec la tenue de plusieurs consultations aéronautiques bilatérales. Une première salve était prévue les 12 et 13 décembre derniers lors d'une réunion à Paris entre les autorités de l'aviation civile des deux deux parties, et une nouvelle session vient d'être programmée pour les 11 et 12 juin prochain, à Paris également. Si le résultat n'est pas encore connu, les pressions sont sans doute fortes au moment où Emirates renouvelle sa flotte et où les Emirats arabes unis viennent d'acheter 80 Rafale, comme ce fut déjà le cas par le passé, même si sur le papier, seules l'évolution du trafic aérien doit servir de boussole à une négociation sur les droits de trafic.

Ces consultations se sont naturellement faites à la demande des autorités émiraties, les compagnies du Golfe ayant tout intérêt à accroître leurs droits de trafic vers la France pour alimenter leurs hubs, alors qu'Air France a un intérêt limité à renforcer sa desserte de Dubaï et d'Abu Dhabi.

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Les nouveaux enjeux d'Emirates

Cette demande intervient donc au moment où Emirates lance le renouvellement de sa flotte, d'abord ses Boeing 777-300ER, puis ses Airbus A380. Si Boeing a pris l'avantage pendant le salon aéronautique de Dubaï en novembre dernier, Airbus n'a pas renoncé en réussissant à placer in extremis son A350. Mais le match n'est pas encore fini et la question des droits de trafic a déjà été mise en balance dans ce genre de négociations par le passé.

C'est d'autant plus le cas qu'Emirates est en train de sortir de son modèle de flotte centrée autour de deux appareils à très forte capacité pour intégrer un éventail d'avions plus variés et plus petits, avec les A350 l'an prochain puis les 787. Comme le confiait récemment Adnan Kazim, directeur commercial de la compagnie, cela permettra d'ouvrir de nouvelles routes secondaires, mais pas seulement. « Vous pouvez ajouter plus de fréquences sur les destinations existantes », déclarait-il à La Tribune en novembre dernier, et ainsi renforcer le cœur de marché sur lequel s'est appuyée Emirates pour se redresser après la crise sanitaire.

Si Adnan Kazim prenait alors l'exemple d'un A380 sur la fréquence principale et d'avions plus petits en complément, dans le cas de Paris cela pourrait se traduire par l'ajout d'un vol en plus des trois rotations quotidiennes actuelles réalisées en A380, ou encore le remplacement d'un aller-retour en A380 par deux rotations d'avions plus petits afin de jouer sur la fréquence et le remplissage. Sans compter qu'Emirates dessert aussi Nice et Lyon quotidiennement, et n'a jamais caché son intérêt pour d'autres villes en France dépourvues de connexions directes avec le Moyen-Orient.

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Pression économique

Dans un document publié mi-2023, la compagnie mentionnait qu'elle « utilisait pleinement les fréquences passagers prévues par l'accord bilatéral entre la France et les Émirats arabes unis », mais qu'avec « 35 vols hebdomadaires, la France reste comparativement mal desservie par Emirates par rapport à d'autres pays européens tels que le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Italie ». Rappelant au passage tous les apports économiques générés en France (emplois directs, commandes d'Airbus et achats aux grands équipementiers, sponsoring sportif...), le document ne manquait pas d'indiquer très basiquement que « plus de connectivité égale plus d'emplois » et que « toute augmentation future de la connectivité contribuerait à stimuler la croissance économique française, à accroître la compétitivité mondiale des entreprises, à faciliter les exportations, à créer plus d'emplois et à favoriser le tourisme - en somme, à créer plus de valeur pour la France ».

Si Emirates apparaît comme la candidate la plus évidente pour mettre en œuvre d'éventuels nouveaux droits de trafic, elle n'est pas la seule. La compagnie low cost Flydubai a passé sa première commande d'avions long-courrier avec 30 Boeing 787. De quoi venir desservir l'Europe de l'Ouest, elle qui s'arrête en Autriche pour le moment avec ses 737 MAX. Et comme il s'agit bien de négociations avec les Emirats arabes Unis, et non Dubaï uniquement, Etihad pourrait également se montrer intéressée. La compagnie d'Abu Dhabi vient de renforcer son partenariat avec Air France-KLM, avec une coopération sur les programmes de fidélité et plus de 60 destinations en partage de code, qu'elle dessert désormais Paris et Amsterdam quotidiennement et qu'elle ouvrira une liaison sur Nice l'été prochain.

Air France joue la détente

Air France pourrait être la première à pâtir d'une expansion des compagnies du Golfe dans l'Hexagone, sans réels bénéfices en retour au vu du marché émirati. Pourtant, cela ne semble pas susciter d'émoi particulier du côté de la compagnie nationale, où l'on avance que ce type de discussions bilatérales revient régulièrement, que les pressions qui entourent ces dossiers ne sont pas nouvelles, et que les ambitions affichées par Emirates pour la France sont somme toute logiques et cohérentes avec leur stratégie. « Il n'y a pas d'alerte particulière quant à ces négociations » laisse-t-on tout juste entendre du côté de la direction.

Le ton est loin de celui connu par le passé. A l'image de Pierre-Henri Gourgeon, directeur général d'Air France-KLM, qui vidait son sac dans une interview à La Tribune fin 2010 : « Nous demandons que les droits de trafic ne soient plus accordés à ces compagnies tant qu'elles disposent d'un avantage concurrentiel inacceptable qui relève à nos yeux de la distorsion de concurrence. »

Léo Barnier

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Commentaires 7
à écrit le 03/01/2024 à 7:56
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La connivence entre les hommes politiques français vis à vis des pétro-monarchies du golfe persique est pathétique et nuisible pour les intérêts de la France.

à écrit le 30/12/2023 à 10:02
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D'accord! Pour qu'ils viennent dépenser leur sous dans nos palaces et nos casinos (éventuellement chez Casino, mais il n'y en a pas Place Vendôme à Paris), mais il faudrait qu'ils nous consentent un rabais sur le prix du pétrole.

à écrit le 29/12/2023 à 19:38
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Quelques dons a des micro partis, des ONG gouvernementales, à des œuvres caritatives dirigées par les conjoints des Hommes politiques et cela devrait le faire. Le Qatar sait faire.

à écrit le 29/12/2023 à 18:33
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La population des Emirats est ridiculement petite : quel intérêt d'accepter ... ?

le 27/04/2024 à 18:55
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Remplir les chaines d’Airbus d’avions Emiratie et Qatarie bien sur ce que Air France ne fait pas

à écrit le 29/12/2023 à 14:19
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Saine concurrence! Airfrance offre des prix corrects en premium mais souvent supérieurs à la concurrence. Je viens d'acheter un Seoul- Paris-Rennes pour le 8 mars en aller simple = €1280,- en premium économie. Si j'avais pris China- Eastern, je pouva...

le 30/12/2023 à 9:48
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d'accord avec vous avec la "saine concurrence". Cela étant dit, le rapport qualité - service - prix offert par AF, dans n'importe quelle classe, est lamentable comparé... à la concurrence, justement. En-dehors de la médiocrité des repas peut-être ser...

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