Coup dur pour les salariés d'Aigle Azur. Les 14 manifestations d'intérêt déposées ce lundi pour la reprise de tout ou partie de la compagnie "ne sont pas recevables en l'état et sont à parfaire", a estimé l'administratrice judiciaire, Catherine Poli. Notamment celle d'Air France, considérée lundi par les syndicats comme l'une des plus intéressantes en termes d'emplois.
Problème : pour voir son offre recevable, Air France doit la modifier considérablement. En effet, selon plusieurs proches du dossier, son offre déposée lundi dernier ne tient pas la route juridiquement. Elle n'est compatible notamment avec la réglementation sur les créneaux horaires de décollage et d'atterrissage ("slots"), la principale motivation de la plupart des autres repreneurs dans le dossier Aigle Azur. Et notamment avec les règles de transfert des créneaux.
Branche autonome d'activité
Le Règlement européen sur les créneaux est très clair. Il ne peut y avoir de transfert des lots d'une compagnie à une autre qu'en cas d'une reprise totale ou partielle de l'activité, à laquelle les créneaux sont liés. Plus précisément, pour avoir les créneaux d'Aigle Azur, les repreneurs doivent reprendre ce que l'on appelle en droit «une branche autonome d'activité », c'est-à-dire les contrats de location des avions, le personnel, les locaux..., tout ce qui est attaché à l'activité reprise et qui permet sa continuité et son fonctionnement. Selon des sources proches du dossier, Cohor, l'association pour la coordination des horaires, en charge de la gestion des créneaux de décollage, a rappelé ce mardi les règles de transfert des créneaux aéroportuaires à l'administratrice judiciaire. Histoire d'écarter le risque de voir des offres de reprise acceptées sans que soient possibles les transferts de créneaux.
Or, la première mouture de l'offre d'Air France ne respecte pas ces critères. Dans son offre, la compagnie indique en effet vouloir obtenir le transfert de 100% des créneaux horaires d'Aigle Azur (9.600 selon elle et non 9.800 comme Aigle Azur l'indiquait) et exploiter les lignes transférées "en direct avec les moyens du groupe Air France (Air France ou Transavia)". Concernant la reprise du personnel, Air France se dit néanmoins prête "à ouvrir à l'ensemble des salariés d'Aigle Azur qui souhaiteraient postuler à Air France un processus de sélection dédié". Dans le cadre de ce processus, Air France indique qu'elle envisagerait d'ouvrir 515 postes. Aigle Azur compte 1.150 salariés, dont 350 en Algérie.
De fait, sans reprendre les avions, sans apporter les garanties suffisantes aux salariés d'Aigle Azur, l'offre d'Air France (qui inclut une enveloppe totale de 15 millions d'euros) ne propose pas de reprendre « une branche autonome d'activité », et ne peut pas par conséquent obtenir les créneaux horaires demandés. Que va faire la compagnie ? Va-t-elle amender son offre ? Ne rien toucher ? Le timing pour proposer une offre est très serré. Les offres doivent arriver avant leur présentation vendredi au comité d'entreprise. Une audience se tiendra lundi 16 septembre au tribunal de commerce d'Evry. Contactée ce matin, Air France n'a pas répondu à nos sollicitations.
Encadré : ce que veut faire Air France avec les "slots"
Air France compte utiliser 71% pour exploiter les lignes assurées jusque-là par Aigle Azur sur l'Algérie et le Liban (à condition d'obtenir les droits de trafic) et, 29% pour développer son offre soit sur les lignes précédemment exploitées par Aigle Azur comme le Portugal, soit sur ses propres lignes Air France. Au total, Air France propose de reprendre 70% des lignes et fréquences d'Aigle Azur.
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