BONNES FEUILLES. « Wall Street en Feu » 2/28

ÉPISODE 2/28. La Tribune vous offre 28 épisodes d'un thriller financier hautement addictif. Si vous avez aimé La Firme de John Grisham, alors vous succomberez au premier roman de Thomas Veillet, ex-trader de la banque UBS devenu journaliste financier : « Après avoir vécu l'horreur des combats en Afghanistan, Tom Kelcey pose son paquetage à New York. Bien résolu à se défaire des stigmates de la guerre, il entame une prometteuse carrière de trader à Wall Street, dans une prestigieuse salle des marchés. Son sens de l'observation lui permet de détecter des anomalies et de réaliser des profits colossaux ; sans le savoir il vient de déranger de puissants intérêts ».
(Crédits : Talent Editions)

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Après quarante-cinq minutes de métro, Tom Kelcey avançait d'un pas rapide en direction du nord, heureux de se dégourdir les jambes. Malgré son visage avenant, il activait déjà son « mode tueur », presque en apnée pour toute la journée. Les quelques heures qui précédaient la cloche de Wall Street lui donnaient l'impression d'être dans le vestiaire, tel le boxeur qui va monter sur le ring. L'excitation montait et, bon Dieu, il adorait ça.

À quelques pâtés de maisons de là, empêtré dans les embouteillages, William « Bill » Callahan ruminait au volant de sa Dodge Charger 69, de fort méchante humeur. Contrairement à Tom Kelcey, Callahan était un vieux loup de Wall Street. Il avait écumé le « floor » une bonne partie de sa carrière, vivant mal le passage à l'électronique, mais il s'accrochait - il existait peu de boulots avec lesquels on pouvait se faire cinq cent mille dollars par an, sans aucun diplôme ou sans être une escorte de haut vol. La soixantaine en approche, il ne lâchait pas le morceau, mais, année après année, il se perdait en meetings stériles et en politique interne, au lieu de débusquer de bons coups dans la salle des marchés, à l'ancienne. La frustration dominait dans ce qui s'apparentait à une fin de carrière sans gloire pour cet Américano-Irlandais fier de ses origines. Son grand-père, débarqué aux États-Unis au début du siècle dernier, avait tout quitté pour tenter l'aventure sur les terres de la liberté. Il avait fait l'acquisition d'un premier bar aussitôt transformé en pub irlandais. À force de travail et d'abnégation, son établissement était devenu le repaire de la police new-yorkaise au milieu du siècle. Bill se rappelait encore les mains immenses de son grand-père quand il le prenait dans ses bras. À chaque fois qu'il pensait à son aïeul, il s'imaginait tout le chemin parcouru par sa famille... et lui-même.

Son trajet matinal depuis Tarrytown, dans le nord de New York, l'avait mis à cran. Pas d'autre choix que de prendre la voiture, car l'imbécile de PDG de Brodman, Zimmerman & Sons l'avait invité ce soir dans sa résidence des Hamptons. Et il ne se voyait pas rentrer chez lui à l'aube, en métro. Restait plus qu'à trouver une place de parking qui ne lui coûterait pas un mois de salaire, ce qui, dans ce quartier du sud de New York, était aussi probable que de voir les Jets remporter le Superbowl.

Bill Callahan ne fulminait pas qu'à cause de la circulation. Le fait d'être convoqué chez le big boss avant la Christmas Party annuelle n'augurait rien de bon. Il n'avait pas la moindre idée de ce que son supérieur pouvait bien lui vouloir et cela l'énervait d'autant plus. Dans son métier, il avait toujours appris à anticiper, alors que dans le cas présent, il subissait. Son cardiologue aurait certainement poussé des hauts cris face à son état psychologique et nerveux. Bill était stressé comme jamais il ne l'avait été dans sa carrière. Il commençait d'ailleurs à se dire qu'il serait temps de passer à autre chose. La soixantaine arrivant, il y réfléchissait de plus en plus souvent. Mais mis à part écumer le monde de l'investissement et hurler sur ses traders, il n'avait que peu de talents à mettre en avant.

- Putain de merde ! hurla-t-il, alors qu'un imbécile venait pratiquement de se jeter sous ses roues.

Un réflexe instinctif sur la pédale de frein. Il ne savait pas très bien comment il avait réussi à éviter cet imbécile sur le passage piéton.

- Oh, Bill, tu veux déjà te débarrasser de moi ? Il suffit de le dire, tu sais ? Un seul mot de ta part et je m'en vais !

Perdu dans son stress du moment, Callahan n'avait pas reconnu Tom Kelcey, un de ses traders. Un type très difficile à détester. En plus de rapporter beaucoup d'argent, il se montrait d'une gentillesse rare dans ce métier. Discret et attentionné, Tom faisait exception dans le milieu des traders, une sorte de meute de chiens alphas. Lui avait su trouver sa place par le travail et de beaux succès, sans arrogance ni agressivité.

Le jeune trader se tenait devant le capot de la Dodge avec un large sourire et les bras écartés, plein d'incompréhension. Bill sortit la main par la fenêtre et fit signe à son subordonné de dégager, ce que celui-ci fit en riant alors que quatre camions de livraison derrière la Dodge jouaient déjà du klaxon. Bill écrasa l'accélérateur en frôlant le trader à la recherche de son Graal matinal : une place de parking disponible.

Tom Kelcey, au contraire, était plutôt heureux et détendu. Il se rendait compte que la vie avait été plutôt généreuse avec lui. Quelques années auparavant, au fond d'un trou au milieu de l'Afghanistan, il avait eu la certitude de ne jamais en réchapper. La violence et les horreurs, il en avait eu son lot. Positiver, positiver, positiver... Il avait une vie à reconstruire, et pour l'instant, tout cela fonctionnait plutôt bien... même si l'on ne sombrait pas dans l'euphorie à la maison, avec sa compagne Rebecca.

À son retour d'Afghanistan, Tom avait rencontré Rebecca lors d'un match de baseball au Yankee Stadium. Elle avait rapidement attiré son regard en étant la seule spectatrice à suivre un match de football sur sa tablette en plein match de baseball. Elle lui avait expliqué par la suite qu'elle détestait ce sport mais qu'elle avait dû venir avec un ami. Au début de leur relation, les choses n'avaient pas traîné. Rebecca avait rapidement emménagé chez lui. C'était une jeune femme adorable mais un peu superficielle, qui adorait faire les boutiques, sortir le soir en boîte, tout ce que Tom détestait. Mais l'ancien militaire se sentait seul et la jeune femme s'était montrée très présente, aux petits soins. Puis la relation s'était assez rapidement délitée. Deux êtres aussi différents ne pouvaient raisonnablement pas envisager de vivre une passion idyllique pendant des dizaines d'années.

Tom secoua la tête comme pour se sortir de cette réflexion désagréable et tenta de retrouver son « mode tueur ». Chaque matin, l'approche de l'ouverture des marchés lui procurait des bouffées de bien-être. Il se sentait vivant. À sa place. Et même parfois, il avait le sentiment d'être quelqu'un d'autre, de l'ouverture à la clôture. Souvent, le soir après une journée complète, quand la cloche de la fermeture retentissait, il avait comme un regret au fond de lui, l'envie que ça dure encore. Il avait compris qu'il était complètement accro à l'adrénaline des marchés.

Tom entendit une voix familière derrière lui sur le trottoir :

- Alors, tu es revenu ce matin ?

Le trader Lamar Loggins, son voisin direct dans la salle des marchés, fit gentiment barrage de sa personne. Avec ses cent vingt kilos de surface carressable, comme il les qualifiait, et son sourire omniprésent, Lamar était un type attachant. Cet ancien footballeur américain avait dû arrêter sa carrière prématurément pour un satané problème de genou. Un beau bébé afroaméricain d'un mètre quatre-vingt-douze, dont la carrure massive avait tendance à se ramollir avec le temps. Mais son esprit et son humour étaient toujours aussi vifs.

- Je suis revenu parce que tu n'arrives pas à vivre sans moi et que tu ne saurais pas allumer ton Bloomberg* si je n'étais pas là, rétorqua Tom.

- Je savais allumer un Bloomberg alors que tu barbotais encore en tenue de camouflage quelque part chez les marchands de chameaux ! balança Lamar en lui écrasant la main.

Puis il s'aligna sur le pas de son collègue en direction de leur bureau.

- Alors, passé un bon week-end, lieutenant ?

Tom ne put s'empêcher d'esquisser un sourire en entendant son grade militaire. Difficile de tirer une croix sur cette période de sa vie, il y pensait constamment. Pas que ça lui manquait... Par contre, l'esprit d'équipe dans lequel il avait alors baigné lui faisait défaut dans la vie civile. Son sourire se para d'une pointe de nostalgie lorsqu'il répondit à Lamar :

- Ouais, pas mal, vu le temps merdique qu'on a eu. J'ai passé le plus clair de mon temps dans le garage à bricoler mon Raptor. Et puis samedi soir, j'ai quand même sorti madame pour aller manger du crabe chez Nick's Lobster House.

- Encore du crabe ! Mais vous n'en avez pas marre ? Tu as demandé à Rebecca si elle avait envie d'autre chose de temps en temps ?

Comportement typique des échanges matinaux entre traders, les deux hommes ne pouvaient s'empêcher de s'envoyer des piques ironiques. Leur petit rituel. Tom savait que ça ne menait à rien, mais il ne pouvait faire autrement que de relancer :

Service en ligne d'information économique et boursière.

- Arrête, Lamar, elle adore ça ! On adore ça tous les deux. C'est peut-être pour ça qu'elle est avec moi, parce que j'en mangerais à tous les repas. Et puis si ça ne lui plaît pas, elle peut le dire, mais comme elle ne dit rien...

Il laissa sa phrase en suspens, comme s'il savait que sa réplique n'avait aucun sens.

- Bah, tu sais bien qu'elle est avec toi pour ton corps de triathlète !

- Je ne fais pas de triathlon. Je m'entretiens sans excès...

Les vannes de Lamar n'avaient pour but que de détendre l'atmosphère à l'approche des bureaux de Brodman, Zimmerman & Sons. Comme un passage obligé ou un antidote à la pression qui montait.

Dans le hall d'entrée, les deux hommes se plièrent à la reconnaissance faciale mise en place le mois dernier. Dernier joujou en date du patron de la boîte, Jason Dalmore. Un « fils de » qui avait hérité de son père et qui se prenait pour le nouveau caïd de Wall Street. Depuis qu'il avait racheté Brodman & Zimmerman, il avait tout rénové et modernisé, au grand dam des anciens, comme Bill Callahan, qui le détestaient cordialement. Ça ne déplaisait pas aux plus jeunes, encore fallait-il aimer passer tous les matins au scanner. Dans la période post-COVID, avec toutes les théories complotistes qui circulaient, certains ne jubilaient pas à l'idée de laisser leurs données faciales dans des serveurs aux quatre coins du monde ou pire, dans le cloud !

Alors que les deux traders pénétraient dans l'ascenseur, leur patron, Bill Callahan, était à deux doigts d'assassiner l'employé d'un parking. Le type se déplaçait à la vitesse d'une limace surmenée. Bill attendait depuis quinze minutes que l'employé place de façon poussive les véhicules des clients situés devant lui. Le conducteur commençait à craindre pour sa Dodge, la prunelle de ses yeux. Il tenta d'ailleurs de se souvenir du numéro de son avocat, au cas où il devrait l'appeler, une fois que le NYPD l'aurait coffré pour tentative de meurtre.

Après avoir frisé l'infarctus pendant que le type garait sa voiture dans un enchevêtrement indescriptible de carrosseries - marque de fabrique du parking new-yorkais -, Callahan paya son dû, frôlant une nouvelle fois l'incident cardiaque à la lecture du montant affiché. Il s'en alla d'un pas hésitant. Et pourquoi ne pas reprendre sa voiture, rentrer à la maison et se finir tranquillement au Talisker pour éviter le mystérieux rendez-vous du soir ?

Il n'arrêtait pas de se torturer les méninges, plus râleur que jamais. Depuis samedi matin, il avait échafaudé bon nombre de scénarios. Il avait épluché les dossiers chauds de la cinquantaine de traders sous ses ordres, passé à la moulinette les situations douteuses ou les trades susceptibles de froisser la susceptibilité de son milliardaire de patron. Mais rien... Rien qui lui sautât aux yeux, en tout cas. Il fouilla dans les poches de son manteau en laine, espérant vaguement trouver une clope, bien qu'il ait arrêté depuis des années - un vieux réflexe qui confirmait pleinement son état de stress. Peut-être que finalement, le big boss voulait seulement le virer.

Mais dans le scénario 23 de ses nuits sans sommeil, Dalmore ne l'aurait pas invité chez lui. Il aurait fait bosser ces imbéciles des RH. Après tout, ils n'étaient pas amis, ils ne s'appréciaient guère, sans même préserver les apparences. La réalpolitique : Jason Dalmore avait laissé Callahan à son poste car il était une denrée rare. On ne trouvait plus de vieux chevaux comme lui pour gérer une bande de traders qui se prenaient soit pour Gordon Gekko, soit pour Jordan Belfort, et qui se transformaient en alcooliques cocaïnomanes parce que ce n'était pas si facile que ça de « faire du fric ».

Depuis qu'il était dans le milieu, Callahan avait occupé tous les boulots possibles au sein d'une salle de trading : market-maker, sales, trader, chef de desk... Il fut un temps « spécialiste », comme ces gars qui traitaient les titres sur le floor à Wall Street, ceux que l'on voit encore parfois à la télévision pour le folklore.

Aujourd'hui, avec les bourses mondiales passées au tout-digital, ils ont disparu ou se sont recyclés. Les équipes de traders respectaient Callahan pour son expérience impressionnante, bien loin de ces universitaires parachutés en tant que chefs de salle et qui peinaient à obtenir le respect de leurs troupes.

- Oh, et puis merde ! jura-t-il, tout seul dans la rue.

Une jeune femme qui promenait son bébé dans une poussette se retourna en lançant un regard plein de reproches. Callahan ne la remarqua même pas.

En direction du 185 Pearl Street, il se raisonna. Il trouverait bien autre chose à faire s'il devait passer à la trappe. Il ne savait absolument pas quoi, mais il se sentait prêt pour une nouvelle aventure. Son fils volait de ses propres ailes, parti s'établir en Californie depuis longtemps. Bientôt cinq ans qu'il ne lui avait plus parlé. Sa femme, plus susceptible que jamais et qui détestait le travail de Bill par-dessus tout, ne verrait sans doute pas d'un mauvais œil un nouveau départ. Elle avait plusieurs fois insisté pour qu'ils vendent leur maison et partent s'établir là où la météo était plus clémente, non loin de son fils adoré. Sauf que Callahan n'arrivait pas à se résoudre à changer de métier et à tout recommencer à zéro, même si l'âge le poussait de plus en plus à y réfléchir... Sans compter son vieux pote qui le tannait depuis des mois pour bosser avec lui dans un hedge fund du côté du Connecticut. Mais le Connecticut n'était peut-être pas assez proche de la Californie pour sa chère épouse relativement pointilleuse quant à leur future implantation géographique.

Bill Callahan accéléra le pas. Il était temps d'aller voir ce qui se passait sur le floor de Brodman & Zimmerman. L'ouverture s'annonçait dans moins de deux heures.

Tom Kelcey n'était pas facilement impressionnable mais, après deux années passées dans l'entreprise, ce qu'il voyait l'émerveillait toujours autant. Un trading floor ne pouvait laisser indifférent. Derrière la porte coulissante du « ring », comme les traders l'appelaient, se dressaient quatre alignements de bureaux face à face sur une longueur proche d'un terrain de basket. Ils étaient une cinquantaine à occuper les lieux. Chaque trader disposait d'au minimum quatre écrans, et au maximum... Tom ne savait pas combien le type qui traitait les options en avait, mais les doigts d'une main ne suffisaient pas pour les compter.

On avait beau être au quarante-troisième étage d'une tour lambda du sud de Manhattan, la vue était bouchée par d'autres gratte-ciel plus ambitieux dans leur ascension vers les sommets. Impossible donc de flâner en se perdant sur le cours de l'Hudson, vers Ellis Island et la statue de la Liberté. Leur liberté, les traders la trouvaient dans la spéculation la plus échevelée, et surtout dans la performance.

L'espace entre chaque employé était optimisé : agoraphobes s'abstenir. On n'était pas loin des batteries de volailles. Et une fois assis, les affaires ouvertes, il était mal vu de quitter son siège. On vous livrait même à manger devant vos écrans pour ne pas perdre une miette des évolutions des marchés. Quant aux toilettes, il valait mieux prendre ses précautions et disposer d'une vessie spacieuse.

Le type qui prenait les commandes pour les repas de midi venait justement de commencer sa tournée. Les desks commençaient à se remplir. Sept heures trente, c'est déjà tard à Wall Street où la compétition faisait rage à tous les étages, où amitié et confiance constituaient des notions toutes relatives. Tom trouvait toujours étrange de commander son repas de midi alors que, souvent, il n'avait pas encore petit-déjeuné. Il est vrai qu'une fois la tête dans le guidon, le temps filait à des cadences prodigieuses. C'était d'ailleurs pour ça qu'il appréciait tant son travail : le stress, la tension, le rythme et pas le temps de passer trois heures à la machine à café pour commenter les matchs de baseball du week-end. De toute façon, il détestait le baseball, surtout depuis que les Mariners de Seattle n'étaient plus au top. Dès son premier jour chez Brodman & Zimmerman, il s'était senti à l'aise, sans avoir besoin de perdre son temps en chichis et en diplomatie. Il palpait presque cette tension omniprésente, sentait que le moindre écart pouvait se terminer aux poings. Il devait reconnaître des similitudes avec ce qu'il avait vécu à l'armée, la camaraderie en moins.

Alors que Tom était perdu dans ses pensées, Lamar arriva en courant derrière lui, le souffle court et la cravate déjà de travers.

- Tom, Tom, tu prends quoi à midi ? Je viens de choper le gars du Deli, je t'ai commandé comme d'habitude, c'est bon ?

- Si tu as déjà commandé, que veux-tu que je fasse d'autre ? lui répondit Tom.

Lamar le dévisagea avec un regard qui ferait passer celui de Donald Trump pour intelligent. Il riposta, toujours aussi jovial :

- Eh, mec, ça fait deux ans que tu commandes systématiquement le même sandwich, la même salade et que tu bois le même soda immonde au pamplemousse. Alors me fais pas le coup du type brimé parce que j'ai anticipé tes désirs !

Et il écroula sa lourde carcasse sur sa chaise en mimant la contrariété.

Kelcey éclata de rire :

- C'est bon, Lamar ! Ne boude pas, ça accentue ton double menton !

Le trader lui répondit par de grands gestes prohibés à l'église le dimanche. En même temps, il s'en fichait, il n'allait pas à l'église. Ni lui ni Lamar d'ailleurs.

Ce dernier avait grandi dans le milieu du football américain, renonçant à toute pensée religieuse pour se concentrer uniquement sur le foot, le foot et le foot. De plus, la mère de Lamar était décédée lorsqu'il avait vingt ans. Cela lui avait définitivement retiré toute envie d'imaginer, ne serait-ce qu'un seul instant, qu'il puisse exister un quelconque Dieu bienveillant, là dehors.

L'heure avançait et la salle continuait de se remplir. Ce n'était clairement pas la plus grande de la région - l'immense salle de l'UBS, en son temps, pouvait contenir mille huit cents personnes sur un seul plateau, une structure qui ressemblait à un hangar pour Airbus A380. La salle de Brodman & Zimmerman n'affichait pas de pareilles dimensions, mais on y faisait encore du trading à l'ancienne, avec des gars qui se creusaient les méninges et ne se contentaient pas d'appuyer sur Enter. Pas besoin de faire tourner un ordinateur avec plus de puissance de calcul que celui de la NASA lors du départ d'Apollo 11 vers la Lune. Jason Dalmore se faisait un point d'honneur à conserver ce savoir-faire. Il semblait s'être bercé des exploits de Gordon Gekko dans Wall Street, persuadé que Di Caprio avait réellement travaillé dans une salle de trading.

A suivre...

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(*) Service en ligne d'information économique et boursière.

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