Réglementation des bâtis neufs : le gouvernement revoit sa copie

Sous la pression des professionnels de la construction, l'exécutif vient d'actualiser la "RE2020".
César Armand
La RE2020 encouragera le recours aux matériaux biosourcés, géosourcés et aux matériaux plus usuels comme la brique et le béton qui se seront décarbonés ainsi que l'introduction de davantage de mixité de matériaux, explique Emmanuelle Wargon.
La RE2020 "encouragera le recours aux matériaux biosourcés, géosourcés et aux matériaux plus usuels comme la brique et le béton qui se seront décarbonés ainsi que l'introduction de davantage de mixité de matériaux", explique Emmanuelle Wargon. (Crédits : Manubois)

C'est un euphémisme que d'écrire que la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs, dite "RE2020", présentée en novembre dernier, a fait l'effet d'une bombe auprès des professionnels: trop rapide à mettre en oeuvre, trop excluante dans le choix des matériaux... Pensée pour "donner la primauté à la sobriété énergétique et à la décarbonation" et "adapter [les bâtis] aux vagues de chaleur", elle devait s'appliquer dès le 1er janvier 2021, avant, du fait de la crise sanitaire, d'être reportée au 1er juillet 2021.

Une entrée en vigueur encore décalée de six mois, au 1er janvier 2022

Nouveau changement de braquet ce 18 février 2021: les ministres de la Transition écologique et solidaire et du Logement ont annoncé son entrée en vigueur le 1er janvier 2022. "Cette date laisse les quelques mois nécessaires à l'ensemble de la filière et notamment aux concepteurs et promoteurs pour mettre leurs projets en conformité avec les nouvelles exigences", déclarent de concert Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon.

Ce décalage était effectivement demandé par les professionnels du logement neuf qui, entre l'ajournement des élections municipales et la Covid-19, subissent une chute de leur activité, la délivrance de permis de construire s'effondrant de jour en jour.

De même que les autres jalons prévus par la RE2020 (2024, 2027 et 2030) sont repoussés d'un an: 2025, 2028 et 2031.

Grand retour du gaz

Cette nouvelle mouture de la réglementation environnementale marque également le grand retour du gaz, alors que "ce n'[était] plus une énergie privilégiée" il y a encore trois mois. Le gaz alimentant les trois quarts des nouveaux bâtis à l'heure actuelle. "Des permis de construire pour des maisons individuelles chauffées au gaz pourront être obtenus jusqu'à fin 2023 lorsqu'un permis d'aménager prévoyant une desserte en gaz a déjà été délivré", affirment les deux ministres.

Pour le biométhane, lui aussi écarté de la première version de la RE2020, "la réflexion sur des mécanismes spécifiques de développement pour les projets de construction se poursuivra", précisent Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon.

Revirement sur les matériaux de construction

En réalité, le mécontentement des acteurs de la construction était sur le choix des matériaux. Lors de la présentation initiale en novembre, les ministres avaient lourdement insisté sur le bois et les matériaux biosourcés, c'est-à-d'origine locale, végétale et animale, type biomasse, chanvre, lin ou paille. Tant est si bien que les producteurs de matières géosourcées, c'est-à-dire d'origine locale et minérale, type pierre de taille ou terre crue, avaient le sentiment d'être écartés, alors que leurs sites de production sont autant proches des terrains d'application que les matériaux biosourcés.

Là encore, le discours a changé. La ministre du Logement souligne désormais que la nouvelle réglementation repose sur une exigence de résultats et non de moyens, conformément à la loi Élan de 2018 porté par son prédécesseur, permet de faire place à la diversité des modes constructifs et favorise la mixité des matériaux. La RE2020 "encouragera le recours aux matériaux biosourcés, géosourcés et aux matériaux plus usuels comme la brique et le béton qui se seront décarbonés ainsi que l'introduction de davantage de mixité de matériaux", explique Emmanuelle Wargon.

Ainsi, à l'horizon 2031, sous réserve de décarbonation, "tous les matériaux continueront d'être utilisés selon leurs atouts respectifs", ajoute-t-elle. Autrement dit, les filières de la construction métallique comme celle de l'aluminium, qui se déclarent "sous le choc" ce soir, ont (encore) dix ans pour se verdir.

L'industrialisation au centre des échanges

L'industrialisation de la construction, qui avait fait l'objet d'un rapport de l'économiste Robin Rivaton et du patron de Viparis Bernard Michel, a, elle, été au centre des échanges entre les ministres et les grandes fédérations de la construction, juste avant la conférence de presse, assurent Emmanuelle Wargon et Barbara Pompili. Il était temps ! L'étude avait été commandée début... 2019 par l'ex-ministre du Logement Julien Denormandie.

Lire aussi : RE2020: « Nous voulons anticiper et même aller au-delà »(Olivier Wigniolle, Icade)

César Armand

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Commentaire 1
à écrit le 19/02/2021 à 9:47
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Ca me fait penser à un titre de San Antonio: "Ca baigne dans le bêton !"

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