Rolex France écope d'une amende de 92 millions d'euros pour avoir interdit la vente en ligne de ses montres

L'Autorité de la concurrence a infligé une amende de 91,6 millions d'euros à la filiale française du fabricant de montres suisse Rolex. Cette dernière a interdit à ses distributeurs de vendre ses produits en ligne « pendant plus de dix ans » en passant avec eux des « contrats de distribution sélective ». Une pratique jugée « grave » et « restrictive » en matière de concurrence.
Pour justifier l'interdiction de vente en ligne, Rolex invoquait le souci de préserver son image et de lutter contre la contrefaçon.
Pour justifier l'interdiction de vente en ligne, Rolex invoquait le souci de préserver son image et de lutter contre la contrefaçon. (Crédits : © Jakub Porzycki / NurPhoto / NurPhoto via AFP)

Alors que le e-commerce n'a eu de cesse de se développer depuis plus de dix ans, Rolex France, lui, a interdit à ses distributeurs de vendre en ligne des montres de luxe. Résultat, la filiale de l'horloger suisse vient de se voir écoper d'une amende de 91,6 millions d'euros par l'Autorité de la concurrence, comme annoncé ce mardi par communiqué.

Le gendarme de la concurrence en France avait été saisi par l'Union de la Bijouterie Horlogerie, ainsi que le joaillier Pellegrin & Fils. Dans son viseur : la méthode de commercialisation choisie par la filiale française du fabricant.

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Mauvais contrat

En pratique, Rolex France s'appuie exclusivement sur un réseau de revendeurs indépendants agréés, avec lequel elle se lie via un « contrat de distribution sélective ». Or, ce dernier leur interdit de vendre les montres de la marque par correspondance, et donc via Internet.

« Les stipulations du contrat de distribution sélective caractérisent une entente verticale restrictive de concurrence », a tranché l'Autorité de la concurrence. Ces pratiques sont « graves, car elles reviennent à fermer une voie de commercialisation, au détriment des consommateurs et des distributeurs, alors que la distribution en ligne connaît depuis quinze ans un essor croissant pour les produits de luxe, y compris les montres », explique-t-elle.

Le montant élevé de l'amende se justifie, selon elle, « compte tenu de leur durée (plus de dix ans) et de leur nature ». Et bien qu'elle soit prononcée à l'encontre de Rolex France, le gendarme de la concurrence tient d'autres entités du groupe suisse (Rolex Holding SA, Rolex SA et la fondation Hans Wilsdorf) « solidairement responsables du paiement ».

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Les arguments de Rolex balayés

Pour justifier l'interdiction de vente en ligne, Rolex invoquait, de son côté, le souci de préserver son image et de lutter contre la contrefaçon. Si ces deux préoccupations sont légitimes aux yeux de l'Autorité, elle estime que l'interdiction totale de la vente en ligne n'est pas « proportionnée » aux objectifs poursuivis.

« Les principaux concurrents de Rolex, eux-mêmes confrontés à ce type de risques, ont mis en place des solutions (notamment technologiques) permettant de concilier vente en ligne et lutte contre la contrefaçon et la vente hors réseau », note-t-elle d'ailleurs.

Le gendarme de la concurrence a, en outre, profité de cette communication pour s'exprimer sur un autre dossier concernant Rolex. Il était également reproché à l'entreprise d'avoir conclu « une entente généralisée avec ses distributeurs pour fixer le prix de vente au détail de ses montres ». L'Autorité a estimé que cette pratique n'était « pas établie » et a donc prononcé un non-lieu concernant ce second grief.

Une amende de quatre millions d'euros pour Mariage Frères

Rolex n'est pas la seule entreprise épinglée par l'Autorité de la concurrence sur ses pratiques de commercialisation. La semaine dernière, elle a aussi infligé une sanction de quatre millions d'euros au producteur de thé Mariage Frères, néanmoins susceptible de recours.

L'un des principaux producteurs de thés haut de gamme en France, a « entravé, durant près de 15 ans, la liberté commerciale de ses distributeurs en leur interdisant, d'une part, de vendre en ligne les produits de sa marque, et, d'autre part, de revendre ses produits à d'autres revendeurs », avait justifié l'Autorité.

Cette double interdiction figurait depuis juillet 2008 dans les conditions générales de vente (CGV) applicables au réseau de distribution de Mariage Frères. Les distributeurs pouvaient indiquer sur leur site internet qu'ils commercialisaient les produits du groupe Mariage Frères dans leur boutique, mais ils ne pouvaient ni les vendre sur Internet, ni utiliser le logo de la marque.

« De nombreux distributeurs, souvent des petites, voire de très petites entreprises, ont souffert de cette interdiction, qui a été un frein pour le développement de leur activité », notait le gendarme de la concurrence. « Parallèlement, entre 2013 et 2021, (...) la part des ventes réalisées en ligne par le groupe Mariage Frères (pour l'essentiel, via son site ou via Amazon) a quant à elle plus que triplé », était-il précisé.

(Avec AFP)

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Commentaires 3
à écrit le 20/12/2023 à 9:12
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Autant je trouve que cette mode de riches est d'un goût particulièrement douteux hurlant de désespoir ce déclin systémique, autant je ne vois pas pourquoi on leur interdit de faire ce qu'ils veulent.

le 20/12/2023 à 11:05
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Les riches doivent pouvoir faire ce qu'ils veulent, sinon à quoi ça sert ? :-) Au dessus de certaines sommes à l'unité les règles du commerce 'courant' ne devraient plus s'appliquer, le luxe a (ou pas) ses règles 'particulières', hors sol, dans les ...

le 20/12/2023 à 12:26
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"Les riches doivent pouvoir faire ce qu'ils veulent, sinon à quoi ça sert ? :-) " Ben pour une fois que leur caprice n'impacte pas directement la classe productrice je comprends pas on leur interdit, si ça peut leur faire plaisir en ne coutant aucune...

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