Construction d'un deuxième aéroport à Lisbonne : une volte-face qui pourrait en cacher une autre

Construira, construira pas... En deux jours, les débats autour de la construction d'un deuxième aéroport à Lisbonne ont enflammé la scène politique portugaise et fait craindre l'annulation du projet porté par Vinci Airports. Pourtant, celui-ci ne semble pas encore enterré et devrait être bientôt soumis à la consultation des grandes forces politiques.
Léo Barnier
Le projet de deuxième aéroport à Lisbonne n'est pas encore enterré... ni validé.
Le projet de deuxième aéroport à Lisbonne n'est pas encore enterré... ni validé. (Crédits : Vinci Airports)

es remous au sein du gouvernement portugais autour de la construction d'un second aéroport à Lisbonne ont fait couler beaucoup d'encre du côté de l'embouchure du Tage. Pourtant, ils pourraient ne pas signer pour autant la fin du projet porté par Vinci Airport, à travers sa filiale ANA Aeroportos de Portugal. Si le Premier ministre socialiste Antonio Costa a bel et bien désavoué son ministre aux Infrastructures, Pedro Nuno Santo, la réprimande ne portait que sur le fait qu'il ait déclaré de son propre chef que la décision de construire une nouvelle infrastructure était entendue. De quoi jeter un froid alors qu'Antonio Costa venait de promettre qu'il consulterait l'opposition avant tout arbitrage - en dépit de sa victoire nette et d'une majorité absolue obtenue lors d'élections anticipées en janvier.

Une période d'échange doit donc s'ouvrir prochainement, une fois désigné le nouveau président du Parti social-démocrate, principale force d'opposition placée au centre-droit de l'échiquier politique portugais. Ce qui devrait être la semaine prochaine. Malgré un départ imminent, l'actuel président du PSD, Rui Rio, a d'ailleurs profité de la polémique pour demander la tête de Pedro Nuno Santo, qui est resté au gouvernement après avoir présenté des excuses. De son côté, Antonio Costa a réaffirmé son attachement à un processus de consultation.

D'après un connaisseur du dossier, ces affrontements politiques ne présagent pas de l'issue du dossier. Selon lui, un consensus existe sur la nécessité de trouver une solution rapidement pour répondre à la croissance du trafic dans la capitale portugaise et au risque croissant de saturation des capacités aéroportuaires locales, sous peine de limiter la manne touristique essentielle pour le pays. D'autant que depuis quelques semaines, le trafic à Lisbonne revient quasiment au niveau de 2019, voire le dépasse sur certaines pointes.

Vinci Airports respire mieux

Dans ce chaos, Vinci Airports avait de quoi être inquiet pour son ambitieux projet local. Opérateur des dix plus grands aéroports portugais, via sa filiale ANA, le groupe français prévoit de doubler d'ici à 10 ans le nombre de mouvements d'avions (décollages, atterrissages) à Lisbonne, pour les porter à 72 par heure contre 38 aujourd'hui. Traitant avant la pandémie 30 millions de passagers aériens, Lisbonne devait être en mesure, avec ses deux plateformes, d'en accueillir à terme 65 millions.

Une partie de cette croissance doit provenir de l'extension de l'aéroport actuel Humberto Delgado, tandis que le reste est lié à la construction d'une nouvelle plateforme spécialisée sur le trafic dit de "point-à-point" sur l'actuelle base militaire de Montijo.

Cela représente un investissement chiffré à 1,15 milliards d'euros en 2019, mais ce montant pourrait être quelque peu révisé en raison de l'inflation à l'œuvre depuis plusieurs mois. De même, le projet initial prévoyait que l'aéroport actuel assurerait les deux tiers des mouvements, et Montijo le tiers restant. Cette répartition pourrait être amenée à évoluer pour mieux répondre aux besoins actuels. Si les deux projets venaient à se concrétiser, Vinci Airports porterait ces dépenses entièrement sur capitaux privés.

Le gros des projets semble en tout cas bouclé, même si quelques étapes réglementaires restent à franchir en sus du processus de consultation politique. Si elles s'enchaînent sans nouvelles frictions, une mise en service du second aéroport lisboète est envisageable à l'horizon 2027.

La séquence qui vient de s'achever montre néanmoins que le dossier n'est pas à l'abri d'un nouveau rebondissement. Surtout lorsque l'on sait que les débats autour d'un nouvel aéroport dans la région de la capitale portugaise durent depuis 50 ans, au cours desquels pas moins de 17 projets ont été étudiés.

Léo Barnier

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